Henri GERMAIN (1841-1898)


Germain en 1865, élève de l'Ecole des Mines de Paris
(C) Photo collections ENSMP

Ecole des mines de Paris (promotion 1862). Ingénieur civil des mines.


Bulletin de l'Association amicale des anciens élèves de l'Ecole des Mines, Mars 1898

Henri Germain est né à Paris en 1841 ; après de bonnes études à Louis-le-Grand et à Sainte-Barbe, il entra en 1862 à l'École des Mines dont il sortit en 1865.

Après un séjour à Freiberg en Saxe, il fut nommé administrateur judiciaire de la Société des Forges de la Nouvelle, en liquidation. Les Forges étaient éteintes et ne devaient pas être remises à feu, mais la Société exploitait d'importantes mines de fer dans les Pyrénées-Orientales. Germain fut ainsi amené à résider à Prades, près de Perpignan, non loin des mines dont il surveillait l'exploitation quand le cours naturellement lent des affaires litigieuses qu'il avait à suivre et à diriger ne le retenait pas a Paris.

Il s'y trouvait précisément peu avant le siège et il n'hésita pas à y rester pour faire son devoir ; il était fiancé depuis peu à Mademoiselle Julia Robin, de Cognac. Germain se mit à la disposition du gouvernement de la Défense nationale et Dorian, alors ministre des Travaux publics, qui le connaissait, l'employa au service de la réception des projectiles et à la construction des baraquements aux fortifications ; il eut l'honneur, à cette occasion, de faire visiter à M. Thiers le fort d'Aubervilliers.

Pendant ces temps difficiles comme dans les diverses circonstances de sa carrière, Germain fit simplement son devoir et dès que les communications avec la province furent rétablies, il rejoignit sa fiancée, se maria à Cognac le 15 avril 1871 et reprit son poste de Prades qu'il occupa encore plusieurs années.

M. Jules Robin, son beau-père, qui avait eu l'occasion d'apprécier l'aptitude de Germain aux affaires, lui offrit alors de le prendre dans sa maison: il y entra en 1877 et en devint par la suite l'un des chefs les plus actifs et les plus autorisés.

Homme droit, modeste, affable, estimé aussi bien du monde des affaires que de tous ceux qui avaient appris à le connaître à un titre quelconque, Germain fut souvent sollicité de consacrer à la chose publique, sous une forme ou sous une autre, l'intelligence et l'activité qui avaient si bien servi ses intérêts particuliers : quoique ses goûts l'éloignassent volontiers des agitations de la vie politique, néanmoins, aux mauvais jours du boulangisme, quand il s'agit de combattre le bon combat, il ne crut pas devoir se soustraire à l'appel de ses concitoyens et il n'eut pas à le regretter.

Nommé en 1888 Président du Comité de Viticulture de l'arrondissement de Cognac, il imprima une vive impulsion à ses travaux et contribua à la reconstitution méthodique des vignobles de la région. Juge, puis Président du Tribunal de Commerce de Cognac en 1895, il remplit brillament ces fonctions et rendit des jugements dans des procès importants, qui ont été justement remarqués ; aussi venait-il d'être confirmé dans cette charge peu de temps avant sa mort.

Henri Germain s'est doucement éteint le 1er janvier 1898, à cinquante-sept ans, après une maladie de quelques semaines, devant laquelle devaient rester malheureusement impuissants et les secours de la science et les soins attentifs et multipliés d'une compagne dévouée.

Jusqu'à l'automne dernier Germain ne s'était pas ressenti des atteintes de l'âge et sa santé semblait aussi robuste que par le Passé ; au mois d'octobre il éprouva des douleurs d'estomac qui parurent s'apaiser un moment, mais le mal perfide, qui le menaçait, continuait son oeuvre pour prendre bientôt une allure rapide, puis précipitée que rien ne pouvait plus arrêter.

Cette brusque catastrophe a semé la désolation dans un milieu jusqu'alors particulièrement heureux et uni, arrachant à une noble femme le meilleur ami, aux enfants et à leur famille le chef chéri et respecté, à une vénérable mère enfin le fils qui était tout son orgueil.

Germain était essentiellement bon : il faisait beaucoup de bien, discrètement, sans éclat ; non seulement il ouvrait volontiers et largement sa bourse aux malheureux, mais encore il savait donner ; tout récemment, il avait créé un dispensaire qu'il visitait journellement.

Germain laisse un nom aimé et respecté, et si les regrets unanimes, profonds et sincères peuvent être un adoucissement à la douleur des siens, sa bonté qui lui survit recueille la meilleure des récompenses.

Ch. MEUNIER-DOLLFUS.