TRAVAUX
DU
COMITÉ FRANÇAIS D'HISTOIRE DE LA GÉOLOGIE
- Troisième série -
T.XIX (2000)
Edouard LANTERNO
Les sciences géologiques, paléontologiques et minéralogiques à Genève,
du XVIIIe au XXe siècle

COMITÉ FRANÇAIS D'HISTOIRE DE LA GÉOLOGIE (COFRHIGEO) (séance du 6 décembre 2000)

Permettez-moi d’avoir, en préambule, une pensée pour François Ellenberger, sans qui nous ne serions pas réunis aujourd’hui.

On sait que Genève a toujours été, au cours des trois derniers siècles, un foyer scientifique des plus actifs et que les chercheurs genevois ont subi tout particulièrement l’influence des grands géologues français. Bien que le savant genevois Horace-Bénédict de Saussure ait déjà fait l’objet de nombreuses études, notamment par notre camarade d’étude et ami, le professeur Albert Carozzi qui, dans l’ouvrage édité en 1987 à Genève par Jacques Trembley : Les savants genevois dans l’Europe intellectuelle du XVIIIe siècle au milieu du XIXe siècle, consacre à l’historique des idées de Jean-André De Luc et de Saussure plus de soixante pages, il nous a semblé souhaitable d’évoquer ici d’autres savants genevois qui, à côté et à la suite de Saussure, se sont préoccupés des sciences de la Terre et tout particulièrement, au XIXe siècle, le grand géologue Alphonse Favre (1815-1890).

Il va toutefois de soi, qu’il est impossible de ne pas évoquer Horace-Bénédict de Saussure, né à Genève, rappelons-le, en 1740 et mort dans cette même ville en 1799 (Freshfield, 1924). Mais à son sujet, je ne parlerai que de ce que je connais bien, c’est-à-dire de la collection des échantillons qu’il a décrits dans les quatre volumes de ses Voyages dans les Alpes (1779-1796), collection déposée au Muséum de la ville de Genève.

A ce propos, permettez-moi un petit rappel anecdotique. Signalons tout d’abord que cette collection comporte 1266 échantillons numérotés de 1 à 1274, 8 ayant disparu. En 1913, Jules Favre, mon prédécesseur, responsable du département de géologie et de paléontologie au Muséum de la ville de Genève, avait dû mettre en caisses les 1274 échantillons en prévision d’un déménagement dans un nouveau musée à construire, celui qui existait étant déjà trop petit en 1902. Mais la Première Guerre mondiale se déclenche et la collection reste en caisses jusqu’en 1965, date à laquelle votre serviteur rouvre les caisses après leur déménagement au nouveau musée. Quelle ne fut pas sa surprise lorsqu’il découvrit que chaque échantillon se trouvait dans une cuvette en bois, le tout emballé, comme il se doit, dans des journaux, avec une étiquette parfaitement conservée indiquant la nature de l’échantillon et surtout le paragraphe des volumes des Voyages dans les Alpes où il est décrit. Sans entrer bien sûr dans le détail, que nous avons du reste donné dans le fascicule n° 162 de la revue Musées de Genève (1976), entièrement consacré à Horace-Bénédict de Saussure, nous dirons ici que la collection comporte une première série de 115 échantillons provenant presque uniquement des environs de Genève. Puis suit une série de 256 échantillons, principalement de roches cristallines et métamorphiques (granites, diorites, gneiss divers, etc.), tous « pris en place », selon l’expression classique des géologues, le long d’itinéraires ou de cheminements ayant conduit Horace-Bénédict de Saussure de Genève à la vallée de Chamonix. D’autres séries concernent entre autres le versant méridional du massif du Mont-Blanc, de la vallée d’Aoste et des Vals Ferret italien et suisse etc., jusqu’à Martigny, ainsi que les environs de la Maurienne, de Modane, du Mont-Cenis, de Turin, de Gênes, de Sesia et des régions de Menton à Nice, Cagnes, Antibes, Cannes, l’Estérel, Fréjus, Toulon, la vallée du Rhône entre Avignon, Montélimar et Vienne.

La suite de la collection nous ramène en Suisse où la récolte d’échantillons se poursuit dans le canton de Berne, la vallée de l’Emme, à Lauterbrunnen, Brienz et Meiringen, la vallée du Hasli au col du Grimsel. On passe alors à la source du Rhône dans le Haut-Valais d’où l’on pousse une brève incursion au sud des Alpes pour échantillonner entre Crodo et Formazza, puis à Baveno, au Mont’Orfano à Giornico, Faido et Airolo où Saussure effectue un important échantillonnage dans le massif du Saint-Gothard et jusqu’à Disentis dans le canton des Grisons. Mais la série d’échantillons (presque 200) la plus attractive est celle ayant trait à la réputation populaire de l’association des mots « Saussure » et « Mont-Blanc ». En effet, cette série comporte du matériel ramassé vers la fin de l’itinéraire conduisant au sommet du Mont-Blanc (4807 m), par exemple à la montagne de Taconnay, à celle de la Côte, au Rocher de l’Heureux-Retour, au sommet du Dôme du Goûter, « avant la dernière montée du Mont-Blanc », aux Rochers-Rouges, « au point le plus élevé de la dernière montée du Mont-Blanc » et encore « à l’épaule gauche du Mont-Blanc » et enfin, un ensemble d’environ 25 spécimens provenant tous « des deux petits rochers les plus voisins de la cime du Mont-Blanc », « de la partie la plus élevée du Mont-Blanc », « tout près du sommet du Mont-Blanc », « au mamelon le plus élevé du Mont-Blanc », sans oublier les deux échantillons considérés comme éclatés et morcelés par la foudre et trouvés « à l’endroit le plus voisin de la cime du Mont-Blanc » et celui enregistré comme récolté par Jacques Balmat, son guide, « à la dernière montée du Mont-Blanc ».

Cet ensemble d’échantillons que nous venons de citer est complété par du matériel récolté sur le versant méridional de la pointe du Mont-Blanc, soit au-dessus de l’Allée Blanche ou au-dessus de Courmayeur et par une trentaine d’exemplaires pratiquement tous recueillis au col du Géant, un seul provenant de l’« Aiguille du Géant » et un autre « pris sous la cabane, c’est-à-dire, à cent pieds au-dessous du Col du Géant ».

Le reste de la collection comporte environ 150 échantillons provenant, sans autre précision, de la Vallée du Rhône, de celle de Tourtemagne, d’entre Brigue et le col du Simplon, de Gondo, du Val d’Antigorio, du Val Anzasca, en particulier des mines d’or de Macugnaga, sur le versant oriental du Mont-Rose d’où Saussure rapporte le plus grand échantillon de sa collection, soit une magnifique plaque de gneiss à gerbes de hornblende de 23 x 30 x 2-3 cm, décrite au paragraphe 2144 des Voyages.

Avant de conclure la présentation de cette collection, signalons encore du matériel récolté par exemple au « col de Saint-Théodule », au Breithorn, au col et au Mont Cervin, à Breuil, dans le Val d’Ayas, la collection se terminant par 23 échantillons (du n° 1252 au n° 1274) prélevés dans le vallon de Saint-Marcel, dans le haut Val d’Aoste, en particulier dans les mines de pyrite et de manganèse dudit vallon.

En conclusion, si l’essentiel de cette collection consiste en roches cristallines, éruptives et métamorphiques, elle comporte naturellement un certain nombre d’échantillons de roches sédimentaires et, mais en beaucoup moins grande quantité, des spécimens prélevés dans des mines et très peu d’échantillons paléontologiques (une douzaine environ seulement).

Signalons enfin la présence dans cette collection de plusieurs échantillons de roches fondues par la foudre (fulgurites), rarement observées sur le terrain par les géologues, ce qui prouve à notre avis les grandes qualités d’observateur de Saussure et surtout, le sérieux et les très grands efforts physiques déployés au cours de ses campagnes géologiques dans les Alpes occidentales et les régions avoisinantes.

Evoquons maintenant les De Luc, contemporains de Saussure. En effet, si, jusqu’à la fin du XVIIe siècle, les naturalistes ne s’étaient pas encore approchés des montagnes, le XVIIIe siècle voit ceux-ci y pénétrer et commencer à s’intéresser à leur constitution.

C’est alors qu’à Genève Jean-André De Luc (1727-1817), l’un des premiers, entreprend un voyage dans les Alpes où il effectue des observations scientifiques dont il donne les résultats dans ses Lettres physiques et morales sur les montagnes… (1778) et dans de nombreuses autres publications. Son frère, Guillaume-Antoine De Luc (1729-1812), collabore avec Horace-Bénédict de Saussure. Auteur d’une quarantaine de mémoires surtout consacrés à la description de fossiles nouveaux, Saussure lui emprunte quelques descriptions que ce paléontologiste précurseur a faites de nombreux « corps marins pétrifiés » (peignes, térébratules, gryphites, entroques, coraux, madrépores et bivalves) trouvés au Salève (G.-A. De Luc, 1801), pétrifications ou fossiles (bivalves) dont Saussure fait graver quelques-uns pour illustrer la planche II du tome I de ses Voyages dans les Alpes.

A Genève, vers la fin du XVIIIe siècle, l’étude des fossiles est donc en voie de séparation de celle des roches en général avec lesquelles, sans encore les distinguer, on citait les minéraux.

D’autre part, l’étude des phénomènes dynamiques relatifs à l’évolution de la croûte terrestre devient aussi à ce moment l’objet des préoccupations des hommes de science, attirés par l’étude physique du globe. C’est ainsi, en effet, que Jean-André De Luc junior (1763-1847), fils de Guillaume-Antoine et neveu de Jean-André De Luc senior, tout en enrichissant les collections lithologiques et paléontologiques de son père et de son oncle, publie des travaux sur les blocs erratiques du bassin du lac de Genève et de la vallée de l’Arve, dont il attribuait la présence à des courants de boue venant des Alpes (J.-A. De Luc, neveu, 1818-1819, 1825, 1832, 1845).

Le développement de la science géologique entraîne à sa suite une meilleure connaissance des minéraux. Toutefois, longtemps encore, la minéralogie restera une branche annexe de la géologie.

A la fin du XVIIIe siècle et au tout début du XIXe, Genève a la grande chance de bénéficier d’un digne successeur d’Horace-Bénédict de Saussure : Louis-Albert Necker (1786-1861) neveu du précédent et petits-fils de Louis Necker, mathématicien et physicien, frère aîné de Jacques Necker-Curchod, directeur général des finances sous Louis XVI. Ayant achevé ses études de géologie et de minéralogie à l’Académie de Genève, Louis-Albert Necker quitte cette ville en 1806 pour s’établir à Edimbourg.

Se spécialisant dans les recherches sur le terrain, en particulier sur les granites et les minéraux, il dresse la première carte géologique de l’Ecosse et publie un important mémoire sur Le règne minéral ramené aux méthodes de l’histoire naturelle (1835), dans lequel il donne une classification générale des minéraux avec leurs propriétés et la façon de les déterminer. En outre, paraissent trois volumes relatant ses voyages en Ecosse. De retour à Genève, il est nommé dans la chaire de géologie et de minéralogie, tout d’abord en 1810 comme professeur associé, date à laquelle la minéralogie est reconnue comme une discipline indépendante de la géologie, puis en 1817, comme professeur honoraire. Comme son oncle, il parcourt les Alpes centrales et occidentales. Malheureusement, il ne publie les résultats de ses observations qu’en un seul volume : Etudes géologiques dans les Alpes (1841), alors qu’il en avait prévu quatre. Ayant abandonné son professorat, il entreprend dès 1830 de nombreux voyages et excursions scientifiques, tant en Suisse qu’en Ecosse, en France, en Italie et en Autriche, rassemblant des informations nécessaires à ses ouvrages. Malheureusement, dès 1815, sa santé décline et il se rend de plus en plus souvent en Ecosse. En 1841, la mort de sa mère à laquelle il était très attaché, le frappe durement. Il s’installe alors définitivement sur l’île de Skye, dans la petite localité de Portree où il termine sa vie dans l’isolement.

La parution en 1839 du Précis de géographie élémentaire de Paul Chaix (1808-1901), qui allait connaître en un siècle 21 éditions successives, fonda la géomorphologie genevoise. A partir de la 11è édition (1887), l’auteur bénéficia de la collaboration de son fils, Emile Chaix (1855-1929), qui accorda dès l’édition suivante (1892) une place accrue à la géographie physique. A la mort de celui-ci, c’est le petit-fils, André Chaix (1887-1955) qui reprit le flambeau en assurant la publication de l’édition ultime du Précis (1936), lequel, comme on s’en doute, avait bénéficié au fil du temps de nombreux remaniements et mises à jour.

C’est à cette époque que, de son côté, Frédéric-Jacob Soret (1795-1865), après avoir embrassé une carrière ecclésiastique, l’abandonne et se rend à Paris pour étudier les sciences géologiques, en particulier la minéralogie, s’attachant à une science naissante, la cristallographie, en devenant l’élève de René-Just Haüy. Soret étudie les formes des minéraux ainsi que leurs propriétés optiques. Son arrière-petit-fils, Charles Soret (1854-1904) enseignera la physique et la minéralogie à Genève, décrivant les formes cristallines de nombreux corps et composés organiques, étudiant la polarisation et écrivant un traité de cristallographie physique (1893).

Nous ne pouvons nous empêcher, même si les premiers savants chercheurs que nous allons citer n’étaient pas eux-mêmes spécialistes en sciences de la Terre, de rappeler ici qu’en 1834 Auguste de la Rive (1801-1873) et son ami François Marcet, tous deux physiciens, suivent le fonçage d’un puits artésien profond de 221,50 m entrepris près de la localité de Pregny, proche de Genève, sur la rive droite du lac. Cela dans le but de faire quelques observations de physique terrestre, relatives principalement à la température de la Terre à différentes profondeurs et découvrant (33 ans avant Lord Kelvin, 1867) l’accroissement de la température selon une progression uniforme et parfaitement régulière d’environ 1°C pour 30,14 m ou 32,5 m suivant la profondeur (de la Rive & Marcet, 1834). De plus, ils démontrèrent l’existence de « courants électriques terrestres » qui, depuis un peu plus de cinquante ans, sont utilisés sous le nom de courants telluriques, pour la prospection minière ou encore pour la localisation de failles cachées.

Un contemporain d’Auguste de la Rive, Jean-Daniel Colladon (1802-1893) et son ami Charles-François Sturm (1803-1855), également physiciens, s’intéressèrent pour leur part à la compression des liquides, ce qui entraîna Colladon à étudier la vitesse de propagation du son dans l’eau et lui permit de constater l’extrême élasticité de l’eau. Cette célèbre expérience fut effectuée en 1828 sur le lac Léman avec l’aide de quelques amis, les uns installés en face de Rolle sur un petit bateau sous lequel on pouvait actionner une grosse cloche, les autres dans un autre bateau à Thonon, surveillant les fusées que lancent les premiers au moment où un marteau heurte la cloche et écoutant l’arrivée du son dans un cornet acoustique. On sait toute l’importance de ce phénomène dans la recherche pétrolière avec son utilisation en sismique marine.

Le XIXe siècle voit s’affirmer de plus en plus la recherche systématique et précise, les différentes disciplines de la science géologique s’individualisant progressivement.

La géologie proprement dite trouve alors en Alphonse Favre (1815-1890) un des plus dignes successeurs d’Horace-Bénédict de Saussure. Géologue complet, s’attachant autant à la paléontologie stratigraphique qu’à la stratigraphie lithologique (Ed. Favre, 1937), Alphonse Favre s’intéresse tout particulièrement à la science géologique par excellence qu’est la tectonique en s’aidant d’expériences réalisées sur maquettes pour mieux comprendre la formation des chaînes de montagnes, c’est-à-dire les phénomènes d’orogenèse. Il reprend au cours d’un nombre considérable de voyages et d’excursions toute l’étude des montagnes des environs de Genève. Il en résulte en 1862 une carte géologique au 150 000e couvrant environ 5300 km2, avec une notice explicative, et trois volumes, publiés en 1867, sous le titre : Recherches géologiques dans les parties de la Savoie, du Piémont et de la Suisse, voisines du Mont-Blanc, volumes accompagnés d’un atlas très grand format de 32 planches. Ces ouvrages constituent un événement capital dans l’histoire de la géologie des Alpes, car ils ont, malgré le temps écoulé, gardé tout leur intérêt et leur valeur.

Très bon alpiniste, Alphonse Favre ne fit jamais pour le seul plaisir sportif une ascension qui ne pouvait pas être utile pour son travail. Ainsi, n’est-il jamais monté au sommet du Mont-Blanc. En revanche, il n’hésitait pas à s’attaquer à un mauvais passage quand l’intérêt scientifique était en jeu. N’ayant pas pu atteindre le sommet de la plus haute des Aiguilles Rouges de Chamonix (le Belvédère), il a néanmoins découvert à distance en 1847, que ce sommet était couronné par un lambeau de terrains sédimentaires sur lequel il a fondé une théorie très importante pour la stratigraphie des Alpes. C’est en souvenir de cette découverte qu’une des Aiguilles Rouges a été baptisée Pointe Alphonse Favre.

De plus, Alphonse Favre n’oublie pas sa petite patrie, le canton de Genève, et en 1878-1879 paraissent en deux volumes, une remarquable étude géologique descriptive de ce canton et une carte géologique au 25 000e. Remarquons en passant, qu’Alphonse Favre parcourait le canton de Genève à cheval, relevant systématiquement toutes les fouilles, fondations et autres excavations qu’il rencontrait. Enfin, signalons que l’ensemble des échantillons récoltés par ce remarquable géologue, sont conservés au Muséum de la ville de Genève.

Les deux importants travaux que nous venons de signaler font partie d’une série de publications – 50 titres au total – allant des Remarques sur les anthracites des Alpes (1841), au texte explicatif de la Carte du phénomène erratique, etc. (1884), sans oublier 36 autres publications consistant soit en courtes notices originales ou extraits de communications à des sociétés savantes, soit en comptes rendus et appréciations de travaux d’autres auteurs, sans oublier de nombreuses analyses de divers travaux publiés entre 1846 et 1882. Enfin, pour clore cet impressionnant panorama d’activité scientifique géologique, nous dirons quelques mots de ses Expériences sur les effets des refoulements ou écrasements latéraux en géologie (1878), incité en cela, par les constatations de Descartes qui, en 1644, « semblait avoir entrevu la cause des dislocations du sol retrouvée par les géologues modernes » et naturellement par une note de Daubrée dans son Rapport sur les progrès de la géologie expérimentale (Paris, 1867).

Avant d’examiner l’activité géologique de son fils, Ernest Favre, nous évoquerons ici deux grands paléontologistes genevois. Tout d’abord, au milieu du XIXe siècle, un magnifique et puissant serviteur de cette science des fossiles, François-Jules Pictet de la Rive (1809-1872) venu indirectement et par nécessité à cette discipline. En effet, dans l’obligation d’enseigner à l’Académie de Genève non seulement la zoologie proprement dite, mais aussi l’anatomie comparée, la physiologie et la paléontologie, cet éminent entomologiste, spécialisé dans l’étude des insectes du groupe des névroptères, s’oriente vers la paléontologie. C’est ainsi qu’ayant besoin, pour son enseignement, d’un traité élémentaire, relatif aux animaux fossiles, traité qui n’existe pas, Pictet en prépare un qui paraît de 1844 à 1846. Puis, ce grand chercheur entreprend une série de travaux très importants sur les faunes fossiles des montagnes voisines de Genève, qu’il publie dans les Matériaux pour la Paléontologie suisse, ou Recueil de monographies sur les fossiles du Jura et des Alpes (Cf. J.-L. Soret, 1872). C’est grâce aux relations étendues de ce grand naturaliste genevois que notre Muséum, auquel il consacre une grande partie de son activité, reçoit à cette époque des collections privées parmi les plus célèbres du moment, collections qui donnèrent bientôt à cette institution, une réputation européenne puis mondiale, ce que j’ai pu apprécier personnellement au cours de plus de trente ans d’activité dans ce Muséum.

Mais la paléontologie allait trouver à Genève, dans la seconde moitié du XIXe siècle, un serviteur encore plus enthousiaste, élève il est vrai de François-Jules Pictet : Perceval de Loriol (1828-1908). C’est en effet à ce paléontologiste renommé, ayant consacré toute sa vie à ses recherches (en particulier aux faunes du Jura et à l’étude des échinodermes), à l’organisation des collections paléontologiques du Muséum de la ville de Genève et à la rédaction des Mémoires de la Société paléontologique suisse, que l’on doit une série remarquable de travaux classiques sur les fossiles du Jura, proche de Genève, du Salève et des Voirons, et en particulier sur les échinodermes fossiles et récents dont l’imposante collection est devenue partiellement propriété du Muséum genevois (Ch. Sarasin, 1909).

Un autre élève de François-Jules Pictet, Ernest Favre (1845-1925) fils du grand Alphonse Favre, illustre encore la géologie genevoise dans cette moitié du XIXe siècle.

Ayant étudié la géologie à Genève puis à Paris, Heidelberg et Vienne, selon la notice nécrologique publiée par Hans Schardt (1925), Ernest Favre entreprend deux explorations dans le Caucase et la Crimée où il effectue des travaux de stratigraphie et de paléontologie. De retour au pays, il se met à l’étude des Préalpes vaudoises, fribourgeoises et du Chablais et publie ses résultats avec le futur grand maître de la géologie suisse, Hans Schardt. A l’âge de 35 ans, alors qu’il avait déjà publié une trentaine de travaux importants de stratigraphie et de paléontologie sur le Caucase, la Crimée et les environs de Genève, il renonce à poursuivre sa carrière scientifique, répondant à l’appel impérieux de sa conscience de chrétien convaincu qui l’engageait à se consacrer tout entier à l’évangélisation populaire. La science genevoise perdait ainsi un géologue distingué et un paléontologiste, digne émule de François-Jules Pictet et de Perceval de Loriol.

Albert Brun (1857-1939), bien que pharmacien de profession, fit une carrière scientifique qui, tout en étant indépendante, n’en fut pas moins brillante. L’étude des volcans qu’il fit au cours de nombreux et lointains voyages, lui permit d’établir que l’eau ne joue nullement un rôle essentiel, ni même nécessaire, dans les éruptions volcaniques. Dans son bel ouvrage Recherches sur l’exhalaison volcanique, orné de 30 planches (1911), il expose les résultats de ses longues et patientes observations qui firent de lui à son époque un des meilleurs connaisseurs en volcanologie.

Après le grand engouement montré par les savants paléontologistes du XIXe siècle pour l’étude des fossiles, la fin de celui-ci et le début du XXe siècle voient la géologie genevoise s’orienter peu à peu vers la discipline qui est son aboutissement, la tectonique.

Si Charles Sarasin (1870-1933) s’attarde peu à l’étude des fossiles, c’est surtout l’étude tectonique des Alpes et spécialement celle des Alpes de Savoie qui fait l’objet de ses préoccupations et de celles de ses élèves et successeurs, notamment de Léon-William Collet (1880-1957).

Rappelons ici qu’à cette époque, et cela sous l’impulsion du grand tectonicien français Marcel Bertrand et des géologues suisses Hans Schardt et Maurice Lugeon, on commence à remettre complètement en question les idées que l’on se faisait de la formation des Alpes. Apparaît alors la notion de grandes nappes de charriage se chevauchant les unes les autres, notion dont Emile Argand (1879-1940), originaire de Genève, mais élève de Maurice Lugeon à Lausanne, allait se faire le champion, en particulier par sa géniale découverte de la nappe de la Dent-Blanche issue de la zone Sesia-Lanzo, et dont les idées sont alors admises par la majorité des géologues alpins.

Mais revenons-en à Léon-William Collet (1880-1957). Celui-ci, auteur de presque 150 notes et publications scientifiques géologiques, cela de 1904 à sa mort (Paréjas, 1957), publie en 1910 à la Société de Physique et d’Histoire naturelle de Genève, un important mémoire, dédié respectueusement à Alphonse Favre et intitulé Les Hautes Alpes calcaires entre Arve et Rhône, puis un autre mémoire en 1943 : La nappe de Morcles entre Arve et Rhône, dans la série des Matériaux pour la Carte géologique de la Suisse, ce dernier précédé par un ouvrage en anglais The structure of the Alps (1927 et 1935), sans oublier son volume, publié en 1908, sur Les dépôts marins et celui sur Les lacs (1925).

Rappelons également qu’Edouard Paréjas (1890-1961), fidèle collaborateur de Léon William Collet pendant de très nombreuses années, enseigna la géologie à l’université de Nankin dans les années 1930-1932 et à l’université d’Istanbul de 1936 à 1942, avant de succéder à son maître en 1944 à l’université de Genève (Lombard, 1962). Nous ne pouvons pas non plus oublier Adrien Jayet (1896-1971) qui, s’étant spécialisé dans l’étude du Quaternaire genevois, apporta de nombreuses contributions à la connaissance de celui-ci.

Parallèlement à l’activité des géologues sus-nommés, nous ne saurions oublier ceux qui comme Etienne Joukowsky (1869-1948) et Jules Favre (1882-1959), tous deux collaborateurs de géologie, paléontologie et minéralogie au Muséum de Genève, et auteurs de la magnifique Monographie géologique et paléontologique du Salève (Haute-Savoie, France), parue en 1913 dans les Mémoires de la Société de Physique et d’Histoire naturelle de Genève, et comportant une carte géologique en couleurs. Ajoutons cependant que si Etienne Joukowsky, qui avait obtenu à Paris en 1904 son diplôme d’ingénieur à l’Ecole nationale supérieure des mines, était entré en 1897 comme assistant de minéralogie au Muséum de Genève, ce n’est qu’en 1902 que paraît sa thèse sur les éclogites des Aiguilles Rouges de Chamonix, le sujet lui ayant été proposé par son maître Louis Duparc. Dès lors il aura, pendant près de quarante ans, comme activité principale l’organisation et la présentation des collections minéralogiques et pétrographiques du Muséum. Toutefois, ayant participé avec Louis Duparc en 1897 au Congrès géologique international de Moscou, il profite de ce voyage pour séjourner dans l’Oural où l’un de ses oncles possède de grands domaines dont il étudie la géologie. Il retournera en Russie à la demande de propriétaires de charbonnages ukrainiens pour y prospecter de nouveaux gisements d’anthracite. Il fit également un voyage au Caucase, puis ce fut Panama, pour étudier le Tertiaire de l’isthme du même nom, le Paraguay pour l’étude de gisements de cuivre et, alors qu’il est bloqué en Amérique du Sud par la guerre de 1914-18, il en profite pour étudier diverses formations géologiques en Argentine et au Chili. Enfin, il se rend en Algérie pour y étudier les possibilités d’exploitation d’un gisement de kaolin (J. Favre, 1948 ; Buffle, 1948).

Mais cela ne l’empêche pas de s’intéresser à la géologie genevoise, et c’est alors qu’il réalise, de 1907 à 1913, une excellente étude du Salève avec son collègue et ami Jules Favre. Puis le Quaternaire genevois l’intrigue et c’est ainsi qu’il découvre, dans les graviers de l’interglaciaire Riss-Würm, une nappe dite de l’ « alluvion ancienne » que Joukowsky fait connaître aux responsables du Service des eaux de la ville de Genève qui s’empresseront de l’exploiter.

Quant à Jules Favre (1882-1959), notre prédécesseur au Muséum de Genève, après avoir « goûté », par passion, à la botanique, il s’inscrit à l’Académie de Neuchâtel puis, insatisfait, fréquente la chaire de zoologie mais, par suite de problèmes financiers devient assistant de géologie et entreprend alors, sous l’exigeante direction de son maître Hans Schardt, une thèse intitulée Description géologique des environs du Locle et de la Chaux-de-Fonds qui lui vaut en 1911, le titre de docteur ès sciences de l’université de Genève. Il est appelé en 1907 au Muséum de Genève en qualité d’assistant de paléontologie, sur la proposition de son futur collègue, collaborateur et ami Etienne Joukowsky, avec lequel il entreprend presque aussitôt la magnifique étude géologique et paléontologique du Salève dont nous venons de parler. Il publie, au début de sa carrière à Genève, plusieurs travaux de géologie et de paléontologie, en particulier le Catalogue illustré de la Collection Lamarck – Fossiles, illustré de 117 planches in-4° avec texte explicatif, collection offerte au Muséum de Genève par Benjamin Delessert qui en était devenu propriétaire après son achat à la mort de Lamarck par le prince Massena, duc de Rivoli. Jules Favre est alors repris par son goût de la botanique et publie sur la flore du Salève et la géologie de cette montagne, sur celle du cirque de Moron et des hautes côtes du Doubs, une étude de géographie botanique. Il s’adonne ensuite à l’étude des mollusques quaternaires post-glaciaires et récents, avant de se consacrer jusqu’à la fin de sa vie à l’étude des champignons, élaborant notamment un Catalogue descriptif des champignons supérieurs de la zone subalpine du Parc national suisse dans le canton des Grisons, au NE de la Suisse (Lanterno, 1959).

Revenons à la minéralogie car celle-ci tend de plus en plus, vers la fin du XIXe siècle, à se séparer d’une géologie surtout préoccupée de paléontologie et de stratigraphie et prête à aborder la tectonique. Ainsi, l’étude des formes cristallines, la détermination des paramètres des propriétés optiques des cristaux sont plus l’objet de recherches de laboratoire que d’observations sur le terrain. La minéralogie s’apparente alors à la physique.

C’est ainsi que Charles Soret (1854-1904), professeur de physique et de minéralogie à l’université de Genève, décrit un très grand nombre de composés organiques et inorganiques, invente un réfractomètre qui porte son nom et développe la connaissance des phénomènes de polarisation de la matière cristalline. Son ouvrage Eléments de cristallographie physique (1893) fixe avec une clarté remarquable l’état des connaissances à cette époque. L’invention du microscope polarisant donne à la minéralogie genevoise une nouvelle impulsion en permettant une étude plus approfondie des minéraux et de la classification des roches, créant ainsi une discipline nouvelle : la pétrographie.

Ainsi, au début du XXe siècle, la minéralogie acquiert vis-à-vis de la géologie et de la physique une complète autonomie.

Louis Duparc (1866-1932) succéda à Charles Soret comme professeur de minéralogie, pétrographie et de chimie analytique à notre université. Son activité scientifique a été aussi abondante que variée. En effet, celui-ci contribua à généraliser les méthodes microscopiques du savant russe Fedoroff dont il fit usage dans des études pétrographiques étendues. A une époque où le développement industriel exige de plus en plus de matières premières, il oriente son activité vers les roches métamorphiques et les gisements métallifères et crée pour ses élèves une véritable école de prospection dont la réputation dépasse largement les frontières de la Suisse. Parmi ses nombreux voyages dans le monde, ses campagnes dans les régions platinifères de l’Oural font de lui un des meilleurs spécialistes du platine à propos duquel il écrit, en collaboration avec Marguerite Tikanovitch, une remarquable monographie sur Le platine et les gîtes métallifères de l’Oural et du monde (1920). Ses élèves et collaborateurs aideront à répandre sa réputation, entre autres Henri Lagotala (1889-1954) en Roumanie pour le pétrole (Fourmarier, 1954 ; Lanterno, 1954), Marcel Gysin (1891-1974) qui succédera à Duparc en 1932 (Vuagnat, 1975), et Raymond Galopin (1901-1992), devenu spécialiste des minéraux opaques, qui succédera à Etienne Joukowsky comme conservateur de minéralogie au Muséum de Genève (Lanterno & Vuagnat, 1993). Ces collaborateurs de Louis Duparc furent naturellement les auteurs de très nombreuses publications, lui-même en ayant publié 355 (Gysin, 1933).

Nous nous en voudrions de ne pas mentionner ici Edouard Marie Poldini (1896-1967) qui, après avoir étudié la géologie à Lausanne avec Maurice Lugeon, collabora avec les Schlumberger dès 1925 à Paris sur les méthodes de prospection électrique du sous-sol, thème auquel il consacra un ouvrage en 1941. C’est en 1944 que Poldini fut appelé à Genève pour y enseigner, ainsi qu’à Lausanne, la géophysique appliquée, en particulier les méthodes de gravimétrie, de magnétométrie, d’électricité et de sismique (Meyer de Stadelhofen, 1967).

Nous évoquerons enfin la mémoire d’Augustin Lombard (1905-1997) qui fut le successeur d’Edouard Paréjas à l’université de Genève. Ce géologue genevois, qui a pratiquement traversé tout le XXe siècle, après avoir travaillé en Amérique du Nord, enseigné aux Etats-Unis (université de Pittsburgh), à l’université de Bruxelles pendant dix ans, et voyagé dans les montagnes Rocheuses du Canada, au Hoggar, en Scandinavie mais surtout dans les Alpes occidentales, son terrain de prédilection, nous a laissé 169 publications dont Géologie générale (1956) et Géologie sédimentaire - Les séries marines (1956) (Charollais & Decrouez, 1998).

Enfin, nous ne pouvons taire le nom de Paul Brönnimann (1913-1993), grand micropaléontologiste de réputation internationale. Né à Bienne dans le canton de Berne, Brönnimann fit toutes ses études à Bâle, qu’il couronna d’un doctorat en géologie et paléontologie sous la direction de son maître Manfred Reichel. Après de courts séjours aux universités de Berne et de Lausanne où il poursuit des travaux sur les grands foraminifères du Tertiaire, il publie en 1945 sa thèse sur les orbitoididés tertiaires et myogypsinidés du Maroc, ainsi qu’une série d’articles sur les discocyclines. Dès 1946, Brönnimann commence sa carrière internationale de micropaléontologiste dans l’industrie pétrolière. C’est alors Trinidad de 1946 à 1952, puis Cuba de 1952 à 1959, la Libye de 1960 à 1962, la France en 1963, et enfin le retour en Suisse à l’université de Genève, comme professeur de paléontologie, de 1964 à 1982. L’œuvre micropaléontologique et paléontologique de Paul Brönnimann est immense : plus de 200 publications. Parmi les foraminifères, les orbitoididés du Tertiaire ont été sa première spécialité, puis il s’est intéressé aux foraminifères planctoniques. Mais Paul Brönnimann a eu d’autres domaines de prédilection comme les foraminifères du Trias, les foraminifères benthiques du Crétacé, les foraminifères actuels mais aussi les coprolithes, les nannofossiles calcaires, les microfossiles incertae sedis, etc. (Decrouez, 1993)

Son immense activité scientifique, caractérisée par la qualité des observations, le soin des descriptions, l’originalité des déductions et la cohérence des conclusions ont valu à Brönnimann d’être couronné par la Cushman Foundation qui lui décerna en 1984 le Joseph A. Cushman Award. A Genève, une Fondation Paul Brönnimann a été créée. Elle décernera en 2001 un prix de 5 000 francs suisses.

Revenons pour terminer, à la géologie, en saluant André Amstutz (1901-1981), géologue indépendant, auteur de 77 publications de minéralogie, de pétrographie et surtout de tectonique, cela après avoir présenté en 1925 sous la direction de son maître Louis Duparc une thèse intitulée Les roches éruptives des environs de Dorgali et Orosei en Sardaigne (1925). Saluons surtout en lui le créateur, en 1951, dans les Archives des Sciences, du terme de « subduction » utilisé dorénavant par tous les géologues du monde, et cela bien avant que Tuzo Wilson ait parlé en 1968 de « Révolution dans les sciences de la Terre » à propos de la théorie de la tectonique des plaques. Rappelons ici que le terme de « subduction » a été relevé et approuvé, dès 1952, au Congrès géologique international d’Alger, par le grand géologue français Maurice Gignoux puis à la seconde Penrose Conference de la Geological Society of America par quatre géologues américains : David A. White, Dietrich M. Roeder, Thomas M. Nelson et John C. Crowell. S’inspirant de la notion de « subduction », André Amstutz proposa de nouvelles hypothèses sur la formation des Alpes occidentales, hypothèses qui ne furent pas toujours admises et appréciées, en particulier par ses collègues géologues helvétiques (Lanterno, 1982).

Enfin je parlerai d’un dernier géologue « genevois », Alfred Rittmann (1893-1980), pétrographe volcanologue, qui, ami d’André Amstutz, soutint les idées de celui-ci, ne s’intéressant lui-même qu’à la physique du globe, comme il le disait du reste.

Venu terminer ses études à Genève chez Louis Duparc entre 1917 et 1921, il présente au début de cette dernière année une thèse de doctorat intitulée Etude pétrographique sur une série de roches des gîtes platinifères de l’Oural (1922). Dès ce moment, Rittmann consacre la plus grande partie de son activité à l’étude des volcans et des roches volcaniques. Cette activité se concrétisera dans plus d’une centaine de publications scientifiques. Animateur dynamique et brillant de l’Institut volcanologique Friedländer à Naples (jusqu’en 1934), il profite de la période de pleine activité éruptive du Vésuve à cette époque pour étudier ce volcan comme personne ne l’avait encore fait jusqu’alors, ce que relève très justement Haroun Tazieff dans sa préface de la traduction française de la seconde édition de Vulkane und ihre Tätigkeit. Appelé à l’université de Bâle pour enseigner la pétrographie, la géochimie, la géophysique et la volcanologie, il y reste environ six ans puis retourne en Italie, à Rome, où on lui offre le poste de directeur du Centre de recherches géologiques puis celui du Centre Silano du Consiglio Nazionale delle Ricerche (C.N.R.), cela pendant neuf ans. Après l’Italie, c’est à l’université d’Alexandrie en Egypte qu’il enseignera la géologie et la pétrographie et sera dans le même temps pendant dix ans professeur de géologie minière à la faculté d’ingénierie de l’université du Caire. L’arabisation des cours oblige Rittmann à quitter l’Egypte. Il retourne alors en Italie, en Sicile plus exactement, au pied du plus grand et du plus actif des volcans européens, l’Etna, et devient directeur de l’Institut international de volcanologie de Catane où l’appelle Haroun Tazieff, en raison de sa très grande réputation scientifique, reconnue en 1954 par son élection à la présidence de l’Association internationale de volcanologie de l’Union géodésique et géophysique internationale, poste auquel il sera réélu trois fois de suite. Plusieurs fois distingué par des universités étrangères, Rittmann sera nommé en 1959 docteur honoris causa de l’université de Genève.

Grand voyageur, Rittmann passe le reste de sa vie en Afrique, en Asie, au Groenland, en Islande, au Japon, etc. La traduction française de son ouvrage Les volcans et leur activité dont le texte définitif est établi par Haroun Tazieff paraît en 1963. Par la suite, paraîtront les traductions en anglais, en espagnol, en roumain, en russe, etc. (Lanterno, 1981).

J’ai eu le grand privilège de connaître et de rencontrer personnellement Rittmann au cours d’une excursion au Vésuve et aux Champs phlégréens sous sa remarquable direction et plusieurs fois, à Genève, où son ami André Amstutz l’invitait.


Remerciements

J’adresse mes très vifs remerciements à ma collègue Danielle Decrouez pour toute l’aide qu’elle m’a apportée pour la réalisation finale du texte.

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