Louis Joseph Alfred SOUBEIRAN (1855-1936)


Soubeiran, élève de l'Ecole des Mines de Paris
(C) Photo collections ENSMP

Né le 6/7/1855 à Tournon (Ardèche). Fils de Charles Léon SOUBÉIRAN, avoué, et de Marie Louise SUFFET. Frère de Charles Marie SOUBEIRAN, officier de cavalerie (1853-1915).

Le nom est parfois orthographié "SOUBEYRAND" ou "SOUBEYRAN" voire "DE SOUBEYRAN", la particule "de" ayant été adjointe au nom de famille des ancêtres avant la Révolution française ; d'autres branches de la famille s"appellent "de Soubeyran de Saint Prix" ou bien "de Soubeyran d'Auteroche".

Ancien élève de l'Ecole polytechnique (d'abord admis dans la promotion 1873, il démissionne le 14/11/1874 et est réadmis dans la promotion 1875, entré classé 1 et sorti classé 2 sur 254 élèves), et de l'Ecole des Mines de Paris (promotion 1878). Corps des mines. Il avait déja été admis à l'Ecole polytechnique en 1873 mais avait préféré démissionner (14/11/1874).

Après sa sortie de l'Ecole des mines, il est successivement affecté au secrétariat du Conseil général des mines, puis chargé des sous-arrondissements minéralogiques de Valenciennes, d'Arras et de Lille (1881-1889).

Soubeiran succéda à Olry comme sous-directeur et inspecteur des études de l'Institut Industriel du Nord (1885-1891), où il enseigna par ailleurs la mécanique.

En 1889, il devient ingénieur conseil des Mines de Bruay, puis aussi de l'Escarpelle (1891), ainsi que de la société des Mines de Blanzy (mines de Marles, 1899) et de la Société des ciments français (à Boulogne sur mer).

Dans les années suivantes, il devient administrateur de plusieurs sociétés minières : Mines de houille de Ligny-les-Aire, de Bruay, des Houillères du Nord d'Alais. Il devient ensuite administrateur des Mines de Campagnac.

En 1908, il démissionne de l'Administration et termine ainsi sa carrière administrative comme ingénieur en chef des mines. Il succède à Clément de Castelnau comme administrateur des Mines de la Grand'Combe.



Alfred Soubéiran, élève de Polytechnique
(C) Photo Collections Ecole polytechnique


Publié dans Bulletin de l'Asssociation des Anciens élèves de l'Ecole des Mines de Paris, 1936 :

Discours de M. de Launay,
Président des Mines de la Grand'Combe
lors de l'enterrement de Alfred de Soubeyran

Au nom de la Compagnie de la Grand'Combe, je viens apporter un dernier hommage à un vieil ami qui fut, pendant quinze ans, mon fidèle collaborateur.

Bien qu'Alfred de Soubeyran m'ait précédé de quatre ans dans la vie et ait, par conséquent, passé avant moi par l'Ecole Polytechnique et par l'Ecole des Mines, nous nous étions connus dans notre jeunesse et j'ai été heureux quand, longtemps après, je l'ai retrouvé à la Grand'Combe avec un autre ami, Fèvre, que la mort nous a, lui aussi, enlevé récemment.

On vous dira tout à l'heure, bien mieux que je ne pourrais le faire, ce que fut la brillante carrière de Soubeyran dans le Pas-de-Calais. Je me bornerai à vous rappeler quelle a été sa part dans les destinées de la Grand'Combe. Il y est entré comme ingénieur délégué en 1907. Puis il fut administrateur-délégué de 1909 à 1913. Enfin, à partir de 1913, comme il n'avait pas voulu rester administrateur, il est devenu, jusqu'en 1935, notre ingénieur-conseil.

Outre son expérience technique acquise dans d'autres régions minières, Alfred de Soubeyran nous apportait un don particulier d'organisation commerciale. C'est à lui que la Grand'Combe doit la forte armature commerciale dont elle a bénéficié à travers des phases difficiles. C'est lui aussi qui a poussé de bonne heure notre Compagnie à utiliser ses combustibles inférieurs sous forme de vente d'énergie électrique. Il a fondé en 1909 notre filiale, la Société Grand'Combienne d'Eclairage et d'Energie. Toutes les fois qu'il se présentait à nous une question un peu délicate, nous nous empressions de recourir à sa grande compétence doublée d'une extrême finesse et d'un sens critique très développé.

Tous ceux qui l'ont connu ont pu apprécier sa droiture, sa conscience poussée jusqu'au scrupule, son caractère toujours calme et égal, son extrême affabilité et son admirable courtoisie, en même temps que sa puissance de travail et sa rapidité de compréhension; très attaché au progrès des œuvres sociales, il se montrait soucieux du bien-être physique et moral de l'ouvrier et il savait lui parler de manière à se faire entendre.

Pendant quinze ans que nous nous sommes assis côte à côte, je puis dire qu'il n'y a jamais eu entre nous le moindre désaccord, tant il mettait de tact et de délicatesse à exprimer, à soutenir des opinions et des critiques qui étaient toujours judicieuses.

Nous garderons de lui le plus vivant souvenir, et c'est avec émotion que je lui dis adieu en adressant à sa famille l'expression de notre profonde et respectueuse sympathie.

Discours de M. Didier,
Directeur Général des Mines de Bruay

Mesdames, Messieurs,

C'est avec une profonde émotion que je viens - au nom de la Compagnie des Mines de Bruay - adresser un suprême adieu à M. DE SOUBEYRAN qui fut son Ingénieur-Conseil du 1er mai 1889 au 31 décembre 1932 — c'est-à-dire pendant près de 44 ans, et l'un de ses administrateurs pendant 19 ans.

Ne à Tournon en 1855, M. DE SOUBEYRAN fit de très brillantes études dont la première conclusion fut, en 1875, son admission à l'Ecole Polytechnique avec le n° 1 sur 267 élèves reçus; deux ans plus tard il en sortit élève Ingénieur au corps des Mines.

Fatigué par plusieurs années d'un travail trop intense M. DE SOUBEYRAN demanda et obtint un congé d'un an. En novembre 1878 il entra à l'Ecole Supérieure des Mines, il en sortit premier en juillet 1881 et fut nommé Ingénieur ordinaire des Mines de troisième classe.

Attaché d'abord au Secrétariat du Conseil général des Mines, il fut, en octobre 1882, affecté au sous-arrondissment minéralogique de Valenciennes puis, en juin 1883, envoyé à Arras. Deux années plus tard — en 1885 — M. de SOUBEYRAN était nommé à Lille et autorisé à accepter en même temps le poste de sous-directeur de l'Institut Industriel. L'année suivante, il devenait directeur de cette Ecole, poste qu'il occupa jusqu'en décembre 1891.

Cependant les fonctions d'Ingénieur du Contrôle à Lille ne satisfaisaient pas M. de Soubeyran, qui avait besoin de plus d'activité et de plus de liberté et il fut, en mai 1889, placé — sur sa demande — en service détaché et autorisé à entrer aux Mines de Bruay comme Ingénieur-Conseil.

Il restait, en outre, chargé de l'étude de la topographie souterraine du bassin houiller du Pas-de-Calais, travail qui lui avait été confié en 1884, quand il était au contrôle d'Arras.

En janvier 1892, M. de Soubeyran demandait sa mise à la retraite pour se consacrer entièrement à l'industrie où il devait bientôt prendre une place prépondérante; en effet, sa remarquable intelligence, la vivacité de son esprit, la clarté de son jugement, son optimisme raisonné et sa grande largeur de vue ne tardèrent pas à être remarqués de tous ceux qui l'approchaient. Aussi plusieurs Sociétés cherchèrent-elles — à l'exemple de Bruay — à se l'attacher : soit comme Ingénieur-Conseil, soit comme Administrateur. Ce fut le cas des Mines de l'Escarpelle, de Blanzy, de la Grand'Combe, de Guergour et aussi de la Société des Ciments français, de la Société des fonçages de puits, de la Société Béthunoise d'Eclairage et d'Energie... et de plusieurs autres affaires.

La période de 1892 à 1914 marque l'apogée de la carrière industrielle de M. de Soubeyran. En 1895 fut publiée la première partie de son très important travail sur la topographie souterraine du Bassin houiller du Pas-de-Calais, elle concernait les concessions de l'Est du Bassin. En 1898 parut la deuxième partie relative aux concessions de l'Ouest.

Ce travail très précis et très documenté valut à M. DE SOUBEYRAN d'être nommé Ingénieur en chef à dater du 1er mai 1898 et deux ans plus tard il recevait un « grand prix » à l'occasion de l'Exposition Universelle de 1900. Enfin, en 1901, il était nommé chevalier de la Légion d'honneur et promu officier au commencement de 1914.

La guerre marque le début des dures épreuves — M. et Mme de Soubeyran sont inquiets pour leur fils unique qui est aviateur. En août 1917 ce jeune homme meurt pour la France; c'est un coup terrible pour les parents et M. de Soubeyran ne s'en est jamais complètement remis.

Un deuxième coup semblable lui est porté en août 1928 par la mort de son épouse.

Notre Ingénieur-Conseil, qui est alors âgé de 73 ans, pourra-t-il surmonter son chagrin? C'est peu probable s'il reste seul. Heureusement quelqu'un de la famille s'est dévoué, l'a soigné, a veillé sur lui et lui a rendu moins pénibles ses dernières années.

Je garderai toujours le souvenir du brillant Ingénieur qu'était M. de Soubeyran, dont j'admirais l'optimisme, l'amabilité et l'extrême bonté. Je suis fier d'avoir été son élève. Travailler avec un tel chef était un véritable plaisir car il comprenait promptement l'exposé qui lui était fait et les solutions qu'il conseillait étaient toujours les plus rationnelles.

Bien qu'ayant cessé depuis janvier 1933 ses fonctions d'Ingénieur-Conseil, M. de Soubeyran, qui avait gardé de Bruay le meilleur souvenir, était heureux d'être tenu régulièrement au courant de la marche des, travaux de la Compagnie et il m'avait promis d'aller à Bruay, le mois prochain, voir les installations qui ont été faites depuis sa dernière visite — hélas! la mort est venue anéantir ces projets.

Au nom de la Compagnie des Mines de Bruay, je prie Mme Bernet, ainsi que les neveux et nièces de M. de Soubeyran d'agréer l'expression de nos bien vives condoléances et de notre douloureuse sympathie.

Adieu, cher Maître, adieu.