Maurice ROUCHER (mort en 1935)

Ancien élève de l'Ecole des mines de Paris (promotion 1910). Ingénieur civil des mines.


Bulletin de l'Association des Anciens élèves de l'Ecole des mines de Paris, 1935 :

Notre malheureux camarade n'est plus : mort tragiquement et sur le coup, dans un terrible accident d'automobile. L'année dernière, sur la même route et presque au même endroit, revenant d'une longue randonnée, il avait échappé par miracle à un accident également d'automobile.

C'est une perte pour notre Ecole, et pour le Maroc où il s'était déjà fait, à quarante-sept ans, une situation de tout premier ordre.

Homme de caractère et même d'un grand caractère, il était de plus, aimable, toujours souriant et toujours prêt à obliger. Avait-on un ennui? une difficulté? une peine? on allait lui demander conseil; il le donnait et généralement excellent, car son intelligence valait son cœur.

Bon sens, dévouement et intégrité, telles sont les vertus magistrales qu'il a pratiquées toute sa vie. Elles lui valurent d'ailleurs une réussite croissante : il était devenu une des véritables personnalités de Casablanca.

Ses obsèques eurent lieu le 19 juin, en présence d'une affluence considérable. Sans arrêt, la foule anonyme est venue s'incliner devant son cercueil, qu'encadraient de nombreuses et magnifiques couronnes.

Toutes les autorités de Casablanca ont assisté aux obsèques : S. Exe. le Pacha de Casablanca, le doyen du Corps Consulaire, les autorités civiles, militaires, et aussi le capitaine de frégate représentant l'amiral Penfentenyo de Kervereguen.

L'office est célébré à l'église du Sacré-Cœur, sous le porche de laquelle sont prononcés les discours : le Directeur de l'usine des superphosphates souligne l'exceptionnelle valeur, à tous points de vue, du Directeur général de la Cie; le vice-président du Comité des fêtes adresse le dernier adieu à son Président et rappelle les éminents services rendus par lui au Comité, à qui il fit réaliser le triple but poursuivi : amuser le peuple, augmenter le plus possibe les ressources des œuvres de bienfaisance, enfin se consacrer aussi aux questions économiques et sociales d'une manière en rapport avec leur importance capitale. A ce dernier point de vue l'action de notre camarade est mise particulièrement en valeur, dans son discours, par le Président de la Chambre de Commerce et d'Industrie de Casablanca.

Le vice-Président de la Commission Municipale adresse ensuite son hommage au collègue qui était le plus actif, le plus savant et le plus artiste d'entre eux.

Le Lieutenant-Colonel sous-chef d'Etat-Major du Commandement Supérieur des troupes d'occupation du Maroc apporte le dernier salut du Général et des Officiers instructeurs et de réserve. Il rappelle le brillant officier que fut l'ancien polytechnicien, l'artilleur Maurice Roucher, quî, malgré ses écrasantes fonctions de Directeur général d'une des premières industries du monde, n'hésita pas à consacrer à l'activité militaire le temps qu'il aurait pu très légitimement réserver à la détente et au repos. Durant la Grande Guerre, le capitaine Roucher fut deux fois blessé au front; il apporta ensuite au service délicat des fabrications de guerre ses brillantes qualités intellectuelles et ses connaissances techniques. Le sous-chef d'Etat-Major annonce alors que le Ministre de la Guerre vient de lui décerner, par télégraphe, la croix des services militaires volontaires.

Enfin le consul général de Pologne, au nom de son gouvernement et de toute la colonie polonaise du Maroc, exprime en quelques paroles émouvantes les regrets profonds que cause la disparition brutale de l'homme d'élite qui rendit de si précieux services à ses compatriotes.

Tous les orateurs s'inclinent devant Madame Roucher et ses enfants, puis l'inhumation a lieu, dans l'intimité, au nouveau cimetière de Casablanca.

Ses camarades des Mines ne peuvent laisser disparaître celui qui fut un des meilleurs parmi eux sans témoigner, par la grande voix du bulletin, à la veuve et aux enfants du camarade regretté, l'assurance que le souvenir de Maurice Roucher sera pieusement conservé parmi nous.

H. C.