Jean FLEURY (1901-1985)


Jean Fleury, élève de Polytechnique
(C) Photo Collections Ecole polytechnique

Polytechnique (promotion 1921), ingénieur civil des mines (Paris, promotion 1923). Frère de Jacques Franck Robert Julien Henri Fleury (1899-1963 ; X 1921).


La Jaune et la Rouge, Août/Septembre 1987.

Jean Fleury (dans la Résistance Grec, Latin I et Panier) est mort le 20 octobre 1985. Il fut un grand résistant, responsable pendant l'occupation des transmissions clandestines entre la France et l'Angleterre. Nous avons emprunté à Gens de la lune, revue de l'Amicale des réseaux Action de la France combattante (n° 236) l'article qui suit et qui résume très sobrement sa carrière héroïque.

JEAN FLEURY est né le 8 juillet 1901 à Bourg-la-Reine (Seine). Ancien élève de l'École polytechnique, ingénieur civil des Mines, il est ingénieur en chef de Radio-Paris et chef des services techniques de Radio-France jusqu'en 1939.

En février 1939 il se rend en Indochine pour y créer la première station de radiodiffusion française, Radio-Saïgon.

Il rentre en France au mois d'août. Sur le chemin du retour la mobilisation générale le surprend au Liban, à Beyrouth, où il est mobilisé sur place comme commandant des transmissions radio des Troupes du Levant.

Après l'Armistice il revient en France et recherche immédiatement des contacts avec la Résistance, notamment avec Honoré d'Estienne d'Orves, qui avait ouvert la première liaison radioélectrique entre la France et la Grande-Bretagne le 25 décembre 1940, mais d'Estienne d'Orves est arrêté le 21 Janvier 1941 ; il est fusillé et son réseau anéanti.

En 1941 Jean Fleury s'engage comme agent P2 dans le réseau Phratrie. Il prend contact en 1942 avec le colonel Rémy à Paris et avec Emmanuel d'Astier de la Vigerie et Raymond et Lucie Aubrac à Lyon.

Aux uns et aux autres se posait le problème de la radio, ce qui l'amène à fonder à Lyon un réseau de transmissions qu'il baptise Electre et pour lequel il élabore de nouvelles techniques de transmissions clandestines qui se révèlent très efficaces.

Comme dans les autres réseaux les pertes sont considérables et donc le trafic assez incertain, il est chargé par Londres d'organiser, sur le modèle d'Electre, des centres de transmissions indépendants et il est nommé à cet effet inspecteur national des transmissions de l'Action.

L'ensemble de ces mesures donne des résultats surprenants. Les pertes en hommes diminuent considérablement : de 75 % en moyenne en 1941/1942 elles passent à 25% en 1943/1944. Parallèlement le trafic augmente : la moyenne mensuelle des télégrammes expédiés était de 225 pendant le 1er semestre 1943, 510 pendant le 2e semestre 1943... 2376 télégrammes sont expédiés en juin 1944 et 3472 en juillet 1944.

En septembre 1943, Jean Fleury se rend de nouveau à Londres où il est nommé chef des renseignements du B.C.R.A. (Bureau Central des Renseignements et d'Action). Il crée pour les Renseignements des centres de transmissions clandestines sur le même modèle que ceux de l'Action.

Lorsque le général Koenig est chargé du commandement des Forces Françaises de l'Intérieur, Jean Fleury est nommé chef du 3e Bureau de son état-major.

Il termine la guerre avec le grade de colonel. Il est décoré de la Croix de Guerre 1939-1945 avec deux palmes et de la Médaille de la Résistance. Il est officier de la Légion d'honneur et a été nommé Officier dans l'ordre de l'Empire Britannique.

A son retour en France Jean Fleury prend la direction technique de la DGER. Lorsque la paix est signée il rentre dans l'industrie où il est successivement directeur de la Société Terrazolith et de la Société des Accumulateurs et Chargeurs Dary à Courbevoie.

En 1947 il est élu conseiller municipal de Neuilly-sur-Seine et il deviendra plus tard le 1er adjoint au maire, Achille Peretti. En 1951/1952 il est sénateur de la Seine et de 1952 à 1958 conseiller de l'Union Française, dont il est le vice-président la dernière année de son mandat.

A l'Union Française il s'attache aux problèmes posés par le développement des pays d'outre-mer et ses réflexions l'amènent à l'idée que ce développement doit passer d'abord par celui de la petite industrie, qui utilise les ressources locales, beaucoup de main-d'oeuvre et qui ne nécessite pas une infrastructure technologique avancée.

C'est alors qu'il décide de créer lui-même à Alger une fabrique d'accumulateurs électriques pour laquelle son expérience de l'usine de Courbevoie lui permet d'adapter sur le terrain sa conception politique du développement. Cette société a continué de fonctionner bien au-delà de l'indépendance de l'Algérie et a été l'une des dernières sociétés françaises à être nationalisée.

Parallèlement Jean Fleury poursuit sa carrière politique et il devient sénateur des Hauts-de-Seine en 1962 en qualité de suppléant de Jacques Marette, nommé ministre des Postes et Télécommunications.

Vice-président de la commission sénatoriale des affaires culturelles, il est membre du Conseil de surveillance de la Radiodiffusion-Télévision Française et représentant du Sénat auprès du ministre chargé de l'Information (1964), membre de la mission sénatoriale de l'ORTF (1971) membre de la délégation parlementaire pour la Radiodiffusion-Télévision Française (1974).

En 1967 il est élu conseiller général des Hauts-de-Seine, puis conseiller régional depuis la création du Conseil régional.

Ayant décidé de se retirer, il ne sollicite pas le renouvellement de ses différents mandats : en 1973 celui de conseiller général, en 1977 celui de conseiller municipal et en 1978 celui de sénateur.

Il s'installe à la campagne, près d'Arpajon en Essonne. Vice-président de l'Amicale des Réseaux Action de la France Combattante, il se consacre à l'histoire de la radio clandestine pendant la dernière guerre.

Le 20 octobre 1985 il meurt d'une crise cardiaque.

Il est inhumé le 23 octobre au cimetière de La Norville, près d'Arpajon. Lors de la cérémonie religieuse, l'ancien ministre Bourges-Maunoury et Mme Lucie Aubrac ont évoqué avec émotion la brillante carrière de ce grand résistant qui a toujours suivi l'itinéraire du général De Gaulle.

On ne peut mieux évoquer le souvenir que laisse Jean Fleury que de citer cette lettre écrite par l'un de ses amis à son épouse : " Il y a une contagion du Bien comme il y a une contagion du Mal. Lorsque quelqu'un comme Jean Fleury laisse dans son époque une trace aussi claire, due à la rare conjonction de l'intelligence, du courage et de la droiture, il est certain que cette clarté-là diffuse autour d'elle ".


MINES Revue des Ingénieurs, mars 1986

Il a tenu trop de place dans la Résistance et dans le monde politique pour que nous ne retracions pas les étapes de sa vie.

Ancien élève de l'Ecole polytechnique et ingénieur civil des Mines, il fut ingénieur en chef de Radio-Paris (1927-1936), puis chef des services techniques de Radio-France (1936-1939) et créa en 1939 le poste de Radio-Saigon. Engagé dans la Résistance dès 1941, il fut successivement agent du réseau Phratrie, chef du réseau de transmissions Electre, inspecteur national des Transmissions de l'Action, chef de la section Renseignements du BCRA à Londres, puis chef du IIIe Bureau de l'Etat-Major du général Koënig, lorsque celui-ci avait été chargé du commandement des Forces Françaises de l'Intérieur. Il termina la guerre avec le grade de colonel.

Conseiller municipal de Neuilly-sur-Seine depuis 1947, puis premier adjoint au maire Achille PERETTI depuis 1958, il fut conseiller général du canton de Neuilly-Nord de 1967 à 1973, sénateur de la Seine (1951-1952), conseiller de l'Union française (1952-1958), vice-président de l'Assemblée de l'Union française (1957-1958).

Jean FLEURY a toujours suivi l'itinéraire politique du Général de Gaulle; sénateur UNR de la Seine (mai 1962-septembre 1968), il fut réélu sénateur des Hauts-de-Seine (octobre 1968-octobre 1977). Inscrit au Sénat au groupe de l'UDR, il fut vice-président de la commission des Affaires culturelles depuis 1971 et membre de la délégation parlementaire pour la Radio-Diffusion Télévision française depuis 1974.

Parallèlement à son activité politique, Jean FLEURY continuait d'exercer une activité professionnelle: il créa notamment en 1952, la Société algérienne des accumulateurs électriques à Alger nationalisée en 1974.

Officier de la Légion d'honneur, officier de l'Ordre de l'Empire britannique (division militaire), titulaire de la Croix de Guerre 39-45 et de la Médaille de la Résistance, Jean FLEURY était vice-président de l'Amicale des Réseaux Action de la France Combattante.

J. LE BOURGEOIS (Ancien élève de l'Ecole des Mines de Paris, promotion 1923)



Jacques Fleury (1899-1963 ; X 1921), frère aîné et camarade de promotion de Jean à Polytechnique
(C) Photo Collections Ecole polytechnique