Louis Charles Albert DHERSE (1906-1994)


Louis Dherse, élève de Polytechnique
(C) Photo Collections Ecole polytechnique

Polytechnique (promotion 1924), corps des Ponts et chaussées. Licencié es sciences.
Fils d'Auguste DHERSE, intendant général, et de Mme née Mariette FLAMARD.
Marié en 1932 à Evelyne COLONNA-CECCALDI.
Père de Jean-Loup Marie DHERSE (1933-2010 ; X 1952 corps des mines, qui fut directeur à Pechiney et vice-président de la Banque Mondiale), Camille (épouse de Bruno de VITRY d'AVAUCOURT).


D'après Henri Malcor : Un héritier des maîtres de forge, par Philippe Mioche et Jacques Roux, Editions du CNRS, 1988, Paris.

Né en 1906, comme Henri Malcor ; polytechnicien, ingénieur des Ponts et Chaussées en 1929. Cet ingénieur débute sa carrière dans la construction des moyens de communication du Sud-marocain ; il sert ensuite au Port Autonome du Havre. Après avoir servi aux Chemins de fer de l'Ouest (1933) puis à la SNCF (1937), il est, en 1940, directeur général de Poliet et Chausson, puis de l'Union des producteurs d'électricité des Pyrénées occidentales. Après sa nationalisation, il fait un bref séjour à EDF.

Il rentre à Sollac qu'il développe grace au Plan Marshall, dont il sera directeur général (1959-1973) et devient président de Wendel-Sidelor (1971) à la suite de Henri de WENDEL. Il est l'un des premiers à comprendre qu'il faut de grandes usines maritimes, et un peu à contre-courant il conçoit Fos, l'une des meilleures usines mondiales, après Sollac ce sera Sollmer, ces deux sociétés seront les piliers d'Usinor-Sacilor.

Il a aussi présidé la FNEGE de 1968 à 1970.

Officier de la L. H.


La Jaune et la Rouge, 1995. Biographie par Claude Ink (X 1949)

Louis Dherse s'est éteint le 18 mai 1994. Il avait l'habitude de me dire que dans une vie, en particulier professionnelle, on était pour une large part ce que son ou ses maîtres avaient fait de vous.

Il fut sans aucun doute l'un de mes maîtres et je suis heureux de rappeler ce qu'il représenta pour de nombreux jeunes ingénieurs, polytechniciens ou non.

Entré à l'Ecole major de la promotion 1924, il en sortait premier des Ponts, après deux Mineurs, eux aussi prestigieux, Louis Armand et Henri Malcor.

Il pouvait être nommé à Quimper (c'était le poste le plus couru) mais il préféra aller à Marrakech, vivre la grande et parfois dangereuse aventure de la construction des moyens de communication du Sud marocain.

Nommé ensuite au Port du Havre, il s'y révéla à nouveau un infatigable bâtisseur.

Mais c'est dans les Chemins de Fer, tout particulièrement dans l'Ouest, qu'il commença à montrer ses extraordinaires qualités de rassembleur et d'entraîneur d'hommes. Il le fit avec ce grand patron qu'était Dautry (c'est à lui évidemment qu'il pensait quand il me parlait des maîtres).

Il n'a jamais beaucoup aimé les nationalisations et se retrouve chez Poliet pour y mener une modernisation à marche forcée.

Enfin l'électricité privée profite de ses talents d'organisateur.

Et c'est la fin de la guerre. Il va être alors dans la poignée d'industriels entrés dans la carrière au moment de la Crise, malheureux de l'état désastreux de l'industrie nationale et qui, par leur enthousiasme, vont permettre à toute une génération de jeunes Français de reconstruire le pays et rendre possible les trente glorieuses.

Le plan Marshall donne à l'époque les moyens de moderniser, entre autres la sidérurgie lorraine, et il est appelé à fédérer autour d'une création ex nihilo (Sollac) tous les producteurs lorrains de produits plats en acier (tôles pour automobiles, produits blancs et bruns, bâtiment et fer blanc).

En quelques années, dans cette province industrielle que le journaliste Raymond Cartier appelle le "Texas lorrain", il fera de Sollac une des sociétés sidérurgiques européennes les plus efficaces et les plus prospères.

Et surtout il saura être capable d'attirer à lui pour cette aventure des milliers de jeunes. Il a en effet ce don rare de faire partager sa passion, de découvrir et de convaincre les meilleurs et d'en obtenir le maximum.

Mais il sera parmi les premiers à comprendre que l'avenir de la Lorraine, s'il peut rester industriel, n'est plus dans la fabrication primaire de l'acier. Et qu'il faut de grandes usines maritimes.

Sous la pression de ses actionnaires, il va cependant accepter de moderniser d'abord la production lorraine de produits longs en acier (ronds à béton, fil machine, poutrelles) et faire ce qui est sans doute sa seule erreur stratégique, construire une grande usine consommant de la fonte et donc du minerai, alors que pour ces produits l'acier électrique produit dans de petites unités va prendre la plus grande partie du marché.

Cette usine devra être arrêtée quinze ans plus tard et l'usine littorale pour produits plats à laquelle il rêvait prendra du retard.

Il va cependant contre vents et marées et un peu à contre-courant la concevoir et construire à Fos ce qui est encore aujourd'hui l'une des meilleures usines mondiales. C'est après Sollac l'aventure de Solmer avec le même enthousiasme et le même appel à de jeunes et vigoureux talents. Mon camarade Durand-Rival, qui a conduit l'opération sur place à Marseille, peut en témoigner.

Il prendra sa retraite au moment où la sidérurgie entre dans une de ses crises les plus graves mais, cette crise passée et une autre plus récente absorbée, ses créations resteront parmi les piliers les plus solides du nouvel ensemble Usinor Sacilor.

Ce dont se souviennent ceux qui ont travaillé avec lui (et j'ai eu cet honneur et celui de poursuivre sa tâche à la tête de Sollac et de Solmer) c'est, en dehors de ses qualités de bâtisseur, son profond respect des hommes (le respect d'un chrétien sincère), son refus de toute compromission et sa ténacité.

Un grand industrie] nous a quittés.

Claude INK (X 49),
Délégué général de la Fondation de l'Ecole polytechnique