Georges Jean PAINVIN (1886-1980)

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Fils de Georges Félix PAINVIN (1859-1945 ; X 1878, industriel). Petit-fils de François Potin Samuel VIRGILE (1821-1895 ; X 1840, général de division d'artillerie maritime), de Louis Félix PAINVIN (professeur) et de son épouse Hyacinthe Emilie Alexandrine Robertine Juliette DUFOUR.
Frère de Louis Samuel PAINVIN (1883-1968 ; X 1903, ing. en chef de l'Artillerie navale devenu admin. de SACL) et de René PAINVIN, époux de Manon HAAS fille de Marcel HAAS (1865-1945 ; X 1886 ing. en chef du Génie maritime).
Epouse en 1910 Marianne LEFORT, fille de Edouard Adolphe LEFORT (1845-1906 ; X 1865).
Enfants : Suzanne (épouse Guy MARLIO le 22/10/1930), Jacqueline (épouse de Jean MARETTE), Renée (épouse de Paul GAMELIN), Jean-Marie, Pierre-Marie.
Jean-Marie René PAINVIN, fils de Georges, né en 1917, fut diplômé de l'Ecole Centrale des arts et manufactures. Il fit une brillante carrière à l'international, notamment à Vallourec.

Georges PAINVIN est ancien élève de Polytechnique (sorti classé 2ème de la promotion 1905 juste derrière le major, Léon Daum) et de l'Ecole des Mines de Paris. Voir son bulletin de notes à l'Ecole des mines. Il a appartenu au Corps des mines.


Résumé de la carrière de Painvin

1902 : Premier prix de violoncelle au Conservatoire de musique de Nantes.
1911-1912 Professeur à l'Ecole des mines de Saint-Etienne (géologie, paléontologie, chimie)
1913-1945 Professeur à l'Ecole des mines de Paris (paléontologie) - carrière interrompue par la guerre - occupation à temps partiel à partir de 1919
1913 Travaux de paléontologie sur les spirules
1913 Contribution à la géologie des plateaux de Bou-Denib (Maroc)
1914-1918 Il décrypte 240 messages chiffrés allemands, grâce à la découverte des systèmes de cryptage et des codes
1931 Paléontologie du Sud-Oranais
A partir de 1919 : Carrière industrielle dans l'électrométallurgie, notamment à Electrochimie Ugine. Direction des comptoirs du ferro-silicium et du ferro-chrome. Direction du Comptoir du carbure de calcium, et de sociétés de la Houille Blanche.
1926-1940 Administrateur délégué, Société d'électrochimie, d'électrométallurgie et des aciéries électriques d'Ugine ; 1940-1946 : Président d'Ugine
1930-1941 Président de la société des produits azotés
1934-1935 Réorganisation de la bourse de commerce de Paris
1937 Vice-président de la chambre de commerce de Paris
1938 Président de l'Union des industries chimiques
1940-1945 PDG, Bourse de commerce de Paris ; Président fondateur du Comité électrométallurgique de France ; Président de la Chambre syndicale d'électrochimie et d'électrométallurgie
1941-1944 Président du Crédit commercial de France
1944 Président de la chambre de commerce et d'industrie de Paris
1948 Président d'honneur, Société Ugine-Kuhlmann
1950-1951 Président délégué, Omnium Nord Africain
1951 Président délégué, Société chérifienne du plâtre
1951-1958 Président délégue de la société chérifienne d'ouvrages maritimes ; reconstruction du port de Casablanca
1955 PDG, Safichimie (exploitation du gypse)


D'après UGINE histoire des aciéries électriques, Charles Le Ménestrel, Editions lyonnaises d'Art et d'Histoire, 1993 :

Né en 1886, Painvin sort major de l'X [NDLR : en réalité 2ème], promotion 1905, puis devient ingénieur au Corps des Mines. Brille encore son auréole acquise en juin 1918, en réalisant avec deux camarades de son état-major le tour de force intellectuel de décrypter, en quelques jours, le «Radiogramme de la Victoire», qui a permis au Grand Etat-Major de bloquer la dernière offensive allemande.

Entre les deux guerres, il a dirigé le Comptoir des Ferro-Alliages, étonnant ses collaborateurs par la clarté et l'organisation de son esprit, notamment dans le domaine des plans comptables.

Georges-Jean Painvin fut administrateur-délégué de la SECEMAEU de 1926 à 1945. Le président de cette société, Maurice Chéronnet, démissionnera en décembre 1940, en même temps qu'Eugène Mathieu, René Perrin, Raymond Berr (Kuhlmann) et André Goldet (Société Le Nickel), par application de la loi du 18 septembre limitant le nombre des administrateurs. Il décédera en 1946. La SECEMAEU a été créée en 1921-1922 par fusion des aciéries d'Ugine, de Paul Girod, et de la SECEM (société d'électro-chimie et d'électro-métallurgie).

En même temps, il est toujours professeur de paléontologie à l'Ecole des Mines de Paris.

La Branche Aciers peut être reconnaissante à sa largeur de vue étonnante qui, en ces années difficiles, fait confiance à René Perrin pour donner à Ugine les moyens de son développement, en engageant sa responsabilité vis-à-vis du Conseil. René Perrin en est bien conscient et il l'exprimera dans son allocution lors de la remise de son épée d'académicien.

G.J. Painvin démissionnera à la fin de 1945 de la présidence de la SECEMAEU. Ayant refusé en 1948 de reprendre sa place au Conseil, il sera nommé Président d'honneur, place qu'il acceptera de garder lors de la fusion avec Pechiney. Il décédera en Janvier 1980, à l'âge de 93 ans, ayant conservé toute sa lucidité.

Georges-Jean Painvin a auprès de lui Eugène Mathieu, directeur central de la Société. Il est patent qu'ils travaillent en toute confiance réciproque. Ils sont d'ailleurs de la même promotion de Polytechnique (1905). [La suite de la carrière de Painvin se passa à la tête de la CCI de Paris, du groupe PUK et du CCF comme on verra plus loin].


2 Juin 1918, un tournant de la "Grande Guerre"
Hommage à Georges Painvin (1886-1980)
Ingénieur des Mines et Paléontologue

Biographie rédigée par Jean-Michel Le Cléac'h

"Accélérer la montée des munitions. Point. Même pendant le jour partout où l'on n'est pas vu."

(Le Radiogramme de la Victoire émis le 1er juin 1918 et décrypté par Painvin le 2 juin 1918)

De la Grande Guerre, l'Ecole des Mines de Paris garde intacte la mémoire de ses morts comme en témoignent les 111 noms gravés dans le marbre de son monument aux morts, près de l'entrée de la salle du conseil.

C'est un bien lourd tribu que les mineurs et notamment les plus jeunes d'entre eux ont payé à la guerre; ce sont en effet 22 élèves des promotions 1912 et 1913 qui ont ainsi versé leur sang pour l'honneur de la France et de l'Ecole.

On remarquera aussi sur le monument le nom de Robert Douvillé, chef de travaux pratiques, dont le fichier informatisé de la collection systématique du Musée de Minéralogie nous apprend qu'il fit don de nombreux échantillons de grand intérêt. Ironie de l'histoire, c'est d'Allemagne que venait un grand nombre d'entre eux.

Les murs mêmes de l'Ecole, comme le commémore une plaque sur le Boulevard Saint-Michel sont toujours marqués des balafres qui lui furent infligées en 1918 lors des bombardements de Paris. Tout d'abord à la fin du mois de janvier ce sont les bombardiers Gotha qui larguèrent leurs torpilles de 300 kilogrammes dont l'une au-moins est tombée sur le Luxembourg. Puis, à partir du 23 mars 1918 à 7H15, débutèrent les tirs de 2 canons à longue portée surnommés improprement par les parisiens "Grosses Berthas". Ces canons appartenant en réalité à la classe des "Wilhelm Geschütze" avaient pour noms "Max le Long" ("Langer Max") et "Empereur Guillaume" ("Kaizer Wilhelm"). Avec leur tube de 34 m de long, ils étaient capables de tirer des obus de calibre 232mm et d'une masse de 104 kilogrammes à 126 kilomètres de distance.

Du 23 mars 1918 jusqu'au 1er mai 1918, 206 obus tombèrent ainsi sur Paris dans le but d'effrayer la population. Pour la petite histoire on dit que l'agonie de Claude Debussy, décédé le 25 mars 1918, a été précipitée par ces bombardements.

Mais, à l'occasion de la commémoration du 80ème anniversaire de l'armistice de 1918, il s'avérait essentiel que nous nous remémorions la date plus heureuse du 2 Juin 1918.

Bien que trop mal connue, cette date doit être considérée comme ayant été déterminante dans la victoire des alliés. Comme nous allons le voir, les faits qui se sont déroulés à cette date ont également beaucoup à voir avec la nature de la formation qui était et est toujours dispensée à l'Ecole des Mines de Paris.

Peu le savent ou s'en souviennent, mais c'est en effet ce jour là que Painvin fournit à l'Etat-Major la traduction décryptée d'un message envoyé le 1er Juin 1918 du Quartier Général ennemi en direction d'avant-postes allemands de la région de Montdidier. Ce message décrypté qui changea le cours de l'histoire est connu aujourd'hui comme le "Radiogramme de la Victoire". Comme le dit Painvin dans l'introduction de son "Exposé des travaux de Cryptologie effectués de 1914 à 1918", cet "événement cryptologique du 2 juin 1918 permit au Haut-Commandement français de prendre avec certitude, en temps utile, les dispositions voulues pour renverser une situation devenue critique et la transformer en une épopée victorieuse."

Voici le texte crypté du radiogramme allemand:

fgaxa xaxff faffa avdfa gaxfx faaag dxggx agxfd xgagx gaxgx agxvf xxxag xfdax gdaaf dggaf fxggx xdfax gxaxv agxgg dfagd gxvax vfxgv ffgga xdgax advgg a

Comme vous le constatez ce message, comme tous les messages du 1er Juin était codé sur 6 lettres (code ADFGVX), alors que jusqu'au 30 Mai, les messages ne l'étaient que sur 5 lettres (code ADFGX). Cet obstacle, arrive au plus sombre moment de la guerre, à la veille de la poussée allemande sur Paris, mais cela ne décourage pas le jeune capitaine Painvin qui le surmontera en moins de 24 heures.

Cet exploit lui valut d'être fait Chevalier de la Légion d'Honneur à titre militaire le 10 juillet 1918 avec la mention: "a depuis le début de la Campagne rendu des services exceptionnels aux Armées". Cette mention peut paraître aujourd'hui fort sibylline tant l'exploit réalisé par Painvin et ses conséquences sont immenses; mais rappelons nous qu'en France, les travaux effectués par le Service du Chiffre sont considérés comme secret militaire pendant 50 ans. Ce n'est qu'en décembre 1962 que l'exploit de Painvin fut enfin rendu publique par un article écrit par le général Desfemmes. Le mérite de Painvin fut finalement justement couronné par son élévation au grade de Grand Officier de la Légion d'honneur le 19 décembre 1973.

Notons que jusqu'à la levée du secret militaire, Painvin n'avait jamais parlé à quiconque, y compris à ses plus proches collaborateurs, de ses travaux de cryptologie au service de l'Armée, ni révélé son décryptage historique du "Radiogramme de la Victoire", ce qui l'honore. Comme il est écrit dans un article de la Revue des Ingénieurs de 1974 consacré à l'exploit Painvin: "Un regret, c'est que le silence eut été la règle pendant cinquante ans. Mais une fierté que ce soit un camarade et un professeur de l'Ecole des Mines de Paris qui ait rendu ce service insigne à sa Patrie".

Pour la petite histoire notons aussi que le secret militaire fut si bien gardé pendant toutes ces années que le colonel de l'armée allemande Nebel, le très ingénieux inventeur du code "ADFGVX", ne sut qu'en 1967 que son code avait été cassé, ce qui fut pour lui une immense et fort désagréable surprise. Nous avons pu également vérifier que la méthode, fort ingénieuse et complexe, utilisée par Painvin pour effectuer ce décryptage, réputé impossible à une époque où les ordinateurs n'existaient pas, est pris aujourd'hui comme exemple dans les ouvrages de cryptologie modernes.

Qui était Georges-Jean PAINVIN?

Entré en 1905 à l'Ecole Polytechnique, Painvin en sortit major [en réalité 2ème] et intégra le Corps des Mines en 1908. Peu après sa sortie il fut nommé en 1913 professeur de Paléontologie à l'Ecole des Mines de Paris, fonction qu'il assuma pendant trente deux ans. Il fut aussi Président de la Chambre de Commerce et d'Industrie de Paris (et il réorganisa l'Ecole HEC en 1944), du groupe Pechiney-Ugine-Kuhlmann et du Crédit Commercial de France.

Painvin lors de l'allocution qu'il fit le 19 décembre 1973, lors de la cérémonie au cours de laquelle il reçut la plaque de Grand Officier de la Légion d'honneur, attribuait à l'excellence de la formation reçue durant ses études, et notamment celle dispensée par l'Ecole des Mines de Paris le fait d'avoir réussi le décryptage impossible,

"J'ai toujours pensé en effet que si j'ai pu, pendant la guerre 1914-1918, rendre quelques services à notre pays en décryptant les télégrammes chiffrés allemands transmis par la voie des ondes, je le devais à la double formation que j'avais reçue ... ...de notre grande école... ..., car c'est à la conjugaison des sciences exactes et des sciences d'observation que je dois d'avoir pu réaliser les découvertes dont cette cérémonie marque le couronnement."

Durant l'année 1913, Painvin avait suivi l'enseignement de l'Ecole de Guerre; mais n'y reçut jamais aucun cours de cryptologie. Le général Desfemmes rapporte que dès son incorporation en 1914, "Son dynamisme et son excellente présentation l'avaient fait remarquer et lui avaient valu de recevoir comme affectation de mobilisation les fonctions d'Officier d'Ordonnance du Général Maunoury dont il devint rapidement le collaborateur indispensable."

Après la victoire de l'Ourcq et de la Marne, le Général Maunoury établit le quartier général de la 6ème Armée, dont il avait le commandement, à Villers-Cotterets. C'est là que Painvin se lia d'amitié avec le chiffreur, le capitaine Paulier et qu'il se passionna pour les mystères du "Chiffre". La 6ème Armée captait, en effet, les télégrammes allemands émis par T.S.F. en morse. Painvin se fit remettre les messages chiffrés et s'y intéressa. Le résultat ne se fit pas attendre: le 21 janvier 1915 le fameux "Cabinet Noir" du chiffre reçut un mémoire de Painvin, alors tout à fait inconnu de ce service, qui proposait une méthode pour reconstituer toute nouvelle clé du système, avec le premier texte intercepté, donc un seul, quelle qu'en soit la longueur. Le système fut appelé le système ARC.

A la suite du mémoire de Painvin, le Colonel Cartier, qui dirigeait le Chiffre demanda immédiatement à Maunoury l'affectation de Painvin au "Cabinet Noir". Mais le Général Maunoury refusa et il fallut l'intervention du Ministère de la Guerre et du ministre Millerand lui-même pour que Painvin prît place dans ce fameux "Cabinet noir" dont il fut volontairement quatre années durant prisonnier. Sa mission était de résoudre les nombreux problèmes cryptographiques posés par les allemands dont le Chiffre s'avérait exceptionnellement inventif. Sa géniale solution au problème du décryptage du code A D F G X fut le couronnement de son activité cryptologique.

Painvin raconta qu'au cours de ces essais pour casser le code ADFGVX, le Colonel Cartier, qui dirigeait le Chiffre, vint le voir. Il se tint pendant quelque temps derrière lui, le regardant triturer les textes et finalement il lui dit un peu tristement: "Mon pauvre Painvin, je crois que cette fois, vous n'en sortirez pas!". Cette réflexion sonna pour Painvin comme un véritable défi, ce qui le poussa à redoubler d'intelligence et d'énergie jusqu'à apporter un démenti à Cartier. H.O. Yardley dans son ouvrage "The american Black Chamber" écrit ainsi:

"Le Capitaine Georges Painvin, le plus grand expert en code qu'aie eu la France, génie analytique de premier ordre, avait une manière de résoudre les messages en code qui tenait de la sorcellerie..."

Painvin, ne s'était pas ménagé tant intellectuellement que physiquement durant son passage au Cabinet Noir. Il y avait consumé une très grande partie de son énergie vitale et sa santé, devenue problématique à la fin de la guerre, l'obligea à suivre après l'Armistice quelques années de repos et de convalescence avant de recouvrer sa santé et de reprendre ses activités de professeur et de dirigeant de sociétés industrielles.

Un ancien élève de l'école, André Poupardin (promotion 1943) se souvient que Georges-Jean Painvin venait à l'Ecole des Mines donner son cours de paléontologie dans une somptueuse limousine conduite par un chauffeur, à un moment où les rares véhicules roulaient pour la plupart au gazogène. "Painvin arrivait souvent en retard pour donner ses cours de paléontologie, avait la plupart du temps la tête ailleurs et on sentait bien que l'on avait affaire à un homme pressé" nous dit il. Notre ami Henri Carpentier (promotion 1943), qui fut également son élève se souvient que Painvin très assuré devant le tableau noir lors des cours magistraux, apparaissait moins à l'aise en séances de travaux pratiques, un fossile entre les mains et consultait très fréquemment Piveteau, alors chef de travaux pratiques.

Pour en savoir plus sur le Radiogramme de la Victoire.

On ira voir à l'Hôtel des Invalides à Paris la Salle du Musée de l'Armée consacrée à la guerre 1914-1918, qui relate dans la vitrine du "Chemin des Dames" l'histoire du Radiogramme de la Victoire et de son décryptage par le capitaine Painvin. Dans cette vitrine est placée le texte suivant:

"Le Radiogramme de la Victoire"

En 1918, les offensives allemandes sur le front britannique, le 21 mars, puis sur le front français de l'Aisne, le 27 mai, menaçaient directement Paris. Nul ne savait alors où se produirait la prochaine offensive ennemie. Le travail de nos cryptologues devait permettre de le savoir avec exactitude.

Le nouveau chiffre allemand mis en service en mars 1918 n'utilisait que cinq lettres: A, D, F, G, X. Ce système très compliqué nécessitait l'emploi de deux clés, changées chaque jour.

Dès le 5 avril, le capitaine G.-J. PAINVIN avait découvert, par l'étude des messages chiffrés du 1er avril, les deux clés utilisées et reconstitué le système de chiffrement.

Mais le 1er juin, en pleine crise de l'offensive sur l'Aisne, les Allemands ajoutèrent une sixième lettre, le V , mettant nos services aux prises avec une difficulté nouvelle. Le 2 juin, le capitaine PAINVIN avait résolu le problème et restitué les deux clés. Elles permirent le décryptage de tous les messages chiffrés captés le 1er juin. Parmi ceux-ci figurait un radiogramme adressé par le Haut Commandement allemand à un E.-M. d'Armée repéré par la radiogoniométrie dans la région REMAUGIS, TILLOLOY, à l'Est de MONTDIDIER.

"Accélérer la montée des munitions. Point.

Même pendant le jour partout où l'on n'est pas vu."

Les Divisions du Général MANGIN furent donc concentrées dès les premiers jours de juin face au point précis où se déclencha, le 9 juin, l'offensive allemande. Celle-ci échoua. La porte de Paris était définitivement fermée à l'ennemi. Pour nous, celle de la victoire allait s'ouvrir.

Bibliographie:

Le "Radiogramme de la Victoire" (1er Juin 1918) René Alquier et Guy Sabin Revue des Ingénieurs; Septembre-Octobre 1974

"Un exploit inconnu de la guerre 1914-1918" Maurice Polti; Revue des Ingénieurs et Cadres de France. de novembre 1966

Painvin Georges-Jean Cahiers de Paléontologie (en 7 volumes) Embranchement des monomérides, bryozoaires et brachiopodes Paris, Masson et Cie, 1939

Embranchement des cÿlentérés Paris, Masson et Cie, 1939

Embranchement des mollusques lamellibranches Paris, Masson et Cie, 1939

Embranchement des mollusques gastropodes, amphineures, scaphopodes Paris, Masson et Cie, 1939

Embranchement des mollusques céphalopodes Paris, Masson et Cie, 1941

Embranchement des arthropodes Paris, Masson et Cie, 1942

Embranchement des spongiaires et des échinodermes Paris, Masson et Cie, 1945

Painvin Georges-Jean Cours de Paléontologie professé à l'Ecole Nationale Supérieure des Mines de Paris Slsn.; 1924-1925

Painvin Georges-Jean La chimie et la métallurgie dans leur unité scientifique. Chimie et Industrie, Paris, 1934.

Painvin Georges-Jean Exposé des travaux de cryptologie effectués de 1914 à 1918.

H.O. yardley "The american Black Chamber", 1931.

Colonel Guy François "Les canons allemands de 21/35 cm, Wilhelm Geschütze" Fortifications et patrimoine Juillet 1998, N°7.

MINES Revue des Ingénieurs, novembre 1980 (cahier central)



Georges Painvin, Président de la Chambre de Commerce et d'Industrie de Paris de janvier à octobre 1944
Photo CCIP ; cote 2Fi Portraits 148 ; Crédit DR/CCIP. Interdiction de reproduire sans l'autorisation de la Chambre de Commerce et d'Industrie de Paris.


MINES Revue des Ingénieurs, novembre 1980 :

NÉCROLOGIE : Georges-Jean PAINVIN (CM 1910)


Texte établi à partir de notes et propos recueillis pas R. ALQUIER (P 1924), G. SABIN (P 1929) et M. LERVILLE.

Georges-Jean PAINVIN s'est éteint le 21 janvier à son domicile parisien dans sa quatre-vingt-quatorzième année. Il n'est pas trop tard pour évoquer son souvenir et rappeler les services exceptionnels rendus.

Tous ses anciens élèves ont encore présent à la mémoire sa silhouette élégante, la clarté de son enseignement, et les « petites bêtes » qu'il proposait à leur admiration venaient avec bonheur apporter une note de dilettantisme au milieu de l'austérité de certains cours.

Homme de très grande culture et valeur intellectuelle, leader industriel en son temps de l'industrie chimique et de celle des métaux, il fut véritablement une personnalité hors du commun ; mais combien savent qu'il fut aussi l'auteur du déchiffrement du fameux radiotélégramme allemand, déchiffrement qui permit à l'armée Mangin de stopper l'offensive allemande de juin 1918.

Comme a pu l'écrire M. E. LERVILLE ancien président de l'Association des réservistes du chiffre : « Avec sa disparition, ... les chiffreurs ont perdu un grand Maître, la France a perdu un grand homme... ».

G.J. PAINVIN nait à Nantes en janvier 1886 dans une famille de polytechniciens et de mathématiciens. En 1902, il obtient le premier prix de violoncelle au Conservatoire de sa ville natale. En 1905, il se présente à Polytechnique ; il y est reçu dans les trois premiers et en sort second derrière Léon DAUM.

Après ses deux années à l'Ecole des mines, il est nommé sur sa demande professeur de paléontologie, géologie et de chimie à Saint-Etienne, puis à la rentrée de 1912, se voit confier la chaire de la première de ces disciplines, boulevard Saint-Michel, qu'il conservera pendant trente-trois ans.

Ayant suivi comme officier de réserve les cours d'Etat-Major à l'Ecole de guerre, il est en août 1914 mobilisé en qualité d'officier d'ordonnance du général Maunoury. Sa relative liberté lui permet de se passionner pour les mystères du chiffre, d'étudier les messages allemands et de trouver un système de déchiffrement général, rapide et simple.

Son rapport daté du 21 janvier 1915, fait sensation et le colonel directeur du service central du Chiffre demande aussitôt l'affectation de cet inconnu génial. G.J. PAINVIN qui s'était pris d'une grande admiration et même d'une véritable affection pour le général Maunoury refuse de le quitter ; il faut l'intervention successive du général Buat, chef du Cabinet de Millerand, ministre de la Guerre et celle personnelle de ce dernier pour obtenir que notre camarade accepte d'être affecté provisoirement à la section du Chiffre du ministère.

Mais durant son absence, le général Maunoury très grièvement blessé doit abandonner son commandement et G.J. PAINVIN reste définitivement au « Cabinet Noir ».

Ses premiers travaux y furent la reconstitution d'un des codes de la marine allemande, puis de ceux de la marine autrichienne, travaux qui lui valurent, en reconnaissance, la Military Cross et la Croix de chevalier de la Couronne italienne. S'intéressant aussi au trafic diplomatique, en particulier entre Berlin et Madrid, il réussit à décrypter, entre autres, des messages concernant la célèbre espionne Mata-Hari qui permettront de la confondre.

Quels que soient les procédés de chiffrement les plus divers, les plus complexes qui se succédèrent alors du côté ennemi, notre camarade ne perdit jamais le contact et conserva toujours sa supériorité, les résultats de ses recherches étaient immédiatement transmis pour exploitation à la section du chiffre du Grand Quartier général auquel il était directement lié - et c'en fut la première réalisation - par téléautographe Belin.

Mais le début de mars 1918 voit l'apparition soudaine de radiogrammes d'allure tout à fait nouvelle, apparition sans doute annonciatrice d'offensives desquelles Ludendorf escomptait un succès rapide et définitif avant l'arrivée des troupes américaines ; ces messages émanaient en effet de postes situés fort en arrière de la zone des combats et paraissaient constituer un système réservé aux commandements des grandes unités qui s'y trouvaient.

Le 21 mars est lancée sur la Somme la première offensive allemande, le front anglais est disloqué, une brèche est ouverte entre les armées alliées.

C'est seulement le 5 avril, après 4 jours et 4 nuits d'investigation ininterrompue, à partir de 18 messages à lui transmis cinq jours plus tôt que G.J. PAINVIN trouva les deux clefs de déchiffrement ; mais ces clefs sont l'objet de changement journalier.

Le 27 mai, nouvelle offensive sur l'Aisne ; nouvel afflux de radiogrammes. G.J. PAINVIN redouble d'efforts. Le 31 mai, il avait réussi à décrypter les messages du 28 mai et le 1er juin ceux du 31 mai.

A cette date, l'avance allemande menace directement Paris. Cinq axes paraissent possibles pour une nouvelle et définitive offensive. Lequel est le bon, la capacité de résistance française ne permet d'en considérer qu'un seul. Où placer les quelques très rares divisions de réserve disponibles ?

Les radiogrammes captés le 1er juin réservent à G.J. PAINVIN une terrible surprise. Ils sont basés sur des combinaisons de six lettres au lieu de cinq jusqu'alors. Après une journée entière d'efforts, notre camarade peut en envoyer au Grand Quartier général les clés ; le déchiffrement de tous les messages y est immédiatement effectué. Parmi eux, se trouve celui baptisé depuis « radiogramme de la victoire » permettant de localiser avec certitude la zone sur laquelle va être lancée la prochaine attaque allemande. Sur cette zone sont aussitôt dirigées cinq des divisions de réserve disponibles dont le commandement est confié au général Mangin.

Les allemands attaquent le 9 ; après quelques succès, ils sont arrêtés le 11 par la contre attaque de Mangin. Pour la première fois, les troupes françaises reprenaient l'initiative des opérations qu'elles ne perdront plus jusqu'à l'armistice, cinq mois plus tard.

Le 14 juillet, le capitaine PAINVIN fut nommé chevalier de la Légion d'honneur « pour services exceptionnels rendus aux Armées ». Epuisé par l'effort physique de ses jours de travail et de ses nuits de veille, par l'effort cérébral intensif qu'il dépense sans compter, il dut aussitôt après l'armistice partir pour une longue convalescence.

La part prise par G.J. Painvin à la victoire serait restée très longtemps ignorée, les travaux effectués par le Service du Chiffre étant considérés comme couverts par le secret militaire pendant cinquante ans. Ce n'est qu'en fin 1962 qu'elle fut rendue publique par un article paru dans la Revue de l'Armée de terre reproduisant une conférence faite à l'Ecole de Saint-Cyr par le Général inspecteur des Transmissions et grand chef du Chiffre des Armées.

Depuis 1968 l'histoire du « radiogramme de la victoire » et de son décryptement est révélée aux visiteurs du Musée de l'Armée, dans la vitrine du chemin des Dames de la salle consacrée à la première guerre mondiale.

Rétabli, G.J. Painvin, tout en conservant sa chaire à l'Ecole des mines, commence en 1919 une carrière industrielle qui fut une suite ininterrompue de succès.

Il est d'abord chargé de monter successivement et de prendre la direction de tous les comptoirs métallurgiques, ferro-silicium, ferro-chrôme, ferro-molybdène, etc.

Puis en 1926, il est désigné comme l'un des trois premiers administrateurs-délégués de la Société d'électro-chimie, d'électro-métallurgie et des Aciéries électriques d'Ugine, il en reste le seul en 1930. Il est nommé membre puis en 1932 élu président du conseil d'administration de la Chambre syndicale de la grande industrie chimique, de l'union des industries chimiques en 1938, administrateur puis président de la Société de chimie industrielle.

Elu en 1933, membre de la Chambre de commerce de Paris, il est élu vice-président en 1937 puis président en 1944.

En 1940, il a créé la Chambre syndicale de l'électro-chimie et de l'électro-métallurgie qu'il présidera jusqu'en 1945 mais pour échapper aux directives qui avaient institué un régime d'autorité dans l'industrie, il lui substitue un régime démocratique en répartissant la chimie en 54 groupes disposant chacun d'autonomie.

En 1941, il est appelé à siéger au Conseil du Crédit commercial de France dont la présidence direction générale lui est aussitôt confiée.

En 1945, à 59 ans, il éprouve le besoin de prendre du recul et du repos ; il prend sa retraite de professeur et abandonne la plupart de ses fonctions.

Mais ayant accepté des responsabilités importantes au Maroc, il décide en 1948 de s'installer à Casablanca où en 1950 lui est confiée la présidence de l'Omnium nord-africain.

Il s'attache avec son énergie coutumière au développement industriel du pays et du port de Casablanca, en particulier ; il est nommé pour ce faire président délégué de la Société Chérifienne d'exploitation d'ouvrages maritimes, de la Société chérifienne du plâtre, administrateur des Moulins du Maghreb, président-gérant de l'Association en participation Safi-chimie, membre de la Chambre de commerce et d'industrie de Casablanca...

En 1962, à 76 ans, deux années après l'indépendance du Maroc, il décide de revenir à Paris où il est en 1964, élu président d'honneur du Crédit commercial, de la Société d'Ugine, d'Ugine-Kuhlmann en 1966, de PUK en 1972 ; il était également président d'honneur de l'Union des industries chimiques.

Officier de la Légion d'honneur en 1933, commandeur en 1963 au titre du ministère de la Guerre, il est promu à la dignité de grand officier par le premier ministre Pierre Messmer, le 19 décembre 1973 et reçoit cette distinction des mains de Paul Montel, membre de l'Institut, alors âgé de 98 ans, qui fut son professeur de spéciales à Nantes.

Texte établi à partir des notes et propos recueillis par R. ALQUIER (1924), G. SABIN (1929) ainsi que de l'article rédigé par Monsieur LERVILLE.



Georges Félix Painvin (1859-1945, père de Georges Jean), élève de Polytechnique
(C) Collections Ecole polytechnique



Painvin, professeur de paléontologie, caricaturé par un élève des Mines de Paris (Petite Revue des élèves, 1936)
(C) Photo collections ENSMP


Louis Félix PAINVIN, le grand-père de Georges PAINVIN, était un excellent mathématicien. En 1854, il obtient deux doctorats : l'un en mécanique des états vibratoires d'une couche solide, homogène et d'elasticité constante, comprise entre deux ellipsoïdes homofocaux, l'autre en mathématiques sur les équations différentielles du problème des trois corps. Il a enseigné au lycée de Douai, puis il a été nommé en 1872 au lycée Louis le Grand, à Paris, en remplacement de Gaston Darboux. Painvin a publié une cinquantaine d'articles, surtout dans les Nouvelles Annales, à partir de 1852.
Source : Les déterminants de Painvin et de Baehr, par Norbert Verdier et Christian Gérini, Quadrature n. 73, juillet-septembre 2009, pp. 6 à 8. Voir aussi : Au nord, c'étaient les corons, par B. Schott et Norbert Verdier, Tangente 117, juillet-août 2007, pp. 46-47.







Un souvenir du cours de Georges Painvin à l'Ecole des mines de Saint-Etienne, en 1912. Painvin professait un cours de "chimie générale et chimie analytique". En l'absence de polycopié, les élèves devaient prendre des notes et les mettre en forme dans des cahiers calligraphiés. Nous voyons ici un extrait des cahiers de l'élève Marcel Gillot. L'essentiel du cours de chimie était fait par M. Trouillet, ingénieur chimiste et expert de la Ville de Lyon. La partie du cours enseignée par Georges Painvin ne représentait que 42 pages, comparée à environ 400 pages consacrées au cours de M. Trouillet. Painvin était censé faire les cours de géologie et de paléontologie, mais, depuis la création de l'Ecole jusqu'à la 2ème guerre mondiale, la pénurie d'enseignants obligeait les jeunes professeurs du corps des mines à faire des cours sur n'importe quel sujet en fonction des besoins.
Le cours de Painvin portait curieusement sur des métaux rares et d'avenir (mais Painvin le savait-il ?) : argent, étain, or, platine et métaux de la mine de platine ; accessoirement, vanadium, niobium, tantale, tungstène, molybdène, titane, germanium, lithium, strontium, radium, uranium, glucinium, zirconium et terres rares, thalium. Pour chaque élément, principales propriétés physiques et chimiques, mode de séparation, dosage. Un passage donne des indications précises sur les différents types de rayonnement, α, β, γ ; les principales connaissances de l'époque sont évoquées avec un discours pédagogique (voir les deux pages de notes de l'élève Gillot reproduites ci-dessous, à propos du radium). Le cours de Painvin est complété par 4 pages de "notions de chimie organique" : cette matière était probablement imposée par le directeur de l'Ecole, Georges Friedel, dont le père n'était autre que Charles Friedel, l'un des découvreurs de la classique réaction de Friedel-Crafts !