René MULLERET (mort en 1916)

Ancien élève de l'Ecole des mines de Paris (promotion 1903). Ingénieur civil des mines.


Publié dans Bulletin de l'Association amicale des anciens élèves de l'Ecole des mines de Paris, Juillet 1916 :

Parmi les camarades tombés glorieusement au champ d'honneur, René Mulleret, de la promotion 1903, est de ceux qui certainement ont plus particulièrement droit à notre pieux et douloureux souvenir.

René Mulleret a en effet été deux fois grièvement blessé pour notre chère Patrie et a laissé, après le sublime sacrifice de sa vie, un foyer d'autant plus douloureusement éprouvé, qu'en perdant l'affectueux soutien qui l'avait créé, il s'est trouvé privé des espérances pleines d'avenir sur lesquelles il pouvait compter.

A l'Ecole, Mulleret était pour chacun de nous le plus cordial, le plus dévoué des camarades. Travailleur acharné et infatigable, il fut, dès l'entrée en première année, à la tète de sa promotion, dont il resta major jusqu'à la sortie de l'Ecole.

Toujours consciencieux dans toutes les études qu'il entreprenait, il obtint la médaille d'or de l'Association pour son journal de voyage très documenté sur la Westphalie et la Belgique. Cette médaille lui fut remise avec les éloges les plus flatteurs de nos professeurs. Tout lui permettait d'espérer une carrière brillante.

Il débute, en sortant de l'Ecole, par un séjour de deux ans au Service des Etudes Financières du Crédit Lyonnais, où il se familiarise avec l'organisation d'ensemble et la conduite des affaires industrielles.

Il entre ensuite, en octobre 1908, à la Société du Gaz de Paris, au Service des Houilles, auprès d'un de nos distingués camarades, Boissière, Chef du Service des Approvisionnements de combustibles. Celui-ci ne tardait pas à apprécier les remarquables qualités de son nouvel ingénieur et à lui confier les missions et les postes de confiance.

Nous le voyons successivement aux bureaux du Service Central à Paris ; puis en résidence fixe à Arras, d'octobre 1910 à juin 1913 ; enfin à Rouen où il prend une part de plus en plus importante dans tous les détails d'exécution que comporte cette délicate question de l'approvisionnement en houille des Usines à Gaz de Paris.

Entre temps, Mulleret s'était marié. Son avenir était assuré, il avait pu réaliser enfin des projets formés depuis de nombreuses années. A ce foyer si uni, égayé par l'arrivée de deux enfants, tout respirait le calme confiant d'un bonheur aussi parfait qu'on peut le souhaiter, quand, brusquement, la guerre éclata.

C'est à Rouen que la mobilisation surprend notre camarade, qui rejoint aussitôt comme lieutenant le 246e d'infanterie, à Fontainebleau. Il a l'honneur de porter le drapeau.

Au régiment, comme partout ailleurs, il ne tarde pas à gagner la haute estime de ses chefs, la sympathie et la confiance de tous ceux qui l'entourent.

Le 6 septembre, devant Barcy, une balle le frappe en pleine poitrine. Sa blessure n'offre pas la gravité que l'on avait craint tout d'abord ; il se guérit assez vite et en hâte, après un bien court repos auprès des siens, il rejoint le front le 30 janvier.

Il y reçoit le commandement d'une compagnie et se remet avec ardeur à ses nouvelles obligations militaires, hélas ! pour peu de temps.

Le 7 février, au cours d'une visite de sa ligne de tranchées et aux côtés de son chef de bataillon, il est blessé grièvement d'un éclat d'obus. Transporté et soigné dans une ambulance du front, Mulleret, aux premiers jours de mars, y est décoré de la Légion d'honneur. Mais il ne peut jouir longtemps de cette croix si chèrement et vaillamment acquise ; peu de temps après, le 4 mars, Dieu mettait un terme à ses cruelles souffrances et lui donnait, nous en sommes persuadés, la vraie récompense du soldat mort en chrétien en son nom et pour la France.

Dans ses dernières heures de souffrance, notre pauvre camarade n'a pas eu la consolation de voir auprès de lui celle que retenait à son foyer la garde des enfants et qui suivait avec tant d'anxiété les péripéties de la terrible lutte se déroulant au front. A tous deux, Dieu a demandé le sacrifice complet.

... La citation ci-dessous rappelle glorieusement sa belle conduite :

« Mulleret (René), lieutenant au 246e régiment d'infanterie, porte-drapeau ; a été blessé grièvement le 6 septembre, au moment où il montait à l'assaut, drapeau déployé. Revenu sur le front le 30 janvier et placé à la tête d'une compagnie, a été de nouveau blessé grièvement le 7 février, à côté de son chef de bataillon, tué à ses côtés. »

A. Dupuis.