Paul BENOIST (mort en 1922)

Ancien élève de l'Ecole des mines de Paris (promotion 1871). Ingénieur civil des mines.


Publié dans le Bulletin de l'association des anciens élèves de l'Ecole des Mines (1922)

Le 5 août 1922, la mort ravissait à l'affection de sa famille et de tous ses amis M. Paul Benoist, qui succombait à une pénible maladie dont il avait ressenti les premières atteintes plusieurs années auparavant.

Entré à l'Ecole [des Mines de Paris] en 1871, Paul Benoist débuta aux Houillères de Portes, où il ne passa que peu de temps ; il les quittait pour entrer en 1878 à la Société Franco-Belge des Mines de Somorrostro, où il devait poursuivre toute sa carrière d'ingénieur, appelé rapidement, par la confiance qu'on avait en lui, au poste d'ingénieur en chef qu'il occupa pendant de longues années.

Il arrivait à Bilbao pour mettre en exploitation un gisement dont la valeur n'était alors que soupçonnée et qui n'était connu que par les petites exploitations locales faites par des propriétaires qui se contentaient de ramasser les minerais qu'ils trouvaient dans leur propriété. Si la mise en exploitation rationnelle, par l'ouverture de carrières à flanc de coteau, de cet important gisement, ne devait pas présenter de grosses difficultés techniques, les plus grands ennuis devaient résulter du morcellement extrême des concessions accordées par le Gouvernement espagnol, qui enchevêtrait les concessions des divers propriétaires, et qui rendait difficiles les moyens de transport à construire pour amener économiquement le minerai des mines situées dans la montagne jusqu'au port d'embarquement ; plans inclinés, chaînes flottantes, câbles aériens, chemins de fer miniers, devaient être utilisés, souvent concurremment, pour parvenir au résultat cherché. Paul Benoist se donna tout entier à ces études et fit construire tout le réseau des moyens de transport qui, pendant plus de vingt-cinq ans, suffit à assurer l'exploitation du gisement appartenant à sa Société.

Mais, si les minerais oxydés devaient, pendant des années, constituer la seule richesse exploitée de Bilbao, le moment vint où on rencontra en profondeur le minerai carbonaté. Paul Benoist fut l'un des premiers à reconnaître la valeur de ce nouveau minerai ; il se refusa toujours à considérer comme inutilisables les morceaux de carbonate qui se rencontraient dans l'exploitation des carrières d'oxydé : le premier, il fit construire des fours de grillage et montra toute la valeur du nouveau produit.

Paul Benoist acquérait vite à Bilbao une notoriété incontestée et bien nombreux furent ceux qui vinrent le consulter et lui demander conseil. Comme tous les mineurs de Bilbao, encouragés par les résultats du gisement incomparable qu'ils exploitaient, cherchaient à prospecter dans le reste de l'Espagne, combien de fois vint-on le trouver pour lui demander d'aller lui-même visiter un gisement et de donner son avis sur les résultats obtenus dans une prospection !

Les premières études qu'il avait faites dans les houillères françaises le désignaient aussi pour étudier, à la demande d'amis, la province des Asturies qui, pour l'Espagne houillère, a une si grande importance : une Société, dont il avait surveillé la création, se l'attacha comme ingénieur-conseil, et durant toute sa vie il en suivit et conseilla le développement avec une autorité incontestée et un zèle sans borne.

Travailleur acharné et infatigable autant que consciencieux, il prenait tout son plaisir dans le travail et les études minières qui lui étaient confiées, — toujours content lorsqu'on venait lui demander d'étudier de nouveaux dossiers ou de reprendre des études momentanément interrompues, — bon, affable, accueillant envers tous, il était aimé de tous et en particulier de ses ouvriers.

Mais vint un jour où il dut reconnaître qu'il ne pouvait continuer la vie active qu'il n'avait cessé de mener et qu'il était obligé de ménager sa santé. La Société Franco-Belge ne voulut pas se séparer de celui qui l'avait si bien servi et qui ne demandait qu'à lui continuer le fruit de ses études et de son expérience ; elle le nomma ingénieur-conseil. Mais il ne considéra pas ce poste comme une retraite véritable et, s'il ne pouvait plus mener la vie active, il continua à se donner entièrement à toutes les études qui lui étaient soumises et, en particulier, à l'examen de toutes les questions géologiques touchant la région de Bilbao, — questions qui l'avaient toujours intéressé et dont il regrettait de n'avoir pas eu assez le temps de s'occuper.

Mais les soins affectueux qui l'entouraient, la science de son fils qui, malheureusement, pouvait suivre chaque jour le progrès de la maladie, ne réussirent qu'à reculer le triste moment de la séparation. Sa santé très ébranlée le forçait, au commencement de l'année, à renoncer à un de ces voyages d'Espagne qu'il faisait toujours avec tant de plaisir et il était ravi aux siens après une douloureuse agonie.

Le nom de Paul Benoist restera inséparable de celui de la Société Franco-Belge, à laquelle il fut attaché depuis sa création et dont il suivit le développement durant toute sa vie. Sa mort est une perte irréparable ; tous ceux qui furent ses chefs ou ses collaborateurs garderont un pieux souvenir à sa mémoire.

Puisse cette assurance être une consolation pour les siens, et en particulier pour sa veuve et ses enfants. Qu'ils trouvent dans ces quelques lignes le témoignage de notre affection pour le cher disparu et un adoucissement dans le malheur qui les a frappés.

A. GUERREAU.

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