Baron Antoine-Marie HÉRON DE VILLEFOSSE (1774-1852)

Ancien élève de l'Ecole polytechnique (promotion 1794) et de l'Ecole des Mines de Paris (sorti en 1801). Corps des mines.

Fils de Jean Baptiste Claude HÉRON de la THUILLERIE, conseiller du roi, receveur général des consignations de ses conseils au parlement de Paris, et de Françoise Charlotte HÉRON de COURGY. Marié en 1810 à Angélique Joséphine Louise CHAUMONT de la MILLIÈRE. 3 enfants : Antoine Félix (1814-1887), avocat ; Etienne Marie, archiviste ; Pierre Marc René (1826-1870).



Antoine-Marie Héron de Villefosse naquit à Paris le 21 juin 1774 dans une de ces familles de la vieille bourgeoisie parisienne dont l'arbre généalogique embrassait 4 à 5 siècles. Il était apparenté aux Héron d'Argeville, aux Héron de Courgy, aux Héron de la Thuillerie, ainsi qu'à d'autres Héron de Villefosse dont il n'était pas le descendant direct. Son parrain Antoine-Louis Chaumont de la Millière, l'intendant général des ponts et chaussées et des mines, à qui Louis XVI devait offrir en vain le contrôle général des finances à la place de Calonne, était, par sa mère, fille du receveur général de la Champagne, titulaire de la seigneurie de Villefosse ; il voulut que ce nom revécût avec son filleul. Le père du jeune Héron, receveur général des consignations au parlement de Paris, décéda en 1779. Ses oncles maternels, qui avaient été sous Louis XVI contrôleurs généraux des maisons du roi et de la reine, et qui avaient la tutelle des biens de Héron, périrent sous l'échafaud révolutionnaire.

Le naufrage matériel était complet. Alors qu'il aurait dû hériter de fortunes considérables, il ne restait au jeune Héron que 43 francs de rente. Ne pouvant plus retourner au collège de Navarre, le jeune homme passa quelques mois avec sa tante, la marquise de Malherbe, blottie alors dans son château de Vaux en Normandie. Héron prit les armes comme volontaire pour la cause de la patrie et marcha sous les drapeaux de la république contre l'insurrection de la Vendée. Il prit ainsi part sous les ordres du général Scheffer à l'affaire de Pontorson. Son bataillon ayant été licencié, il revint à Paris. Exposé aux dangers de la Terreur, il dut son salut à un ami de son parrain, l'ingénieur Cachen, qui se porta garant pour lui. Le 2 pluviôse an 2, il fut admis à l'école des ponts et chaussées, et passa l'année suivante à la future école polytechnique qui s'appelait encore école centrale des travaux publics.

Après 4 ans à Polytechnique, il en passa encore trois à l'école des mines. Il en sortit le 5 nivôse an 10 et fut envoyé comme ingénieur ordinaire dans la Moselle. Il fut peu après chargé en outre de l'inspection de la Meurthe et du Rhin. Après la conquête du Hanovre, le premier consul souhaitait développer l'exploitation des mines du Harz. Héron fut choisi en raison de sa bonne connaissance de la langue allemande. Bonaparte lui donna lui-même des instructions précises, et il alla rejoindre sa nouvelle résidence de Klausthal en 1803 comme commissaire du gouvernement. Il donna alors une impulsion puissante aux travaux, tout en se tenant au courant de la minéralogie et de la géologie.
Il s'intéresse par exemple aux travaux de Blumenbach sur les fossiles.
Début 1806, il voulut étudier à fond et sur place les mines et usines de la haute Saxe et de la Bohême. Il fit un séjour de plusieurs mois à l'école des mines de Freiberg. Nommé ingénieur en chef le 8 juin 1806 lors d'un bref voyage à Paris, il reçut l'ordre de se rendre à Varsovie, alors grand quartier général des forces françaises, pour examiner et mettre en valeur les mines dans les pays conquis. Il géra cette situation admirablement, développant l'exploitation des mines grandes et petites. L'empereur le nomma le 20 juin 1807 inspecteur général des mines et usines de tous les pays du Rhin à la Vistule. En 1809, lorsque fut créé le royaume de Westphalie, il reçut la mission spéciale d'organiser l'administration royale des mines sur ce territoire. Il s'acquitta brillamment de cette mission, et le roi Jérôme voulut l'attacher exclusivement au service de ce nouvel Etat en le nommant directeur général des mines du royaume de Westphalie. Héron de Villefosse déclina l'offre et revint à Paris. Il fut alors chargé d'organiser les mines du grand-duché de Berg. Cette tâche dura une annnée, au cours de laquelle il commença à écrire son grand ouvrage de la Richesse minérale.

Il est nommé inspecteur divisionnaire en 1810, chargé de l'inspection d'un vaste territoire, il va inspecter effectivement en 1813 la Carniole, la Carinthie, passe par Hydria et par Salzbourg.

En 1811, il épouse Mlle Chaumont de la Millière, fille de son tuteur et parrain.

En 1814, il est nommé maître des requêtes et est attaché en 1815 à la section du contentieux du conseil d'Etat.

En 1815, les étrangers étaient à Paris. Il est chargé de seconder le préfet deParis dans ses relations avec les étrangers. Il fut introduit auprès de Wellington qui était très en colère de ne pas recevoir des fourrages, et réussit à le calmer.

Comme son administration en Allemagne avait laissé de bons souvenirs, les souverains étrangers et leurs entourages lui témoignaient une estime particulière. Le conseil général de la Seine vota à l'unanimité de lui envoyer une boîte d'or aux armes de la ville. Président du jury au procès de Valette, membre de la commission chargée de réorganiser Polytechnique en 1816, il aurait pu être nommé préfet d'Ille-et-Vilaine : le ministre le lui proposa, et il refusa. Il était depuis le 10 juin 1816 membre libre de l'Académie des sciences.

De 1820 à 1824 il remplit l'office de secrétaire du cabinet officiel de la maison du roi, qui le choisit probablement en raison de ses qualités d'humaniste distingué. Il s'était vu nommer chevalier de St Michel en 1821, officier de la légion d'honneur en 1823 et commandeur de l'ordre des Guelfes. En 1824 il fut nommé baron.

Charles X nomma Héron de Villefosse conseiller d'Etat en service ordinaire. Il déclina l'invitation à devenir député de la Nièvre. Il quitta le conseil d'Etat en 1830, mais il conserva sa position dans le corps des Mines. Louis-Philippe le nomma en 1832 inspecteur général de 1re classe et vice-président du conseil général des mines. Il donna rapidement sa démission (Cordier lui succéda officiellement en 1834 mais pratiquement bien plus tôt). Il se retira jusqu'à sa mort en 1852.

On sait qu'en 1809, les mineurs du Harz auxquels il avait fait conserver leurs privilèges, voulaient frapper une médaille commérative qui représenterait l'ingénieur français. Il eut beaucoup de mal à leur faire comprendre que c'était l'effigie de l'empereur qu'il fallait mettre sur la médaille !

Héron de Villefosse fit partie en 1806, 1819, 1823 et 1827 du Jury central pour l'exposition des Produits de l'Industrie. Il rédigea le rapport sur la métallurgie à celles de 1819, 1823 et 1827.

Le traité de la Richesse minérale était déja introuvable en 1831 lorsque le duc d'Orléans essaya de l'obtenir. Il en était de même de son Essai sur l'histoire de la révolution française par une collection d'auteurs latins. Héron se traduisit lui-même, en français d'abord, en allemand ensuite ... Enfin, il versa dans la poésie en 1798, oeuvre publiée en 1821 ; et il traduisit deux traités de Sénèque, la Vie heureuse et le Repos du sage.

De son mariage avec Angélique-Joséphine-Louise Chaumont de la Millière, Héron de Villefosse eut trois enfants : Antoine-Félix (1814-1887), avocat, qui eut des descendants ; Etienne-Marie, archiviste, et Pierre-Marc-René, qui eut lui-même de son mariage avec Marie-Mathilde de l'Espine un fils : Antoine-Marie-Albert (1845-1919), directeur des musées nationaux et membre de l'Institut (1886), père de René Marie Henri (1903-1985, conservateur en chef des musées et spécialiste de l'histoire de Paris) et de Marc-Marie-Etienne, lui-même père de Laurent-Antoine-Marie. Tous ces descendants ont été à leur heure des célébrités auxquelles le Dictionnaire de biographie française consacre des rubriques.


Voir aussi : Académiciens libres issus de Polytechnique au XIXeme siècle

Les talents d'écrivain de Héron de Villefosse s'apprécient notamment par sa chanson de table de 1798, à la gloire de l'Ecole polytechnique et de ses anciens élèves.