Pierre Claude DAUNESSE (1924-1969)

Né le 31 mai 1924 à La Teste de Buch (Gironde). Décédé le vendredi 31 octobre 1969 : il est tombé d'un train rapide alors qu'il se rendait de Paris à sa ville natale La Teste (Gironde) ; la cause de ce décès (accident, suicide ou meurtre) n'a jamais été élucidée, bien que le suicide paraisse probable à ses meilleurs amis, car il était dépressif.

Ancien élève de l'Ecole polytechnique (promotion 1944), et de l'Ecole des Mines de Paris. Corps des mines.
Un recueil de poèmes de Claude Daunesse a été publié en 1972 à l'initiative de ses amis, qui l'ont fait imprimer par GEDIM. Daunesse a utilisé le nom d'emprunt de Lou TESTUT pour ces poèmes, probablement en raison de ses origines à La Teste.


Biographie de Claude Daunesse
par Claude Sore


Nommé directeur des Mines au ministère de l'Industrie après la décès de Claude Daunesse, Jean-Claude Sore était depuis le milieu de 1965 l'adjoint direct de Claude Daunesse à la direction des mines et un de ses meilleurs amis. Curieusement, Daunesse et Sore étaient nés dans la même ville de Gironde, La Teste-de-Buch.

Publié dans Annales des Mines, décembre 1969.

Claude DAUNESSE est mort le 31 octobre dernier. La nouvelle frappait de stupeur pendant le week-end de la Toussaint ses amis incrédules. Encore aujourd'hui l'émotion ressentie nous empêche de mesurer la personnalité de celui que nous avons perdu, et d'imaginer l'empreinte qu'elle laisse.

Il suffit pourtant de quelques lignes pour décrire sa carrière, toute simple. Il était né le 31 mai 1924 à La Teste de Buch (Gironde), d'une famille de cheminots. Son goût de l'étude le conduisit à l'Ecole Polytechnique, il en sortit dans le corps des mines. Puis il passa huit ans à l'arrondissement minéralogique d'Alès (quatre en Alès et quatre à Montpellier). Au cours de ce séjour, il refusa toutes les propositions qu'on lui fit de quitter l'administration. Nommé ingénieur en chef en 1957, il assuma pendant onze mois les fonctions de chef de l'arrondissement de Clermont-Ferrand, puis pendant près de six ans, celles de chef de l'arrondissement de Douai. Il a été nommé Directeur des Mines le premier juin 1964, fonction qu'il a exercée jusqu'à sa disparition.

Mais cette simplicité apparente dissimule une personnalité exceptionnelle. Car celle-ci qui alliait une intelligence hors du commun et une sensibilité extrême, ne se laissait pas facilement saisir. Elle se trahissait parfois par des intuitions pénétrantes, parfois elle se cachait sous un abord bourru. Pourtant, elle modelait le milieu dans lequel il vivait, forçait à dépasser les apparences pour toucher à l'essentiel, à l'absolu. Elle rayonnait la sympathie. Elle transformait ses amis et touchait jusqu'à ses contradicteurs.

L'industrie minière a été le terrain de choix où s'est pleinement exprimée cette lucidité ouverte à tout ce qui est humain. Tout au long de sa vie, Claude DAUNESSE paraît avoir ressenti l'écho du choc reçu lors de ses premiers contacts avec la mine, en Alès. En effet, que ce soit en Alès, à Clermont-Ferrand, à Douai, à Paris même, partout il se sentait proche des mineurs. Et c'est sans doute là l'origine d'un grand déchirement, car, Directeur des Mines, sa tâche principale fut d'aider les Houillères à prendre conscience des limites de leur avenir, de démontrer la nécessité d'opérer leur conversion. Mais pour accomplir ce devoir, il ne se contenta pas de raisonnements formels; il voulut convaincre tous les hommes de bonne volonté, et il voulut surtout que l'espoir ne les abandonnât point. De toutes ses forces, il s'attacha à atténuer les conséquences dramatiques d'une telle évolution et à découvrir l'avenir au delà des mutations économiques. Cette action, il la conduisit dans un style bien à lui, comme un homme personnellement engagé. Aussi, certains jours nous alarmions-nous de sentir la densité de son inquiétude, car rien n'était plus éloigné de son tempérament que l'indifférence à la souffrance.

Mais là ne s'est pas bornée son action, car une autre passion l'habitait, celle de la formation des hommes. Il la concevait comme une recherche constante du meilleur d'eux-mêmes. Il savait d'ailleurs faire découvrir d'un mot, d'un geste, d'un silence, les solutions des problèmes les plus difficiles. Son dynamisme était communicatif. Rien ne le rebutait.

A Clermont-Ferrand, sous son impulsion, un service jusqu'alors sommeillant connaissait une grande activité. C'était l'époque de la fièvre de l'uranium et il put accélérer l'institution des permis nombreux qui étaient alors demandés. A Douai, pour mieux comprendre le mécanisme des affaissements miniers et chercher le moyen d'éviter leurs conséquences dommageables, il étudia la théorie mathématique des distributions. Mais c'est comme Directeur des Mines que ses réalisations paraissent les plus remarquables : il a constitué une équipe et, avec elle, il a entrepris d'atteindre les objectifs les plus divers.

C'est ainsi qu'il a réorganisé les services géologiques, réalisant la fusion de la Carte géologique de France et du Bureau de Recherches Géologiques et Minières. Il a donné une impulsion décisive au développement de la recherche dans les Écoles des Mines. Il s'est occupé activement de la restructuration des sociétés françaises notamment dans le domaine des métaux non ferreux, il a apporté une contribution importante à l'étude de la mise en exploitation des gisements de nickel de Nouvelle-Calédonie. On comprend que cette volonté de novation ait rencontré des difficultés nombreuses, mais il savait y faire face, quoi qu'il en coûtât à sa profonde sensibilité.

Il n'a jamais cessé d'être, malgré ses nombreux soucis, le patron écouté de l'administration des mines. Il aimait recevoir des ingénieurs de tous horizons, les conseiller, les aider. Beaucoup lui doivent, peut-être sans le savoir, d'avoir découvert l'orientation qui leur convenait. Ce faisant, il s'intéressait à la formation des ingénieurs, préparait la réorganisation du service des mines, adaptait les tâches et les structures de sa direction à l'évolution de la société française.

Mais tout cela ne saurait donner qu'une idée très imprécise de l'essentiel. Et c'est sans doute seulement dans le recueil de poèmes qu'il a confié à quelques amis que l'on pourra essayer de retrouver l'image de cette âme, car, dit-il :

La poésie est là pour dire en quelques mots
ce qu'on dit plus souvent en vagues périphrases.

D'autres peut-être un jour parviendront à dégager le sens profond du message qu'il nous laisse. Quant à moi je me sens aussi incapable d'esquisser le portrait du véritable Claude DAUNESSE, qu'impuissant à rendre la très grande peine que nous a causé sa perte. Du moins, je voudrais terminer cette évocation par un texte écrit de sa main. Celui-ci illustre sa conception du travail en équipe, idée qui lui était chère. Il en parlait souvent et il aimait la caractériser par des images tirées du jeu de football. C'est ce qu'il a fait dans les lignes suivantes :

On ne joue pas avant comme on jouerait arrière
l'essentiel est le jeu
tel qu'il faut le jouer
et il faut le jouer en fonction de l'équipe
qui doit à tout instant
se battre pour gagner
dans les règles du jeu
      et jamais en dehors 
car les bornes passées
      il n'est plus de limite.

Puissent ses amis continuer son oeuvre en restant unis dans leur fidélité à sa mémoire.

Claude SORE


Dans sa biographie de Claude Daunesse, parue en février 1970 dans La Jaune et la Rouge, Claude Sore ajoutait :

Les positions que lui a dictées son expérience sur le problème des Corps ne sont pas près d'être oubliées. Elles méritent considération. ... Aussi, son oeuvre doit-elle être poursuivie.


Paru dans Annales des Mines, juin 1964 :

Après avoir exercé pendant plus de sept années les lourdes charges de Directeur des Mines au Ministère de l'Industrie, M. Pierre Alby vient d'être appelé à exercer les fonctions de Directeur général adjoint de Gaz de France.

Pour lui succéder, le Gouvernement vient de faire appel à M. Claude Daunesse.

Né le 31 mai 1924, M. Daunesse est entré à l'Ecole polytechnique en 1944. Sorti dans le corps des mines, il fut affecté à sa sortie de l'Ecole des Mines, en 1949, à l'arrondissement minéralogique de Montpellier, où il exerça en particulier pendant quelques années les fonctions de Sous-Directeur de l'Ecole des Mines d'Alès.

Nommé ingénieur en chef le 1er janvier 1957, il fut placé à la tête de l'arrondissement minéralogique de Clermont-Ferrand le 1er octobre de la même année.

Enfin, depuis le 15 septembre 1958, il était chargé de l'arrondissement minéralogique de Douai et simultanément de la direction de l'Ecole des Mines de Douai.

Les Annales des Mines sont heureuses de ... [rappeler] l'intérêt qu'il a toujours porté à notre revue ... [et] qu'il a récemment et brillamment collaboré à notre revue en lui donnant une magistrale étude sur les affaissements miniers (publiée en octobre 1963).