Edmond Marie LORIEUX (1832-1909)

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Fils de Théodore Marie Clair LORIEUX (1800-1866, X 1818 corps des mines). Père de Edmond Théodore LORIEUX (1867-1932 ; X 1886) ; beau-père de Antoine Henri BECQUEREL (1852-1908 ; X 1872, prix Nobel de physique 1903, mort dans la maison familiale des LORIEUX au Croisic) et de Henri Jules Louis DESLANDRES (1861-1923 ; X 1881).

Ancien élève de l'Ecole polytechnique (promotion 1851), et de l'Ecole des mines de Paris. Corps des mines.


Publié dans Annales des Mines, 10e série T. 15, 1909.

Edmond-Marie LORIEUX est né à Nantes (Loire-Inférieure) le 22 avril 1832; mort à Paris le 16 janvier 1909.

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DISCOURS PRONONCÉ AUX FUNÉRAILLES DE M. EDMOND LORIEUX
INSPECTEUR GÉNERAL DES MINES
le 18 janvier 1909
Par M. AGUILLON, Inspecteur général des Mines.

MESSIEURS,

C'est toute une tradition qui, pour le Corps des Mines, disparaît avec Edmond Lorieux, auquel je viens dire adieu au nom de ses anciens collègues, restés tous ses amis. Son père, pour lequel il avait gardé un véritable culte et qui datait des dernières heures du XVIIIe siècle - et nous sommes au XXe - avait déjà été l'un des nôtres. Par la filiation, par les souvenirs qu'il aimait à recueillir et à conserver, Edmond Lorieux nous faisait remonter en quelque sorte à nos premières origines, à ces époques, pour nous presque héroïques, où l'exploitation des mines et leur surveillance administrative étaient si différentes de ce qu'elles sont devenues.

Sa carrière fut relativement simple. Il avait passé son temps d'ingénieur ordinaire dans cette région de l'Ouest où son père l'avait précédé et où les liens de famille les plus étroits et les plus doux devaient le fixer davantage. Certes le service dont il était alors chargé ne pouvait lui permettre de donner sa mesure ; il sut pourtant y montrer ses qualités. Aussi nul ne s'étonna lorsque, à peine nommé ingénieur en chef, il fut désigné en 1879 pour le poste si important de Secrétaire du Conseil général des Mines. Il avait tout ce qu'il fallait pour y réussir : une haute courtoisie dont la froideur apparente était tempérée par une extrême bienveillance; de fortes convictions qu'il savait soutenir doucement, mais fermement, avec cette indépendance que lui donnaient sa situation personnelle et surtout son caractère ; un souci du devoir poussé à ce point que lui, l'homme calme par excellence, devenait nerveux par la seule appréhension de la possibilité d'un retard ; un clair bon sens au service duquel il pouvait mettre une plume souple, facile et élégante. Lorsque, au bout de dix ans d'un travail consciencieusement accompli, il quitta le Secrétariat du Conseil, ce fut pour prendre et garder, comme inspecteur général de 2°, puis de 1ère classe, le service des houillères du Nord et du Pas-de-Calais. Il s'efforça d'y faire quelque bien en cherchant, par tempérament, plus à convaincre qu'à réprimer.

Aussi bien il n'eut pas à connaître des heures difficiles comme celles qu'ont dû traverser ses successeurs. Tout lui avait souri dans une existence qu'il avait su conduire avec une incomparable dignité. Lorsqu'il prit sa retraite, voici quelque sept ans, en pleine vigueur de corps et d esprit, il n'avait plus qu'à jouir de la vie qu'il s'était ainsi faite. Il se plaisait à voir son fils et ses gendres - je puis dire ses autres fils - continuer, dans nos corps, les belles traditions dont son frère et lui avaient hérité de leur père. Il jouissait particulièrement de l'éclat que l'un de ses gendres avait répandu sur la science [Henri Becquerel]. Comment aurait-il pu croire, lui jusqu'alors si heureux, qu'une grande douleur dût lui venir de là. Il succombe quelques mois après Becquerel comme s'il n'avait pu supporter le coup de sa mort. Il s'est éteint en sage qui part avec sérénité lorsqu'il sent qu'il a bien rempli sa tâche, laissant seulement aux siens et aux amis l'amertume de la séparation. Il fut et par sa vie et dans la mort le type du parfait " honnête homme " d'autrefois, et à ce titre nous conserverons pieusement sa mémoire.