Fils de Anne César Loup Arthur de MIRIBEL et de Marie Thérèse Joséphine Adrienne Alexandrine de VALORY.
Né le 14/9/1831 à Montbonnot (Isère).
Marié à Henriette Louise de GROUCHY, fille de Ernest Henri de GROUCHY (1806-1879 ; X 1825 corps des mines puis corps préfectoral) et de Caroline de HABER.
Frère de 2 polytechniciens, père de 2 polytechniciens.
Ancien élève de l'Ecole polytechnique (promotion 1851). Corps des officiers d'artillerie.
Général de division en 1880. Il a des commandements opérationnels en Crimée, en Italie, au Mexique. En 1870-71, il participe à la défense de Paris, puis à la répression de la Commune. Il est nommé chef d'Etat-major de l'Armée en 1878, puis à nouveau en 1881 par Gambetta. Il est nommé à Lyon en 1880. Il est nommé commandant du 6ème corps à Chalons en 1888, puis chef d'Etat-major de l'armée en 1891 ; il organise alors avec Freycinet, ministre de la Guerre, la logistique des forces armées. Il décède dans ce poste.
Grand officier de la Légion d'honneur (1889). Président de la SAS (Société d'anciens élèves de Polytechnique) en 1890.
Dans ses Souvenirs, Freycinet explique qu'il souhaitait dès 1888 nommer Miribel Chef d'Etat-major, mais qu'il était "une personnalité que tout le monde déclarait indispensable, mais à laquelle il était défendu de recourir, parce qu'elle s'était, disait-on, compromise dans les machinations contre le régime établi" (vol. 2, chap. 12). D'où l'idée de le nommer à Chalons. Freycinet, ministre de la Guerre, fait organiser ensuite "la triomphante revue de Saint-Mihiel, en septembre 1889" qui "emporta les dernières préventions".
Marie-Joseph Henri de MIRIBEL (1867-1946 ; X 1886), fils du général Marie François Joseph de MIRIBEL), élève de Polytechnique. Il fit sa carrière dans le corps des officiers d'artillerie, où il arriva au grade de colonel. (C) Photo Collections Ecole polytechnique |
Marie Ludovic Fernand de MIRIBEL (1879-1967 ; X 1898), fils du général Marie François Joseph de MIRIBEL), élève de Polytechnique. Il fit sa carrière dans le corps des officiers d'artillerie, puis dans l'aviation, où il termine comme général de brigade et commandeur de la L.H. (C) Photo Collections Ecole polytechnique |
Publié dans le Livre du Centenaire de l'Ecole polytechnique, 1794-1894 :
Marie-François-Joseph de Miribel est le fils de Anne-César-Loup-Arthur de Miribel et de Marie-Thérèse-Joséphine-Adrienne-Alexandrine de Valory, né le 14 septembre 1831 à Montbonnot (Isère); marié, le 7 avril 1867, à mademoiselle de Grouchy; décédé au château de Chastelard (Drôme), le 12 septembre 1893.
Simplicité, génie, vaillance, ces trois mots résument la carrière et la vie du Chef d'Etat-Major général de l'armée, dont la France a si cruellement ressenti la perte.
C'est au château de Montbonnot, antique demeure de sa famille, dans la vallée du Grésivaudan et à quelques beurcs seulement de la capitale du Dauphiné, que naissait en 1831 le général de Miribel. Il était donc du pays de Bayard et de Lesdiguières et il s'en honorait. Les traditions de courage et de vertu qui sont le patrimoine sacré de cette terre de soldats, étaient une préface naturelle à la vie toute d'honneur, de patriotisme et de dévouement de celui qui fut la gloire de nos champs de bataille et l'organisateur de nos forces militaires.
Admis à l'Ecole Polytechnique en 1851, le sous-lieutenant de Miribel entrait, le 14 avril 1855, au 17e régiment d'artillerie à cheval. Mais déjà le canon de l'Alma et d'Inkermann avait fait battre bien des poitrines, et nul ne pouvait ressentir plus vivement que le nouveau sous-lieutenant l'entraînement du danger et de la gloire, le désir de donner à sa patrie toutes ses énergies, tout son sang. Il s'embarquait en effet le 9 juin de celle même année et courait faire ses premières armes dans le corps de l'Artillerie pour lequel, durant toute sa vie, il eut un véritable amour.
Dans cette lutte vraiment antique, où les armées de deux grands pays ont étonné le monde par leur bravoure et leur loyauté, où chacun des deux adversaires a su emporter l'estime et l'admiration de l'autre, où tant de sang répandu n'a fait que cimenter pour l'avenir une amitié à laquelle le jeune officier, devenu Chef d'État-Major général de l'Armée, devait contribuer pour une si grande part, les héros ne manquaient pas. Le sous-lieutenant de Miribel sut prendre, malgré sa jeunesse, une des premières places parmi ces vaillants.
Il servait, aux attaques de gauche, dans une batterie de siège violemment canonnée par les Russes. Ses hommes s'impressionnaient; les pertes étaient sensibles. Cet instant terrible que seuls reconnaissent les vrais guerriers, instant où il faut qu'à tout prix le chef relève les cœurs pour éviter une catastrophe, était arrivé. Le jeune officier a fait son sacrifice : sans hésitation, avec ce calme et cette bonne humeur qui furent toujours la caractéristique de ses qualités militaires et privées, il monte seul sur l'épaulement, les balles pleuvent autour de lui et les hourras de ses soldats lui montrent qu'il a su, d'un coup, conquérir leur admiration.
La place du brillant soldat, au retour de la guerre d'Orient, était marquée dans un corps d'élite : le lieutenant de Miribel entrait, en 1856, dans le régiment d'artillerie à cheval de la garde.
Mais la période des campagnes était ouverte, et allait permettre au jeune officier de déployer les trésors d'ardeur et d'énergie, qui sont l'apanage des âmes comme la sienne.
La croix récompensait, le 17 juin 1859, la belle conduite du lieutenant de Miribel à Magenta; il avait à peine 28 ans. Quelques jours après, sur le champ de bataille de Solférino, pointant lui-même une de ses pièces, il avait les deux mains traversées par une balle. Le 31 décembre suivant, il était promu capitaine.
Trois années se sont écoulées, et la campagne du Mexique entraînait sur cette terre lointaine toute une élite de jeunes officiers, dont les noms allaient devenir les premiers de notre armée. Le capitaine de Miribel allait briller au premier rang et accomplir un fait d'armes, que les galeries de Versailles conservent à la postérité.
C'était à Puebla, citadelle sur laquelle les Mexicains avaient accumulé leurs meilleures défenses. L'Artillerie française avait accompli son œuvre et on se décidait à l'assaut. Il fallait s'assurer tout d'abord que la brèche était suffisante. Qui charger d'une mission aussi périlleuse et aussi délicate? Le capitaine de Miribel venait en revendiquer l'honneur et, le 28 mars 1863, à la faveur de la nuit, il se glissait seul à travers les hautes herbes, rampant pour ne pas être aperçu, et parvenait ainsi jusqu'aux murailles de la place. Mais l'ennemi veillait, et une grèle de balles venait s'abattre autour de lui : « A ce moment, racontait depuis le général de Miribel, j'ai revu toute ma vie comme dans un éclair, car je pensais bien que c'en était fait de moi ». Cette existence déjà glorieuse, le jeune capitaine la sacrifiait à sa patrie et, toujours calme et souriant, il se sentait prêt à comparaître devant le Dieu des armées. La mort ne voulut pas de lui; il rapporta dans nos cantonnements les précieux résultats de sa reconnaissance, et ne demanda, pour récompense, que le dangereux honneur de commander, à l'assaut, le détachement des encloueurs.
Le 29 mars 1863, nos troupes s'ébranlent pour l'attaque. En tête de la première colonne marche le capitaine de Miribel avec sa poignée de braves. Arrivé auprès des remparts, il est frappé d'une balle à la tête, mais la blessure est légère et ne ralentit pas son mouvement; il se jette au pas de course sur les canons des Mexicains. Cette brillante conduite lui valut une citation à l'ordre de l'armée et la croix d'Officier de la Légion d'honneur.
L'attention des chefs de l'armée avait été attirée sur ce jeune officier, dont les qualités d'initiative et de vigueur se prodiguaient sur tous les champs de bataille. Le maréchal Randon, Ministre de la Guerre, se l'attachait le 15 mai 1865, en qualité d'aide de camp.
Le maréchal Randon ne voulait autour de lui que des officiers d'élite et il ne manquait jamais de les mettre, dès l'abord, à l'épreuve. C'est ainsi qu'à son arrivée le capitaine de Miribel fut chargé d'un travail sur la mobilisation de nos forces, dans l'idée d'un conflit que la question du Luxembourg pouvait à tout instant faire naître. Pour un capitaine de 34 ans, qui, depuis le début de sa carrière, avait été constamment en campagne, l'œuvre pouvait paraître lourde. Mais déjà l'esprit était mûr, et les grandes qualités d'organisateur, qu'il devait faire briller plus tard dans les hautes fonctions de l'armée, allaient jeter un premier éclat. Le projet fut approuvé, et, le 9 janvier 1867, le grade de chef d'escadron assurait à de Miribel une carrière que, pour le bien de l'armée, il fallait pousser le plus rapidement possible. Il venait de donner la mesure de ce qu'il devait être, le jour où lui serait confiée la réorganisation de nos forces militaires.
Le 27 octobre 1868, le commandant de Miribel était nommé attaché militaire à l'Ambassade de Saint-Pétersbourg. Grâce à ses hautes facultés, grâce au charme de son esprit et à la distinction de ses manières, soutenu par l'admirable compagne qui fut son plus ferme appui dans les bons comme dans les mauvais jours, il sut conquérir auprès des princes et de la haute société russe cette situation toute personnelle, si utile quand il faut faire prévaloir l'influence de son pays.
L'année terrible approchait. Le commandant de Miribel suivait d'un oeil inquiet et attentif la marche des événements, ne laissant rien échapper, renseignant son gouvernement et se servant de son influence considérable dans la capitale russe, pour nous procurer des amis, ou du moins des neutres bienveillants. La guerre éclatait enfin, et, si rien ne put être évité à ce moment, la Russie dut se souvenir, quelques années plus tard, des protestations fermes et respectueuses qu'avait fait entendre le représentant militaire de la France.
Mais les événements marchaient; de Miribel avait rempli toute sa mission. Depuis de longs jours déjà son impatience était extrême : il ne pensait qu'à porter le secours de son bras à la France envahie.
Le 29 août 1870, il obtenait le commandement de l'artillerie de la 3e division du 14e corps, à Paris. Il se couvrait de gloire au combat de la Malmaison. Se porter crânement en avant jusqu'au milieu des tirailleurs, afin de mieux découvrir la position ennemie, briser l'élan des colonnes prussiennes, lutter jusqu'à la dernière minute à coups de mitraille, quand il faut céder devant le nombre, telle est la belle conduite de ceux que le général Ducrot appela « ces vaillants ». Leur chef fut cité à l'ordre de l'armée « pour son audace poussée jusqu'à la témérité ».
Le 3 novembre 1870, de Miribel était nommé lieutenant-colonel, et le général Ducrot, qui savait choisir ses auxiliaires, attacha à son Etat-major l'officier intrépide qu'il avait remarqué sur le champ de bataille. Dans les conseils où, depuis ce moment, il est constamment appelé, ses vues sont simples et précises comme la lumière. Faut-il agir? Ses décisions sont d'une sûreté qui n'abandonne rien aux fausses manœuvres, et d'une promptitude qui défie tout retard.
Le 23 novembre 1870, il reçoit le grade de colonel et le commandement d'une brigade de mobiles, dont il fait, en quelques jours, une troupe solide et exemplaire, qui sut acquérir, dans la main de son chef à Champigny, puis au Bourgel et enfin à Buzenval, la plus glorieuse renommée. Rien n'égalait l'admiration de ces soldats improvisés pour leur jeune et déjà illustre chef. Sa vaillance les frappait d'autant plus qu'elle était calme et simple comme toutes ses actions; ses hommes étaient ses enfants, et son exemple, comme sa bonté, avait su les électriser.
Aucun officier ne fut plus utile à la défense de Paris que le colonel de Miribel; la France fut vaincue, mais il apparut, au milieu de cette défaite, comme l'une des meilleures espérances de la Patrie.
Ce sentiment de la Patrie, nul ne le posséda à un plus haut degré que le général de Miribel : c'était pour lui une passion, et, depuis le jour où il vit la France abattue, il ne pensa qu'à consacrer ses forces, ses talents, tout son être, au relèvement de son pays.
Le 29 février 1872, de Miribel prenait le commandement du 8e régiment d'artillerie, et, le 28 avril 1874, il amenait son régiment à Chalons. C'est dans ce 6e corps qu'il étudia la frontière de l'Est, et il n'y eut pas une montagne, pas une colline, pas un cours d'eau qu'il ne connut bientôt aussi complètement que les Alpes, auprès desquelles il était né. Il était dès lors préparé aux plus hautes fonctions militaires; il avait le coup d'oeil du chef. Les grandes lignes d'une œuvre lui apparaissaient soudain comme par intuition, et, en même temps, il découvrait, il devinait avec une rapidité étonnante tous les plus petits détails.
Nommé général par décret du 3 mai 1875, de Miribel reçut le commandement de la 31e brigade d'infanterie, au camp d'Avor et à Bourges. Il n'était pas d'usage alors de prendre un officier général pour lui donner un commandement dans une arme autre que la sienne; mais le général Ducrot savait bien en quelles mains il remettait cette brigade, et là, comme plus tard dans ses voyages d'état-major et dans ses inspections, le jeune général provoquait l'admiration et l'enthousiasme de ses subordonnés.
En novembre 1877, de Miribel était nommé chef d'État-major du Ministre de la Guerre. Il entreprenait alors ces immenses travaux de la mobilisation et de la préparation à la guerre qui lui ont mérité la reconnaissance du pays. Depuis ce moment, l'Etat-major général a tenu toujours à suivre les directives qui avaient été tracées par le créateur de l'œuvre.
Il était, en 1879, relevé de ses fonctions et nommé au commandement de l'artillerie du 5e corps. Promu le 24 juillet 1880 général de division, il prenait, le 20 octobre suivant, le commandement de la 28e division d'infanterie. En 1881, le nouveau Président du Conseil, comprenant la supériorité de Miribel, le plaçait de nouveau et malgré tous les obstacles à la tête de l'État-major général. Le grand Ministère fut un ministère éphémère, et après doux mois de fonctions le chef d'État-major général rentrait au Comité de l'Artillerie.
Mais l'opinion publique de l'Armée s'était affirmée; elle avait reconnu son chef, elle ne pouvait plus s'en passer; et, tout en restant, en temps de paix, membre du Comité de l'Artillerie, de Miribel devait conserver jusqu'à la fin de sa vie le poste de Major-Général des Armées pour le jour de la guerre. Cette mission redoutable, il ne l'avait pas désirée, c'était un sacrifice qu'il s'imposait pour la patrie, car sa clairvoyance extrême lui montrait les immenses responsabilités qui lui étaient imposées; il les regardait bien en face, mais il en sentait tout le poids.
Le 21 octobre 1888, de Miribel prenait le commandement du 6e corps d'armée, à Cbâlons. Là, il se retrouvait sur son terrain, et ses nouvelles fonctions allaient lui permettre de travailler avec plus de fruit à l'œuvre qui absorbait toute son âme.
Enfin, le 6 mai 1890, un décret du Chef de l'État créait la situation de Chef d'État-major général de l'Armée, et confiait ce poste éminent à celui que toute l'armée réclamait depuis si longtemps.
Le général de Miribel a dit lui-même, avec une véritable éloquence, à l'Assemblée des anciens élèves de l'École [polytechnique], le 23 février 1890, comment il comprenait sa haute tâche.
Depuis ce moment, tous les officiers qui ont eu l'insigne honneur d'être ses collaborateurs et ses élèves ont pu admirer cet indomptable travailleur, presque invisible aux siens et à ses amis, ne vivant que pour son labeur, auscultant les forces de la France pour les relever, sondant toutes ses faiblesses pour y porter le remède. Une seule pensée absorbait toute son âme : ressusciter la gloire de sa patrie. C'est pour elle qu'il a répandu son cœur, donné tous ses instants, sacrifié sa santé, et enfin immolé sa vie.
Frappé à cheval, il est mort tout d'un coup, emporté par la dévorante intensité de son travail; mais ce soldat et ce chrétien ne pouvait pas être surpris, car son âme était celle d'un juste et il ne redoutait pas la mort.