Pierre André Alec ALBY (1921-1998)

Né le 23 novembre 1921 à Paris. Fils d'Henri Georges Alby (1896-1972 ; X1919 S), administrateur de diverses sociétés, et de Mme née Yvonne NICOLETIS (soeur de John Minos Stéphanos NICOLETIS, 1893-1987, X 1913, ingénieur des poudres qui a conseillé le gouvernement républicain espagnol pendant la guerre civile, puis fit partie du mouvement de résistance du général Cochet). Petit-fils de Amédée Joseph Marie ALBY (1862-1942 ; X 1880). Arrière-petit-fils d'Emile PEREIRE (1800-1875), fondateur de compagnies de chemins de fer et de la Compagnie générale transatlantique. Marié en 1948 à Marine AMET. 7 enfants.

Pierre Alby a fait ses études aux lycées Carnot et Saint-Louis à Paris, puis au Lycée Blaise-Pascal à Clermont-Ferrand.
Ancien élève de l'Ecole polytechnique (promotion 1940) et de l'Ecole des mines de Paris (rattaché à la promotion 1941). Corps des mines.

Il débuta sa carrière professionnelle à Béthune et fut, de 1945 à 1949, professeur de législation générale et minière à l’Ecole des Mines de Douai. De 1949 à 1953, il fut chef du service Economie de guerre au Secrétariat général permanent de la défense nationale. De 1953 à 1957, il exerça les fonctions de Secrétaire général adjoint du Comité interministériel pour les questions de coopération économique européenne à la Présidence du Conseil.
Il occupa successivement les postes :
- Directeur des mines au Ministère de l’Industrie de 1957 à 1964,
- Directeur général adjoint de Gaz de France de 1964 à 1969,
- Directeur général de Gaz de France de 1969 à 1979,
- Président du conseil d’administration de cette même société de 1979 à 1986, fonction qu’il a cumulée avec celle du Président de l’ERAP de 1980 à 1982.
Il fut également, de 1969 à 1972, Président de l’Association des cadres dirigeants de l’industrie pour le progrès économique et social (ACADI, dont René Perrin fut longtemps président), puis de 1975 à 1977, président de l’Association des anciens élèves de l’Ecole nationale supérieure des mines de Paris. En outre, il était, depuis 1974, membre, puis, de 1982 à 1987, vice-président du Conseil général des Mines. De 1987 à 1996, il fut Président du Groupement international des importateurs de gaz naturel liquéfié (GIIGNL).
Il était membre de la Commission de la Privatisation depuis 1993.
Pierre Alby était membre d’honneur de l’ATG depuis 1965 et président d’honneur de l’ATG depuis 1985.
Il était titulaire des décorations suivantes :
- Commandeur de l’Ordre national de la Légion d’honneur,
- Commandeur de l’Ordre national du Mérite,
- Commandeur de l’Ordre du Mérite commercial,
- Commandeur de l’Ordre du Mérite de la République Italienne,
- Commandeur de l’Ordre de Saint-Charles (Monaco)
- Médaille d’Or de l’Ordre du Mérite de la République Populaire
de la Pologne,
- Ordre de l’Etoile de la République Populaire Hongroise,
- Chevalier de l’Etoile Noire du Benin.
Pierre Alby est décédé le 22 juillet 1998.


L'article qui suit avait été publié dans Revue des Ingénieurs MINES, novembre/décembre 1998.

Pierre ALBY

Ingénieur général des mines

par
Paul GARDENT

Pierre ALBY est né en 1921, de Henri ALBY et de Yvonne NICOLETIS. Du célèbre homme d'affaires Emile PEREIRE, dont Henri ALBY était l'arrière-petit-fils, il a sans doute hérité l'esprit réfléchi et le sens de l'initiative. Par sa mère, il recevait un mélange de sang grec, italien et britannique, favorable à une certaine imagination.

Après des études parisiennes, les circonstances de guerre l'amènent en taupe à Clermont-Ferrand. Reçu à l'Ecole Polytechnique en 1940, il en suit le cours, en raison de la guerre, à Lyon où sa promotion, jointe à celle de 1939, reçoit l'hospitalité de l'Ecole de Santé militaire. Sorti dans le Corps des mines, sa scolarité à l'Ecole des Mines est également perturbée par les menaces du service du travail obligatoire en Allemagne, qui le conduisent, avec ses camarades de promotion, à faire un an de stage minier, qui jouait alors un rôle protecteur.

Ingénieur des mines à Béthune de 1945 à 1949, il traverse les grandes grèves des mines de 1947 et 1948. Le Service des Mines a la responsabilité d'obtenir le maintien de la sécurité dans les exploitations, et de conseiller les autorités chargées du maintien de l'ordre sur les mesures à prendre. Pierre ALBY se signale par son attitude énergique. «C'est au moins un directeur», dit un témoin qui ne le connaissait pas, après l'avoir entendu s'exprimer dans une réunion.

Il est, pendant la même période, professeur de législation générale et minière à l'Ecole Technique des Mines de Douai. Enseignement austère. Il racontait avec humour s'être endormi lui-même au cours d'une leçon, et n'avoir été réveillé que par les applaudissements des élèves !

Il est rapidement intéressé par une diversification de sa carrière. Chef du Service de l'Economie de Guerre au secrétariat général permanent de la Défense Nationale en 1953, puis Secrétaire Général adjoint au Comité interministériel pour les questions de coopération économique européenne, il participe à la négociation du traité de Rome de 1956. Pendant la suite de sa carrière, il restera très attentif aux problèmes internationaux.

En 1957, il est nommé Directeur des mines au Ministère de l'Industrie. Cette Direction va disparaître peu après, ses missions principales étant transférées à la Direction générale de l'Energie et des Matières premières. Mais à ce moment-là, elle joue encore un rôle notable dans la tutelle des exploitations minières. Pierre ALBY manifestait dans cette fonction une vision très régalienne de l'Etat. Au moment de la grande grève des mineurs en 1963, il était très affecté par les erreurs d'analyse du gouvernement, et par la perte d'autorité de l'Etat. Le Directeur des mines avait aussi un rôle majeur dans les orientations de carrière des ingénieurs du Corps des mines, parmi lesquelles la recherche tenait une place de plus en plus importante. Pierre ALBY a fait partie, dès ce moment, et même après la fin de sa carrière, de la Commission d'Orientation des membres du Corps optant pour la recherche.

En 1964, Pierre ALBY quitte l'administration pour rejoindre Gaz de France, où il sera successivement Directeur Général adjoint, Directeur Général en 1969, Président de 1979 à 1986. Pendant cette période interviennent les crises pétrolières, qui vont contribuer à donner, dans l'approvisionnement énergétique de la France, une place importante au gaz naturel. Celui-ci est devenu pratiquement la seule ressource de Gaz de France. Pierre ALBY est amené à négocier d'importants contrats destinés à assurer et à diversifier l'approvisionnement français, notamment avec l'Algérie et l'URSS. De 1987 à 1996, il prolonge son activité gazière avec la présidence du Groupe International de Gaz Naturel Liquéfié.

Au milieu de ce parcours, entre 1980 et 1982, il assume en même temps la présidence de l'Entreprise de Recherches et d'Activités Pétrolières, l'ERAP, et joue ainsi un rôle important dans la structuration et le développement d'Elf Aquitaine.

Mais il n'a pas oublié le service de l'Etat. En 1974, il a été nommé membre du Conseil Général des Mines, dont le Ministre de l'Industrie est Président. Il en accepte la vice-présidence de 1982 à 1987. A ce titre, il est de nouveau tuteur du Corps des mines, cette mission ayant été transférée de la Direction des Mines, après sa disparition, à la présidence du Conseil Général des Mines.

Enfin, en 1993, il devient membre de la Commission de la Privatisation, à laquelle il consacre, jusqu'à la fin, une notable partie de son temps. Il assiste à la dernière séance de la Commission, dans sa formation du moment, quelques jours avant sa mort le 22 juillet 1998.

Pierre ALBY, malgré des activités professionnelles absorbantes, était resté très attaché aux liens de camaraderie et d'amitié. De 1969 à 1972, il assura la présence de l'Association des Cadres dirigeants de l'industrie pour le progrès social et économique (ACADI). De 1975 à 1977, il a présidé l'Association des anciens élèves de l'Ecole des Mines de Paris. Il a enfin patronné, jusqu'à sa disparition, un déjeuner périodique des membres du Corps des mines, dont il était l'initiateur.

Dans ses fonctions de dirigeant, Pierre ALBY impressionnait ses collaborateurs par son étonnante capacité de travail, particulièrement dans ses déplacements à l'étranger. Quelques heures de sommeil lui suffisaient pour récupérer, et repartir aussi dispos pour une nouvelle journée. Intransigeant, souvent secret, veillant à tout, notamment aux dépenses inutiles, il anticipait les décisions à prendre et maintenait constamment son personnel en haleine. Par contre, il faisait a priori confiance, et laissait une large initiative à ses collaborateurs immédiats. Dans les contacts individuels, au hasard d'un repas, d'une cérémonie, d'un congrès, il se montrait détendu et d'une grande gentillesse. Dans son bureau, pipe à la main, il avait une façon d'écouter qui créait une atmosphère propice aux échanges.

Pierre ALBY s'était marié le 2 juillet 1948 avec Marine AMET, dont le prénom évoquait l'ascendance maritime. Grâce à cette union, il avait développé son goût pour la mer, entretenu par sa résidence d'Etretat qu'il aimait, et où il pratiquait, comme souvent au travail, le lever matinal, mais pour aller à la pêche cette fois.

Pierre ALBY avait sept enfants qui lui étaient chers. Mais c'est son dévouement sans faille pour une fille gravement handicapée qui provoquait surtout l'admiration.

Pierre ALBY était commandeur de la légion d'honneur, commandeur de l'Ordre National du Mérite, et titulaire de nombreuses décorations étrangères, témoignage de ses activités internationales.

P. GARDENT


Pierre ALBY

par Jacques MAIRE, Ingénieur en Chef des Mines

Bulletin du service du Conseil Général des Mines, juin 1999

Mon premier contact avec Pierre ALBY date de ma période d'ingénieur-élève.

Avec quelques camarades, nous étions alors allés rendre visite au Directeur des Mines pour savoir ce que nous réservaient les prochaines années. Nous lui avons expliqué nos idées, il les a écoutées avec beaucoup d'attention, puis il nous a donné les siennes. Ce sont bien sûr ces dernières qui se sont imposées dans l'immédiat mais les évolutions ultérieures ont bien montrées aussi qu'il nous avait écoutés.

J'ai découvert ce jour-là chez Pierre ALBY, ce que j'ai toujours retrouvé dans mes nombreux contacts ultérieurs : c'est-à-dire une grande capacité d'écoute, de compréhension et aussi de définir et de se tenir à une politique en convaincant ses interlocuteurs.

Maintenant que je suis plutôt à l'autre bout de ma carrière, j'ai en regardant en arrière l'impression qu'il a été toujours un des éléments primordiaux du fonctionnement du Corps des Mines. Il a bien sûr été à deux reprises en charge officiellement de sa gestion, mais au-delà il a été un de ceux qui ont le plus veillé à son unité et à sa cohérence.

Très tôt, comprenant l'importance des contacts informels et amicaux, il s'est attaché à les développer et tous ceux qui y ont participé, savent l'agrément et l'utilité des « déjeuners ALBY ».

Pierre ALBY avait un grand sens des traditions et des valeurs qui y sont attachées. Mais ceci ne l'empêchait de voir les évolutions importantes de notre Société et d'y participer activement. C'est ainsi qu'il a fait partie des premières équipes de l'Administration française qui ont travaillé à la construction européenne comme Secrétaire Général Adjoint du Comité Interministériel pour les Questions de Coopération Economique Européenne.

Il a su faire face ensuite comme Directeur des Mines aux évolutions de l'activité charbonnière avec les problèmes économiques mais surtout humains que cela comportait.

A gaz de France où de 64 à 86 il a été successivement Directeur Général Adjoint, Directeur Général puis Président, il a en particulier piloté le changement complet de cette industrie avec son ouverture aux approvisionnements internationaux.

Attaché à son pays, il avait un grand sens des relations internationales et j'ai pu constater dans toutes les réunions son grand rayonnement parmi toutes les compagnies gazières de tous les pays.

Ferme dans ses convictions et ses idées, il savait aussi être un homme de conciliation avec comme seul guide l'intérêt national. Lorsqu'en 1980 le Gouvernement a cherché quelqu'un pour une mission « impossible » la présidence de l'ERAP, c'est naturellement Pierre ALBY qu'il a été chercher.

Tous ceux qui l'ont connu, peuvent témoigner de son sens de l'Etat et de la rigueur qu'il s'appliquait à lui-même. Sa nomination à la Commission des Privatisations en a été la dernière illustration.

Il a, avec son épouse Marine, élevé une nombreuse famille. La diversité des orientations de ses enfants et leur réussite montrent là aussi qu'il savait être attentif à chacun, donner son appui et son aide mais aussi laisser libre sans chercher à imposer son modèle à lui.

Ces quelques mots sont sans doute trop courts pour décrire la richesse de la vie et de la carrière de Pierre ALBY. Je dirai simplement pour conclure, que devant une décision à prendre, essayer d'imaginer la position qu'il aurait prise, est certainement un excellent guide.



Pierre Alby, ingénieur-élève
(C) Photo collections ENSMP


A droite sur la photo, Pierre Alby en 1985
(C) Photo collections ENSMP