Marie Adolphe CARNOT (1839-1920)

Photo ENSMP

Marie-Adolphe CARNOT était le petit-fils du conventionnel Lazare CARNOT "organisateur de la victoire" sous la Convention, et le fils de Hippolyte CARNOT (qui participa au mouvement saint-simonien, fut l'ami de Michel Chevalier, et devint ministre de l'instruction publique sous la IIème République, député, sénateur à vie, membre de l'Institut). La mère de Marie-Adolphe était née Marie Grace Claire DUPONT (1816-1897).

Le frère de Marie-Adolphe CARNOT fut Marie François Sadi CARNOT (X 1857 ; 1837-1894), ingénieur des Ponts qui devint président de la République (1887) et fut assassiné en 1894. Le deuxième fils de Sadi CARNOT, Ernest Claude Jean CARNOT, ingénieur civil des mines, fut un grand homme d'affaires em même temps que conseiller général et député.

L'oncle de Marie-Adolphe CARNOT, Nicolas Léonard Sadi CARNOT (X 1812 ; 1796-1832), était capitaine du génie lorsqu'il décida de se consacrer aux recherches scientifiques : il fonda la thermodynamique. Très en avance sur son temps, il est mort dans la misère et l'oubli, ses travaux n'ayant été découverts par les scientifiques et le grand public que bien plus tard.

Marie-Adolphe CARNOT épousa en 1866 Marguerite BARRAUD-RICHEMOND (1847-1869) et en deuxièmes noces, en 1874, Mathilde OFFROY-DURRIEU (1842-1897), nièce d'un député du Cantal. Père de 4 enfants :

  • Paul CARNOT (1869-1957), médecin, membre de l'Académie de médecine, qui a découvert les cytopoïétines, les hormones embryonnaires, et qui a laissé une nombreuse descendance (9 enfants de son mariage avec Madeleine GUADET).
  • Jean CARNOT (né en 1881), ingénieur électricien qui fut député de la Charente (1924-1928) et président de l'Alliance républicaine démocratique. Il fut ensuite administrateur de nombreuses sociétés minières et métallurgiques. En 1939 il fut responsable du Service de recherches scientifiques au ministere de l'Armement. Il avait épousé Geneviève MERILLON, dont le père Daniel MERILLON (1852-1925) avait été député de la Gironde et procureur général de la Haute Cour.
  • Marguerite (Mme Henri PERRET)
  • Marie (Mme Jean ARMAGNAC)

    Marie-Adolphe CARNOT est ancien élève de l'Ecole Polytechnique (promotion 1858, entré classé 12ème, sorti classé 5ème sur 91 élèves) et de l'Ecole des mines de Paris (promotion 1860). Il est membre du Corps des mines.



    Adolphe Carnot, élève de l'Ecole des Mines de Paris
    (C) Photo collections ENSMP


    Résumé de la carrière professionnelle de Marie Adolphe CARNOT :

    Citation du livre de Jean Boulaine Histoire des pédologues et de la Science des sols :
    Carnot eut un rôle très négatif en Science des sols. Il réclamait des économies et prétendait que la simple transcription de la carte géologique était suffisante pour avoir un document sur la répartition des sols.


    PAROLES PRONONCÉES AUX OBSÈQUES DE M. ADOLPHE CARNOT,
    DIRECTEUR HONORAIRE DE L'ÉCOLE SUPÉRIEURE DES MINES.,
    le 24 juin 1920
    Par M. CHESNEAU, Directeur de l'École des Mines.

    Publié dans Annales des Mines, tome X, 1920

    MESSIEURS,

    Au nom du Corps des Mines et de l'École nationale supérieure des Mines, je viens dire un suprême adieu à celui qui fut notre collègue, notre maitre, notre ami.

    On vous a dépeint l'oeuvre et le rôle du grand citoyen, de l'homme de coeur que nous pleurons ici : qu'il me soit permis de retracer à mon tour l'ingénieur distingué, le professeur incomparable, le directeur éminent que fut Adolphe Carnot dans l'École à laquelle il a consacré la moitié de sa vie et la plus large part d'une activité toujours en éveil.

    Né le 27 janvier 1839, Adolphe Carnot entrait en 1859 à l'Ecole Polytechnique; deux ans après, l'École des Mines ouvrait ses portes au jeune élève-ingénieur.

    Comme élève, Adolphe Carnot donnait déjà la mesure du savant qu'il deviendrait un jour. Un voyage d'études qu'il entreprenait en 1803 dans la Bohème, la Saxe et le Tyrol, lui fournissait la matière d'un mémoire sur le traitement métallurgique des minerais de Freiberg, et le Conseil du l'Ecole le jugeait si remarquable qu'il décernait un prix spécial à ce mémoire (distinction tout à fait exceptionnelle) et le faisait insérer aux Annale des Mines.

    Sorti le 1er mars 1864 de l'Ecole comme ingénieur au Corps des Mines, Adolphe Carnot était chargé du sous-arrondissement minéralogique de Limoges, de la direction des laboratoires de la Haute-Vienne et de la Creuse et de la Carte géologique de l'Indre : ces multiples services allaient l'orienter vers la science où il devait s'affirmer bientôt comme un maître. Le Limousin est en effet particulièrement riche en minerais très variés et d'éléments rares, en sorte que le jeune ingénieur put se livrer avec ardeur à l'étude des espèces minéralogiques que ses tournées lui permettaient de récolter en abondance; c'est cet heureux concours de circonstances qui a permis à Adolphe Carnot de démêler, dans l'universalité de ses goûts scientifiques, les domaines où ses aptitudes lui feraient donner la pleine mesure de son talent : la minéralogie et la chimie analytique.

    Sa réputation de chimiste allait grandissant et, quatre années à peine après sa sortie de l'École des Mines, celle-ci l'appelait pour suppléer le professeur de Chimie générale et diriger les travaux chimiques des éleves.

    A la déclaration de guerre de juillet 1870, le petit-fils de Lazare Carnot quittait son laboratoire pour prendre le commandement d'un bataillon de mineurs volontaires du génie, et coopérait ainsi bravement à la défense de Paris et de sa chère école, que les projectiles atteignaient déjà par deux fois.

    La paix revenue, Adolphe Carnot reprenait ses travaux à l'École des Mines, et après avoir suppléé a différentes reprises le professeur de Chimie analytique, M. Moissenet, que la maladie éloignait fréquemment de sa chaire, il lui succédait définitivement le 31 octobre 1877, comme chargé du cours de Docimasie, et de la direction des Laboratoires de Chimie et du Bureau d'essais de l'École des Mines.

    L'Institut Agronomique l'avait appelé en 1876 à la chaire de minéralogie de son école : ce sont ces doubles fonctions professorales, remplies par Adolphe Carnot pendant un quart de siècle, qui ont précisé le cadre de ses beaux travaux d'analyse minérale dans les domaines de la minéralogie, de la métallurgie et de la chimie agricole.

    Parmi les nombreux mémoires ou notes publiés par Adolphe Carnot dans cette période, je me bornerai a rappeler ceux qui ont trait aux méthodes imaginées ou perfectionnées par lui, pour la détermination précise d'éléments rares ou peu abondants et jouant toutefois un rôle capital dans certaines roches ou certains métaux. Plusieurs de ces travaux sont restés classiques - comme ceux sur le dosage du fluor dans les phosphates (d'où l'auteur a tiré des conclusions du plus haut intérêt sur l'absorption graduelle par les ossements fossiles du fluor répandu à l'état de traces dans tous les terrains), ses études sur l'analyse des eaux minérales, celles sur les vanadates, le chrome, le nickel et le cobalt, ses recherches sur l'état où se trouvent dans les fontes et aciers les éléments autres que le carbone.

    Adolphe Carnot a condensé son enseignement et ses recherches dans un magistral traité d'analyse des substances minérales dont trois volumes ont paru et dont le dernier, sur le point d'être achevé, était jusqu'à ces derniers jours l'objet constant des préoccupations de notre vénéré maître.

    A ses fonctions de professeur s'étaient ajoutées pour Adolphe Carnot, à partir de 1882 celles d'Inspecteur de l'Ecole : il ne devait quitter les unes et les autres, après être parvenu au plus haut grade du Corps des Mines, que pour prendre, le 1er janvier 1901, la Direction de l'École qu'il devait exercer jusqu'en mai 1907, époque à laquelle il prenait sa retraite et était remplacé par son camarade Edmond Nivoit, enlevé lui aussi tout récemment à l'affection de ses élèves et de ses amis.

    En abordant la chaire de docimasie, Adolphe Carnot avait une lourde tâche à remplir : celle de maintenir cet enseignement à la hauteur où l'avaient amené, après son fondateur Vauquelin, ses illustres prédécesseurs Berthier, Ebelmen et Rivot, son initiateur dans cette science. Adolphe Carnot a pleinement justifié les espérances qu'on avait mises en lui, et s'est montré de tous points l'égal de ses maîtres. Comme Rivot, il réunissait à un rare degré les aptitudes de l'ingénieur à l'érudition du savant circonspect et consciencieux. Dans tous ses travaux d'analyse minérale, A. Carnot avançait d'un pas tranquille et sûr à la recherche des faits inconnus ou mal expliqués; il les considérait en eux-mêmes, en faisant l'examen minutieux, sans parti pris doctrinal, avec un souci de l'exactitude donnant une valeur toute particulière aux observations qu'il décrit et aux conséquences qu'il en tire, et par là même une autorité considérable à son enseignement.

    La direction de l'École des Mines n'avait pas imposé une tâche moins difficile à Adolphe Carnot : les Combes, les Daubrée, les Haton de la Goupillière pour ne citer que ceux de ses prédécesseurs que nous avons connus et admirés, avaient, par leur habile gestion, amené notre Ecole à un haut degré de prospérité et lui avaient acquis un prestige incomparable. L'administrateur qu'a éte Adolphe Carnot dans ces fonctions ne l'a pas cédé au savant : par sa hauteur de vue, par la clairvoyance avec laquelle il a su adapter l'École à son régime nouveau d'autonomie financière en présidant à la création de nombreux laboratoires, il a maintenu l'École des Mines au premier rang des grands établissements d'instruction technique supérieure : qu'il en soit remercié ici une fois de plus par nous, ses éleves, devenus ses collègues et les continuateurs de son oeuvre !

    A sa valeur exceptionnelle d'administrateur et de savant, Adolphe Carnot joignait d'inappréciables qualités de coeur, de droiture et d'impartialité que ne pourront jamais oublier ses élèves, et surtout ceux qui, comme moi, ont eu le bonheur d'être en relations intimes avec lui. Fidèle à ses convictions, A. Carnot n'a pas été moins fidèle à ses amis. Accueillant à tous, tolérant pour toutes les opinions sincères, il a réalisé de façon parfaite le modèle que son père avait si bien tracé dans les admirables conseils qu'il adressait à ses fils, élèves à l'École Polytechnique, en leur dédiant ses Mémoires sur Lazare Carnot : comme son aïeul, celui que nous pleurons ici a possédé cette bienveillance universelle donnant la conviction que nul ne peut être heureux que par le bonheur des autres, et c'est cette grande bonté qui lui a valu, comme à son aïeul, le rare privilège d'atteindre les extrêmes limites de la vie humaine sans avoir vieilli.

    Cher Maître, les générations d'élèves que vous avez instruits et que vous avez aimés s'inclinent respectueusement devant vous, et vous apportent, avec leur dernier salut, l'hommage de leur profonde douleur et de leur affection.


    Voir aussi :

  • Fondation Carnot
  • La carnotite, minéral découvert en 1899 par Friedel et Cumenge, dédié par eux à Marie Adolphe Carnot.
  • Publication de l'Institut, 1920 : Funérailles de Adolphe Carnot
  • Jean-Louis BRETON, 1922 : Notice nécrologique (Publication de l'Institut)
  • Rosemonde SANSON, 1987 : Adolphe Carnot et l'Alliance Républicaine Démocratique.


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