EDITORIAL
 

par Claude Trink
Ingénieur général des Mines


Le 23 avril 2004, avec la fermeture de la dernière mine de charbon exploitée en France, une grande aventure industrielle prend fin. Cette fermeture, dictée par l’évolution dans le choix des approvisionnements énergétiques et les coûts de revient, s’inscrit dans le cadre d’un retrait anticipé de longue date, et confirmé en 1994 avec le Pacte Charbonnier. Par ses répercussions au plan social, mais aussi au niveau de la situation économique des bassins miniers, elle constitue un exemple achevé d’une mutation industrielle dont le Président de Charbonnages de France, Philippe de Ladoucette, analyse les interactions avec la société française depuis l’origine en 1756 de l’exploitation charbonnière organisée.
La présentation de l’évolution d’une grande entreprise permet de situer les enjeux du phénomène, devenu maintenant permanent, des mutations industrielles. Un grand nombre d’acteurs sont impliqués : les salariés et dirigeants d’entreprises, les collectivités locales et territoriales, l’Etat, les élus, les syndicats, les cabinets de reclassement et sociétés de conversion, les responsables de formations,… A l’occasion de cet événement symbolique de l’histoire industrielle française, les Annales des Mines ont souhaité éclairer les relations entre les acteurs et les approches mises en œuvre, au sommet de l’Etat comme au plan local, dans le traitement de ces situations porteuses de crises mais aussi d’opportunités..
Par l’ampleur des conséquences, l’Etat se trouve le plus souvent impliqué ; il a dû progressivement définir et appliquer des outils et des méthodes pour répondre à ces situations de déséquilibre. Noël Huret, conseiller technique du Ministre de l’Industrie présente les approches utilisées, tandis que Frédérique Pallez et Franck Aggeri, du Centre de Gestion scientifique de l’Ecole des Mines de Paris, mettent en évidence les nouvelles formes de l’action de l’Etat et dégagent des lignes-force pour l’intervention publique. L’Etat a souvent recours à un chef de projet pour coordonner ses différentes interventions sur un territoire en crise et Michel Bove qui a assumé cette fonction à plusieurs reprises apporte une réflexion sur les missions qu’il a conduites.
Le phénomène des mutations industrielles n’est pas propre à la France : Sergio Arzeni donne quelques exemples concrets de situations gérées dans les pays de l’OCDE, dont il est Directeur du programme « Développement économique et création d’emplois au niveau local ». Dans la conduite de ces transformations, le dialogue social joue un rôle essentiel comme le souligne Jean-Marc Mohr, Vice Président du Conseil économique et social de Lorraine et jusqu’à récemment Président CFTC Lorraine. Enfin Xavier Tedeschi, expert en reclassement, met en évidence l’importance de la gestion des compétences dans la revitalisation des territoires.
Ce numéro propose également la présentation d’expériences locales et des enseignements qui ont pu en être tirés.
Le Préfet Didier Cultiaux et Eric Tardieu dressent un bilan de la convention de redynamisation Moulinex en Basse-Normandie et précisent le rôle de l’Etat en région. A partir de l’expérience développée depuis plus de 35 ans par Charbonnages de France dans la reconversion des bassins miniers, nous présentons le rôle et les différentes facettes du développement territorial : approches, acteurs, coût, financement et résultats. Le Député de Montceau-les-Mines Didier Mathus et le Maire de Forbach Charles Stirnweiss apportent le témoignage des évolutions dans leurs circonscriptions respectives. Sur le bassin des Mines de Potasse d’Alsace opère une société de conversion locale dont son Directeur général Gérard Decker détaille les modalités d’intervention.
Quelles sont à l’avenir les sources significatives de nouveaux emplois ?
Deux pistes sont présentées ici: la création d’entreprises et les nouvelles filières.
Former à l’entrepreneuriat, tel est le défi que relèvent Jean-Claude Duriez, Directeur de l’Ecole des Mines de Nancy et Stéphane Boiteux, Enseignant à l’ICN-Ecole de Management : ils analysent les relations entre apprendre, savoir et créer.
Enfin, présentant une filière qui a connu un développement spectaculaire ces dernières années, Philippe Baldin analyse les perspectives des « centres de gestion de la relation client ».
En guise de conclusion, Grégoire Postel-Vinay pose sur la question de la désindustrialisation en France un regard d’économiste engagé dans l’action administrative ; il précise à cet égard les paramètres et les enjeux des réformes dans le domaine de la recherche.
 
 
 
 
 
 
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