René Charles Louis MASSÉ (1868-1928)


René Massé, élève de Polytechnique
(C) Photo Collections Ecole polytechnique


Massé, élève de l'Ecole des Mines de Paris
(C) Photo collections ENSMP

Fils de Charles Eugène MASSE, économe au lycée Chaptal, et de Marie Louise BEYERLÉ.

Ancien élève de l'Ecole polytechnique (promotion 1887, entré classé 153 et sorti classé 44), et de l'Ecole des mines de Paris (promotion 1889). Ingénieur civil des mines.


Publié dans le Bulletin de l'Association des anciens élèves de l'Ecole des mines de Paris, décembre 1926

Le 10 Novembre dernier, notre éminent camarade René Masse est décédé, soudainement frappé à l'âge de 59 ans, en pleine vigueur.

Né en 1868, il était entré à l'École Polytechnique en 1857, puis à l'École des Mines d'où il est sorti en 1892, major de la promotion. Élevé à Paris, il fit toute sa carrière à Paris. Il fut d'abord attaché à la Compagnie Parisienne du Gaz, de 1892 à 1900 et consacra dès lors une grande partie de son activité aux entreprises de gaz et par extension de produits chimiques en suivant et même en guidant leur évolution. Il participa, en effet, aux grandes affaires de cette industrie dont plusieurs ont été créées ou dirigées par lui. C'est ainsi qu'il a assumé en 1905 la Direction de la Société d'Éclairage, Chauffage et Force Motrice au Gaz de la Banlieue, qu'il assura la consommation toujours croissante de la Banlieue Parisienne, de telle façon qu'il fut successivement appelé aux fonctions d'Administrateur, de Vice-Président et de Directeur Général de cette Société. Le remarquable groupe d'usines de Gennevilliers est son œuvre.

Sa compétence l'avait fait désigner comme Président du Syndicat Professionnel de l'Industrie du Gaz, Vice-Président de la Société Technique du Gaz en France, Vice-Président du Comité Central des Cokes, Délégué du Comité français au Comité International d'Éclairage et Chauffage par le Gaz, Administrateur de la Compagnie Générale du Gaz pour la France et l'Étranger, etc.

Au cours de la guerre il avait été chargé par le Gouvernement d'organiser les services destinés à assurer le fonctionnement des usines à Gaz, leur approvisionnement, la répartition des charbons, celle des cokes, etc.

En l'occurence, il vit et fit voir que des mesures énergiques et immédiates devaient corriger notre infériorité en produits chimiques, vis-à-vis de l'Allemagne. Avec l'appui du gouvernement dont il était un conseiller écouté, il fonda la Compagnie Nationale des Matières Colorantes, entreprise difficile et lourde. Il en fut le premier président et la conduisit au millieu de réelles difficultés jusqu'à la fusion avec les Établissements Kuhlmann pour réaliser un ensemble de premier ordre.

Mais son exceptionnelle activité ne se limitait pas au domaine où il s'était acquis un rôle de premier plan. Il se distingua aussi comme constructeur, comme mineur et comme économiste et financier.

Comme mineur il avait notamment montré vers 1900 toute l'importance et le parti à tirer du gisement, avant lui mal connu, des Minerais de Fer de la Normandie et suscité par là de fructueuses initiatives.

Comme économiste il produisit récemment une œuvre magistrale sous le titre « La Production des Richesses », classique et moderne à la fois, d'une érudition aisée dans laquelle nos camarades ont retrouvé beaucoup de principes auxquels ils ont foi. Cette œuvre couronne une série d'ouvrages plus spécifiquement techniques : « Les Pompes à l'Exposition de 1900 » composé à l'instigation de M. Haton de la Goupillière, « Étude sur les Mines de fer de la Normandie » parue dans les Annales des Mines, « Le Gaz », en 3 volumes remis à jour par « Les Procédés modernes de l'Industrie du Gaz », 2 volumes en collaboration avec M. A. Saril. Il s'y ajoute des conférences de vulgarisation de l'Industrie du Gaz ou d'Economie Industrielle, l'Organisation Economique de la Production Industrielle et l'Utilisation Rationnelle du Charbon, etc.

Comme homme d'affaires, il s'est montré organisateur méthodique autant qu'animateur diligent. Nombreuses sont les Sociétés qui lui doivent le jour ou le soutien de son incontestable autorité.

La Chambre de Commerce de Paris lui avait fait l'honneur de le choisir comme trésorier; le gouvernement lui avait conféré la dignité de Commandeur de la Légion d'Honneur au titre du Travail de reconnaissance de l'ensemble remarquable des institutions en solidarité de la Société d'Éclairage, Chauffage et Force Motrice.

René Masse était un grand chef, sachant se faire obéir sans se départir de sa courtoisie ni de son affabilité naturelles, qui retenaient la sympathie, comme en témoigna l'affluence venue pour rendre à sa mémoire un suprême hommage. L'église de la Trinité fût trop petite, en effet, pour contenir la foule qui vint à ses obsèques.

Notre Association a perdu en lui un camarade distingué, il fut de ceux qui donnent un lustre brillant à notre chère École.

Et, puisque par suite d'une volonté formellement exprimée, aucun discours ne fût prononcé sur sa tombe, qu'il nous soit du moins permis d'apporter ici, le témoignage de reconnaissance qui lui est dû pour les nombreux services qu'il rendit à ses camarades et du regret que cause parmi eux sa disparition prématurée.

Nous prions Madame Masse et ses chers enfants d'agréer l'expression de nos condoléances et de trouver un réconfort dans la pensée que le souvenir du cher défunt brillera dans notre mémoire d'un éclat bien vif et bien durable.

P. Pillon (Ancien élève de l'Ecole des mines, promotion 1889).