Charles ROULLET

Ecole des mines de Paris (promotion 1856).

Bulletin de l'Association amicale des anciens élèves de l'Ecole des Mines, Avril 1898

Tous ceux de nos camarades qui ont connu Charles Roullet ont été douloureusement surpris par la nouvelle de sa mort ; ni son âge, ni les apparences de sa santé ne pouvaient faire prévoir une fin si prématurée.

Depuis une quinzaine d'années Roullet était sorti du milieu industriel où il avait débuté et dans lequel nous l'avions connu et apprécié. Mais malgré cet éloignement que les circonstances lui avaient imposé, il n'est personne qui n'ait constaté combien vivace était demeuré en lui son attachement aux souvenirs et aux affections d'école ; il n'est pas d'accueil plus cordial que celui qu'il réservait à ses vieux camarades, on sentait combien en les retrouvant il était heureux de renouer les chaînes d'un passé déjà loin, mais qui lui restait toujours cher.

A sa sortie d'école en 1859, Roullet fait ses débuts dans les Mines et la Métallurgie d'abord en Espagne puis à Decazeville. Mais c'est à partir de 1863, quand il entre dans les usines de MM. Petin-Gaudet, à Givors, que notre camarade aborde réellement sa carrière industrielle.

Son jugement sûr, ses qualités de travailleur intelligent et dévoué le font bientôt apprécier comme il le mérite et c'est pendant cette période de 1863 à 1871 qu'entre lui et un de ses camarades plus ancien de quelques années, Louis Pion, Directeur technique des Etablissements Petin-Gaudet se crée une affection profonde que Roullet devait, après la mort de l'homme excellent qu'était Louis Pion, reporter d'une façon si touchante sur la famille de son ami.

Les événements qui suivent la guerre entraînent notre camarade à changer de situation ; il revient passer quelques mois à Decazeville, puis il se décide à aller s'installer à Paris

A cette époque on organisait la Société fermière du Monopole des Allumettes.

Un de nos camarades, Beudin, venait d'être mis à la tête des services techniques de la Société ; il voulut s'adjoindre Roullet comme sous-directeur.

Dans ses nouvelles fonctions, qu'il devait conserver pendant 7 années, chargé des détails compliqués d'une fabrication qu'il fallait réorganiser et développer d'urgence, Roullet, par son esprit pratique et son dévouement infatigable sut répondre à toutes les exigences.

En 1880, les instances de sa famille le ramènent dans son pays natal ; ses beaux-frères MM. Rocher possèdent à la Côte St-André des établissements de distillerie bien connus ; ils s'adjoignent notre camarade pour la gestion de leur importante et délicate industrie.

En se décidant, non sans quelques hésitations, sans doute, à ce gros changement dans sa carrière industrielle, Roullet se laisse guider par l'intérêt de sa nombreuse famille ; il pensait d'ailleurs et avec raison que l'homme de volonté et d'intelligence peut toujours trouver l'utile application de ses efforts aux obligations du moment, quelles qu'elles soient.

Notre camarade a désormais atteint sa dernière étape ; mais il ne tarde pas à ajouter à son travail quotidien d'autres occupations non moins absorbantes que lui dictaient son coeur et ce qu'il appelait ses devoirs de patronage ; toutes les oeuvres de bienfaisance de la région peuvent bientôt compter sur son concours.

Sa tâche quotidienne redevient lourde, mais notre camarade avait toujours été un grand travailleur, il conserve donc avec joie jusqu'à sa mort la charge de ses multiples fonctions et c'est en pleine activité de travail et de dévouement que la maladie vient brusquement l'atteindre et le terrasser.

Cette mort nous prive d'un camarade dévoué, doué d'un coeur excellent, qui a laissé parmi tous ceux qui l'ont connu d'unanimes regrets. Puisse l'expression de ces regrets et de la sympathie dont la mémoire de Roullet sera entourée parmi nous être de quelque consolation pour sa famille si douloureusement frappée.