René Michel Marie LHOPITAL (1885-1960)

Né le 8/12/1885 à Paris. Fils de Michel LHOPITAL et de Marie GILLART. Marié en 1916 à Marguerite LAMOTTE. Décédé le 21 octobre 1960.

Ancien élève de l'Ecole des mines de Paris (promotion 1907). Ingénieur civil des mines.

Grand-Croix de la Légion d'honneur en octobre 1958.


La Revue des Ingénieurs, décembre 1953 :

... La plaque de Grand Officier du Colonel René LHOPITAL (EMP 1907). Nous savons tous ce que représente notre camarade : sa poitrine, plus que toute autre, porte l'émouvant témoignage de sa participation à la moisson de gloire de notre Pays et aux souffrance de la Résistance ; sa foi inébranlable lui a permis de survivre aux horreurs des camp d'extermination. C'est une fierté pour notre Ecole que de revendiquer comme l'un des siens ce vivant symbole de l'Honneur.

La Revue des Ingénieurs, novembre 1953 :

Resté dans l'armée active, il obtient, de 1914 à 1918, cinq citations. Choisi en 1919 comme officier d'ordonnance par le Maréchal Foch, il l'accompagna souvent en mission à l'étranger. A sa mort en 1929, il se consacre au mouvement des Scouts de France ; il en est le commissaire général [1932-1934] et l'animateur jusqu'en 1936. Mobilisé en 1939, il revient à Paris pour fonder un mouvement de résistance [L'Armée des Volontaires]. Arrêté, il est déporté en 1942, jugé par le Tribunal du Peuple [mai 1943] et destiné à disparaître. C'est [à Sachsenhausen qu'il est interné, puis à] Buchenwald qu'il est libéré en 1944, ayant maigri de 40 kilos. S'il revient, c'est grâce à son moral et à sa Foi.

Il est l'un des fondateurs des Petits Chanteurs à la Croix de Bois.

Prisonnier des allemands une première fois en 1941 [prison du Cherche-Midi], arrêté à nouveau le 24/1/1942, il est incarcéré au camp d'Inzert, puis à Trêves, enfin dans les camps de Sachsen-Oranienburg puis de Buchenwald.

De gauche à droite : René Lhopital, Roger Millot, Pierre Assié (1958)

Voir aussi : Louis Fontaine, "La mémoire du scoutisme" ; René Lhopital fut blessé lors de manifestations le 6/2/1934 et participa à l'Association des blessés du 6 février 1934 créée par Darquier de Pellepoix.


Le texte qui suit a été publié en 1964 dans le numéro du Bulletin de l'association des anciens élèves de l'Ecole des mines de Paris, à l'occasion du centenaire de la création de l'Association :

Le colonel Lhopital

par René Alquier et Roger Millot

Le Colonel René LHOPITAL (P 1907), combattant des deux guerres et résistant, officier d'ordonnance du Maréchal FOCH, se consacra à la formation de chefs par le Scoutisme.

René LHOPITAL a la vocation militaire. Entré à l'Ecole des mines en 1907, il fait son service pendant trois ans comme sous-lieutenant d'Artillerie. Il participe à la bataille de la Marne, est grièvement blessé et cinq fois cité. Il instruit les officiers d'Artillerie de l'Armée américaine en 1918 et passe au Bureau Franco-Américain de l'Etat major de l'Armée.

Il représente la France dans la mission envoyée, pour la Conférence de la Paix, en Europe Centrale sous la présidence du général SMUTS. En décembre 1919 il est choisi par le Maréchal Foch pour être son officier d'ordonnance. Il l'accompagne dans ses déplacements à Londres, à Bruxelles, lors des nombreuses réunions interalliées, comme aussi en Pologne et en Tchécoslovaquie.

A la mort du Maréchal, en mars 1929, il se fait mettre en disponibilité pour se consacrer au mouvement des « Scouts de France » qu'il aidait depuis 1925.

Il leur apporte son dynamisme, ses talents de meneur de jeunes — n'a-t-il pas lancé les « Petits Chanteurs a la Croix de Bois » — Il est nommé Commissaire Général des « Scouts de France » et dirige ce mouvement jusqu'en 1936 pour former les Chefs qui prendront la relève de ceux que la guerre a fauchés. Combien d'hommes doivent à « LHOPI » la confirmation de leur personnalité et de leur vocation au service du pays.

Le rapprochement Franco-Allemand par la jeunesse le préoccupe mais une visite à Berlin au Chancelier Hitler lui fait perdre tout espoir : il donne sa démission du Comité France-Allemagne, les nazis lui en voudront à mort.

Rappelé en 1938 puis en 1939, il fait campagne avec la 6me DINA puis à la 1re Armée, et reçoit la croix de guerre.

Revenu à Paris après l'armistice de 1940, il fonde presque immédiatement le mouvement de résistance «Armée Volontaire». Il est arrêté et fait deux mois de prison au Cherche-Midi. Il est à nouveau repris. Il sait qu'on le destine au jugement du Tribunal du Peuple, c'est-à-dire à la mort. Pendant son interrogatoire, il profite de quelques secondes d'inattention pour subtiliser la pièce qui le condamne : un tract, le seul trouvé chez lui. De Fresnes il est déporté en Allemagne, le 9 octobre 1942, sous l'étiquette N.N. (Nuit et Brouillard), indicatif d'un arrêt de mort. En cellule au secret, à la prison de Wittlich, il est seul pendant douze mois. Sa foi religieuse et sa volonté de vivre ne cesseront de le soutenir. Condamné par le Tribunal du Peuple, il est transféré dans les camps de la mort d'Inzert, de Sachsenhausen-Oranienburg et Buchenwald. La plupart de ses camarades meurent ; il tient bon, ne cessant de prier et d'espérer. L'ami qui le délivrera, un officier américain, hésite à le reconnaître tant il est squelettique. Il est rapatrié par avion le 19 août 1945. Malgré son degré élevé d'invalidité il reprend peu à peu une vie normale et refait son visage, retrouvant une extraordinaire jeunesse.

Il s'intéresse à diverses Associations d'anciens combattants et déportés. Colonel en retraite, Grand officier de la Légion d'Honneur, il préside l'Association Nationale des Officiers agents de liaison et interprètes militaires. Il est membre de l'UNOR, du Conseil National du Mouvement Européen, du Comité exécutif de l'Alliance France-Grande-Bretagne, président de l'Alliance Atlantique des Anciens Combattants. Il est fait Grand Croix de la Légion d'Honneur. Qui n'a remarqué, au cours de nos galas, ses trente décorations françaises et étrangères dont nos deux croix de guerre, la D.S.M. américaine et la R.V.O. britannique.

Le Colonel Lhopital se savait condamné, son corps ayant été usé par l'épreuve des camps de la mort. Il gardait néanmoins son caractère égal et affectueux, sa disponibilité pour tout effort en faveur de la Paix, son amour des jeunes. Au service funèbre de l'Association en 1959, il nous disait en souriant : « je ne serai pas au prochain... » Il était « prêt » lorsque la mort si souvent différée, l'a frappé. Notre camarade a droit, à de nombreux titres, à notre fidélité mais ce que nous ne pourrons, non plus, oublier, c'est son amitié, simple et cordiale.

Le Colonel Lhopital a fait honneur à notre Ecole.