Lucien Joseph COCHE (1918-2010)

Né le 9 mars 1918 à Paris (14e). Décédé le 23 juillet 2010.

Fils de Edmond COCHE, avocat, et de Mme née Hélène VANDRE. Frère de Georges Joseph Edmond COCHE (1911-1954 ; X 1931). Marié en aout 1942 à Jeanne-Marie WELSCHINGER (4 enfants).

Ancien élève de l'Ecole polytechnique (promotion 1936) et de l'Ecole des mines de Paris (entré en 1941). Corps des mines.

Au sujet de Lucien COCHE, lire aussi : Lucien Coche (36) Un père de la sidérurgie moderne, par Guy Dollé (63) et Pierre Emery (42) LA JAUNE ET LA ROUGE, Octobre 2010 - n°658

L'article qui suit a été publié dans Revue des Ingénieurs MINES, janvier/février 2011.

Lucien COCHE (P38)

par Marc GRUMBACH et Robert ALBERNY

Lucien Coche est décédé le 23 juillet 2010 à l'âge de 92 ans.

Il fut un grand personnage de la Sidérurgie Française et il a en particulier joué un grand rôle dans la vie de l'IRSID, Institut de Recherches de la Sidérurgie Française, devenu depuis le centre de recherches principal d'ArcelorMittal.

Né à Viroflay en 1918, il est entré major à Polytechnique après de brillantes études en 1936, à l'âge de 18 ans.

C'était une personnalité d'exception, d'une intelligence rare et d'une curiosité insatiable. Animateur infatigable, il a eu une vie extrêmement active avec une carrière à nombreuses facettes qu'il a su combiner avec une vie familiale aussi riche. Il avait acquis au cours de sa vie, la connaissance de plusieurs langues vivantes (anglais, allemand, espagnol, catalan, breton, russe) et anciennes (il lisait le grec dans le texte). Ceci a grandement facilité les nombreux contacts et les nombreuses amitiés qu'il a acquises grâce à une très grande ouverture d'esprit.

Lucien Coche et l'IRSID :

Après les péripéties (!) de la guerre (campagne de 1940, fait prisonnier, libéré en tant que mineur, puis admis à l'école des mines avec la promo 38), il fait un séjour de deux ans au service des Mines de Montpellier et rejoint en 1945 Albert Bureau au ministère de l'industrie. La direction de la sidérurgie traitait à cette époque de gros dossiers de modernisation des usines, d'organisation et d'investissements sidérurgiques et accessoirement de la création de l'IRSID. C'est ainsi qu'Henri Malcor, président de l'IRSID, lui demanda de créer un service Minerais à Saulnes en Lorraine, service qu'il dirigea de 1949 à 1953. Il s'y fit de nombreux amis.

Puis il passa 12 ans dans d'autres industries, des travaux publics dans des pays lointains au caoutchouc (chez Kléber-Colombes), avant de rejoindre en 1965 la société sidérurgique Neuves Maisons-Châtillon.

De retour à l'IRSID après les événements de 1968, il succède à Marc Allard, qui avait largement dépassé l'âge de la retraite, comme directeur général.

Il prit à bras le corps plusieurs problèmes vitaux dont le plus important était les relations avec les commettants, avec le financement en arrière plan mais aussi la réorganisation, la motivation des chercheurs, la formalisation des programmes.

Ayant la confiance des dirigeants de la sidérurgie dont la concentration accélérée réduisait le nombre, il institua avec leur accord un certain nombre de règles claires dans le fonctionnement du centre de recherches collectif. Cela concerna d'abord le financement et les effectifs, puis les comités, les publications qui furent mieux contrôlées.

Laissant beaucoup de liberté aux équipes de recherche il réussit à les libérer de certains interdits comme les aspects métallurgiques de la coulée continue.

Il ouvrit également des portes dans le domaine du laminage où la combinaison de l'automatisation avec les traitements thermomécaniques donna un bel élan à la fois en recherche et en applications industrielles.

Ayant l'expérience de la direction des hommes, il passa beaucoup de temps à traiter les problèmes de relations humaines, de contacts entre les équipes, les établissements et les usines. Il sut «orienter» les activités en maintenant la balance entre l'assistance technique toujours utile et les actions à long terme par exemple les recherches de base et les mesures.

Il fit un effort particulier pour organiser des relations fortes entre les établissements de Saint Germain et de Maizières-lès-Metz et il a initié des réunions à plusieurs niveaux.

Des innovations importantes ont porté sur l'essaimage, c'est-à-dire le départ des chercheurs confirmés vers les usines ; cela permettait de renforcer les services techniques des usines, de rendre plus facile les contacts avec l'IRSID et pour beaucoup de chercheurs de poursuivre une belle carrière. Cet essaimage fut accompagné par des détachements d'ingénieurs sur des projets précis de plus ou moins longue durée.

Son implication a permis de maintenir le rôle de l'IRSID et la confiance de ses commettants dans les périodes difficiles pour la sidérurgie qui ont suivi les deux premières crises de l'énergie en 74 et 78.

Lucien Coche et les autres organisations :

Visionnaire il comprit très tôt la place éminente que prit la sidérurgie japonaise dans l'innovation technique, fit de nombreux voyages au Japon et organisa astucieusement une coopération dans le domaine de la recherche avec les principales sociétés, Nippon Kokan, puis Nippon Steel. Le développement des échanges entre les deux professions en fut accéléré et cette coopération fut fructueuse pour tous : cela l'amena à créer à l'IRSID une équipe «Japon» formée au départ d'interprètes, qui se familiarisèrent avec les techniques sidérurgiques et ont rendu de grands services à l'IRSID et aux sociétés grâce aux bons contacts noués. Lucien Coche a d'ailleurs été nommé membre d'honneur de l'ISIJ, l'Iron and Steel Institute of Japan.

Lucien Coche s'intéressa également très tôt à la sidérurgie chinoise dés 1973, ce qui a permis d'amorcer des contacts avec la profession dans ce pays.

Malgré les contraintes que cela représentait, il prit soin d'assurer la coopération avec d'autres organismes professionnels qui étaient susceptibles d'assurer une bonne communication technique pour les chercheurs, comme l'ATS. Association Technique de la Sidérurgie, le Cessid, Centre de formation de la Sidérurgie, le CDS, Centre de documentation de la Sidérurgie ou la Revue de Métallurgie qu'il présida. De 1979 à 1980, il fut un président dynamique de ce qui était alors la SFM, Société Française de Métallurgie.

Il avait reçu la Croix de Guerre, et il était Officier de la Légion d'Honneur.

Publications :

Outre des articles techniques parus dans la revue de Métallurgie (notes 1 à 3) qui témoignent de son engagement pour la communication et la recherche, Lucien Coche a eu le souci de rassembler des témoignages de dirigeants et de chercheurs sur les réalisations de l'IRSID en tant que centre de recherches collectif, dans un ouvrage intitulé : Irsid - Histoire et petites histoires, par Eloi Cadichon.

Cet ouvrage, qui n'est pas un livre d'histoire officiel, montre l'évolution de la recherche dans le cadre d'une sidérurgie qui a profondément évolué pendant 50 ans. Il peut être consulté à la BNF ou à l'École des Mines et peut être acheté par l'intermédiaire de la SF2M.

Marc GRUMBACH, Robert ALBERNY

Notes